Virilité, anglais yaourt, Tarzan : sur les traces de Saint-André en Angleterre

Philippe Saint-André entouré de Sébastien Chabal, Sébastien Bruno et Ignacio Fernandez Lobbe (de gauche à droite) - AFP
Philippe Saint-André a profité du transfert de Croydon vers Vale of Glamorgan (pays de Galles) samedi pour ouvrir une porte de son intimité à ses joueurs. Le sélectionneur a en effet invité tout le monde à descendre au Montpellier Wine Bar de Cheltenham où il avait ses habitudes quand il évoluait à Gloucester où il a terminé sa carrière de joueur avant d’embrasser celle d’entraîneur en 1998. C’est donc en Angleterre que l’ancien ailier mythique du XV de France a troqué son maillot pour le costume. Son aventure de directeur du rugby des Cherries a duré quatre ans avant qu’il ne rebondisse à Bourgoin (Top 14) où il sera débarqué deux ans plus tard.
« Brisé » par cet échec, PSA se relance à Sale en 2005 où il écrira la plus belle page de sa carrière d’entraîneur (pour l’instant !) en menant les Sharks à la victoire en Challenge européen (2005) avant de leur offrir leur premier et unique titre de champion d’Angleterre en 2006. Neuf ans après, l’épopée est encore prégnante et les anciennes ouailles de PSA gardent un souvenir ému de son coaching, qui les a marqués mais aussi beaucoup amusés. « Ça se voyait qu'il était français, sourit Eifion Lewis-Roberts, pilier. Dans ses manières surtout. Son geste préféré, c'était de se gratter les c… » A vrai dire, une grande partie du discours du « Goret » tourne en dessous de la ceinture. « C’était un type passionné, poursuit Lewis-Roberts. Ses discours d'avant-match parlaient toujours de victoire, de se donner à fond. Il disait : "il faut montrer que vous avez des c…". »
Tarzan et… John !
Neil Briggs, talonneur qui évolue toujours à Sale, confirme cette tendance à user d’un vocabulaire viril : « Il répétait sans arrêt : ‘’il faut vouloir mettre sa tête contre le genou adverse et arriver à fond". Avec sa voix aiguë, il criait beaucoup. » De l’avis de tous, les causeries de Saint-André dans un anglais « yaourt » et hésitant resteront comme des moments mythiques de son mandat (2005-2009). « Lors des réunions, il sortait des phrases qui ne voulaient rien dire en anglais, se marre Magnus Lund, troisième ligne international. J’ai des souvenirs où il sortait des trucs incroyables à la mi-temps ou à la fin des matches. » Comme cette anecdote racontée par Briggs encore : « Un jour, il criait parce qu'on ne mettait pas assez d'intensité, il disait : "pendant la semaine, vous vous entraînez comme Tarzan et le week-end vous jouez comme… John ! Et il était très sérieux. Tout le monde voulait rigoler mais on a dû attendre. »
Malgré ses hésitations de langage, le discours passe et le collectif soudé autour de Sébastien Chabal, Jason Robinson ou Mark Cueto fait des ravages jusqu’à cette finale remportée face à Leicester. « Le club a une dette envers Philippe parce qu'à son arrivée, nous étions une équipe de milieu de tableau, assure Dave Swanton, attaché de presse. Il nous a fait entrer dans la cour des grands. » « Les gens se souviennent de lui, poursuit Briggs. Il y a des photos de la victoire en championnat. Lui avec le trophée, dans l'ancien stade, le maillot signé par les joueurs. Il est toujours présent ici et les gens ne l'oublieront pas. » Le rugby français ne demande qu’à célébrer son sélectionneur de la même manière.