Mondiaux de ski freestyle: "Il est grand ce titre", savoure Perrine Laffont après son sixième sacre

Perrine Laffont lors des Mondiaux de ski freestyle en Suisse, le 18 mars 2025 - Icon Sport
Perrine Laffont, quel est le sentiment après ce sixième titre mondial?
Cette médaille est dure à réaliser. C’est en voyant les messages arriver, les réseaux, que j’ai commencé à comprendre l’ampleur de ma victoire. La journée état tellement longue mais elle est passée tellement vite. C’est dur de mettre des mots. Je veux remercier le staff. La piste était très compliquée. J’ai eu beaucoup de mal à me mettre en place sur cette piste glacée. Le staff a toujours cru que j’allais aller jusqu’au bout. Grâce à leur énergie je suis montée en puissance. C’a été beaucoup d’adaptation car je n’ai pas du tout fait les mêmes sauts que cet hiver car la piste ne le permettait pas. Le staff m’a bien drivée sur la bonne stratégie. J’étais dans un petit cocon. C’est pour ça que j’ai eu du mal à réaliser. Quand ils ont annoncé les scores c’était limite si je n’attendais pas le score de la fille d’après. J’étais un peu perdue. C’était un flot d’émotions.
Il y a surtout du soulagement?
Depuis que j’ai décidé de revenir il y a moins d’un an, il y a eu beaucoup de questionnements. Tout au long de ma saison il fallait retrouver ma confiance, il fallait reprendre un rythme que je n’avais plus. Je suis arrivée à mon pic de forme pile pour les Mondiaux.
Est-ce que le plus important n’était pas de faire partir Jaelin Kauff avant vous en finale?
Je n’ai pas regardé son run car tu peux la voir skier et ça peut mettre la pression. Lors du débriefing on a dit que ça avait pu renverser la pression. On a pris la stratégie d’un saut plus facile en haut. Jaelin a dû ressentir cette pression. Elle a fait un trop gros saut en haut. Je ne pensais pas qu’elle ferait ça car elle est très linéaire. Elle a eu la pression et elle a trop poussé car elle savait que j’étais proche.
Comment avez-vous fait si vous l’avez vue sortir?
Je déteste entendre les scores de la fille qui passe avant moi. Je l’ai vue ne pas se mettre dans les trois du podium provisoire. Je me dis :’il y a eu un problème elle n’est pas dans les trois et qu’il faut que j’assure’. Et là j’ai un flash de ma préparatrice mentale qui me dit de ne pas faire ça car ce serait un coup à se planter. Ça m’a refait switcher. J’ai poussé sur les bâtons comme une folle et j’ai fait un gros run. En bas, les coaches voulaient me dire que Kauff s’était ratée et qu’il fallait assurer. Le coach en haut a pris le parti de me laisser dans ma bulle.
Que représente ce sixième titre mondial par rapport aux précédents?
Ils ont tous une saveur particulière. Il est grand ce titre. Je reviens de loin. L’année où j’ai arrêté n’a pas vraiment été simple. Ça n’a pas été une année de vacances. C’était une période compliquée. Revenir et retrouver le niveau que j’avais avant, progresser, avoir cru que je pouvais le faire, ce sont des heures de travail. J’ai douté aussi. Les gens autour de moi ont cru en moi. Cette médaille représente la résilience, le fait de ne pas lâcher. Si on est un bosseur, qu’on est bien entourée, le travail paye. Celle-là j’en suis très fière.
Que vous a dit votre préparatrice mentale dans les derniers instants?
Elle était là depuis le début de la semaine. Sur cette saison j’ai des capacités en ski très grandes mais je n’arrive pas encore à l’intégrer et le réaliser. Je n’ai pas une grande confiance en moi. Je fais des super choses à l’entraînement mais j’ai du mal à le reproduire en course car le stress m’inhibe. C’est ce verrou qu’elle a voulu faire sauter. La stratégie était de faire ressortir la femme que je suis maintenant et pas celle que j’étais avant d’arrêter le ski: ‘Assume qui tu es, sois la Perrine des entraînements, lâche-toi.’ Elle m’a botté les fesses pas mal de fois. Je n’étais pas là pour aller chercher un sixième titre mais pour skier, faire du Perrine Laffont, des gros sauts. Elle a fait ressortir la fougue en moi sans penser au résultat. Quand je fais ça, ça fait des gros points.
Est-ce que dans cette victoire il y a une façon de poser des jalons par rapports à l’année prochaine, l’année des JO 2026?
Je suis en train de changer mon approche, comment je gère les échéances. Aujourd’hui je n’allais pas chercher un sixième titre. Ma carrière est déjà très belle. Si elle devait s’arrêter aujourd’hui j’en serais pleinement satisfaite. Je suis déjà championne olympique. On verra quelle stratégie on prend pour l’hiver prochain. Je fais du ski pour l’amour du ski. J’ai besoin de prendre davantage de recul sur ces grosses échéances. Ces Mondiaux ont été une bonne répétition. Je n’ai pas eu ce stress depuis une semaine de penser à un nouveau titre mondial. On cherche que je skie, que je fasse des gros sauts, que je me challenge tous les jours en termes de technicité. Ce qui m’a bouffé en 2022 c’était qu’on pensait aux médailles, à l’objectif JO. J’ai envie de kiffer ma vie, de repousser mes limites. Aujourd’hui c’était la preuve qu’on n’allait pas chercher un sixième titre mais une Perrine Laffont qui montre ce dont elle est capable. C’est peut-être ce qu’on va aller chercher sur les prochaines années.