Ski alpin: la préparation mentale, son statut, ses blessures... Les ambitions de Chiara Pogneaux cette saison

A l’approche de ce premier slalom de la saison, comment vous sentez-vous ? Et comment s’est passée la préparation estivale?
Ça y est, on est vraiment plongé dans le bain, toutes les nations sont arrivées. Nous, on est revenus de Suède. Ça met un peu la pression. Mais avec la préparation de cet été je me sens quand même bien, j’ai eu quelques problèmes de dos en fin de saison dernière et j’ai été en réathlétisation tout l’été mais j’ai été bien suivie. J’ai eu beaucoup de chance d’être tombée sur ces personnes. Je suis sur les skis depuis fin août et ça se passe plutôt bien. J’ai encore quelques douleurs mais j’arrive à les gérer et à skier pleinement. Ce n’est plus vraiment un problème.
Quels sont ces problèmes de dos?
J’ai fait une IRM en mai qui a décrété une hernie, plus une sciatique qui part dans la jambe gauche.
Est-ce vous vous ressentez à 100% de vos capacités?
Sur le moment je sentais que j’avais un peu de retard. Je suis une personne qui n’a jamais trop apprécié skier l’été et je préfère faire de la préparation physique. Maintenant que je n’ai pas skié l’été, je me suis rendue compte que c’était important. Je suis arrivée à la bourre par rapport aux autres filles sur les skis mais je n’ai plus vraiment d’appréhension quant à comment va réagir mon dos, savoir si je vais avoir mal sur certains appuis. Puis au pire j’ai mal, puis j’adapte. Mais ce n’est pas quelque chose qui va mettre en péril ma façon de skier. J’ai eu un peu de retard mais depuis quelques semaines je me sens quand même bien. J’ai skié de façon normale, je me suis bien entraînée, je me sens plus ou moins prête. On verra bien.
Ce premier slalom de la saison est à Levi, une piste que vous appréciez. L’an dernier vous aviez réalisé votre premier Top 15 là-bas…
Ce n’est pas un feeling avec la piste mais plutôt avec l’endroit. Levi c’est incroyable. Pour toutes les personnes en dehors du ski qui veulent visiter un endroit dans leur vie, il faut venir à Levi, c’est magnifique. Il y a les rennes, les aurores boréales, ce froid qui parait glacial mais c’est dans l'environnement, c'est dans l'évènement. Tout est incroyable. C'est trop beau. J'arrive toujours ici avec l'envie de skier, de me faire plaisir dans un cadre comme celui-là. Le ski suit derrière et ça se passe plutôt bien après ça.
C'est un peu magique?
C’est un environnement magique, il faut le préciser. C'est trop beau. On a l'impression d'être catapulté au pays du père Noël, de chez nous à ici, franchement ça n'a rien à voir. J'adore chez nous mais ici, ça a une saveur particulière.
Quels objectifs vous fixez-vous sur ce premier slalom?
Les objectifs sont assez hauts pour toute la saison. J'aimerais faire des tops 10, tops 5, voire des podiums. Les ambitions sont de plus en plus grandes chaque année. Avec la préparation que j'ai eu qui a été un peu différente, je ne sais pas ce qu'il va se passer. Même l'an dernier avec une préparation normale je ne savais pas. Donc là je ne vais pas me poser trop de questions, pas me mettre de pression non plus. Je verrai une fois que je suis en bas, que j'aurais passé la ligne de la première manche. J'espère forcément être dans les 15, 10 voire mieux que ça.
Vous sentez que l'an dernier vous avez passé un cap?
C'est clair que l'an dernier il y a eu un cap, physiquement, techniquement, mentalement. Après j'ai aussi fait une fin de saison moyenne. Donc à voir comment je vais rebondir pour cette saison. Depuis que je suis en FIS ou en coupe d'Europe je fais souvent des fins de saison compliquées avec la fatigue. Ça repart toujours bien donc j'espère que ça sera le cas cette année. Je ne me fais pas énormément de soucis. Et si je ne suis pas prête à Levi, je le serai dans un mois ou l'année prochaine, enfin je n'espère pas. Mais j'ai confiance en ce qu'on va faire.
Vous êtes la française qui a le mieux performé la saison dernière, est-ce qu'en équipe de France vous avez changé de statut?
Pas du tout. Je ne crois pas avoir pris la place d'une leader et en plus je n'aime pas forcément ça. Alors oui dans notre tête quelquefois on y pense. Avec la saison l'an dernier, sur le papier en tout cas je suis celle qui est allée le plus vite. Mais je suis loin d'être la meilleure. On a toute un niveau qui est très bon et à l'entraînement on est toutes aussi fortes les unes que les autres. Ce n’est pas parce que j'ai fait plus de tops 15 que je suis la meilleure française. J'ai été forte au bon moment, j'ai eu la chance d'avoir des bons dossards par la suite. Et franchement ça aide. Si on avait été toutes dans les trente en fin de saison, on aurait toutes eu le même statut à la fin de saison.
Dans l’équipe de France de slalom, vous êtes toutes jeunes. Ce groupe est en pleine transition?
Il y a deux ans on avait un peu peur de se dire qu'en slalom en tout cas ça allait être compliqué suite à au départ de Nastasia Noens. On ne savait pas comment ça allait être géré. Au final, on a été toutes surprises de performer aussi bien. Il y a une animosité hyper positive entre nous qui fait qu'on se tire vers le haut. Il y a de la compétition, on est compétitives entre nous, mais je suis hyper contente de faire partie de ce groupe. Je pense qu'on va aller loin toutes ensemble.
Quelle est l'ambiance justement dans cette équipe de France?
On est des filles, surtout humaines. Quand on reste longtemps avec les mêmes personnes c'est toujours un peu compliqué sur certains points. On a de la chance de très bien s'entendre et de se calmer très vite. Ça peut chauffer un moment mais une heure après c'est terminé. On s'entend toutes très bien. Il n'y a pas un moment où ça explose et on a envie de s'étrangler. On a un bon groupe. Même avec l'approche de la course, celles qui sentent qu’il y a un peu plus de pression, elles vont se mettre de côté. Et ne pas tirer les autres vers le bas. Donc c'est plutôt sain cette ambiance.
Quand on voit Cyprien Sarrazin performer en descente, même si ce n'est pas la même discipline que vous, ça donne envie de performer aussi bien?
Oui complètement. Vous avez bien fait de souligner que ce n'est pas la même discipline, parce qu'on regarde plus ça comme quelque chose de magnifique. Moi en vitesse je le ferai jamais de ma vie, je n’aime pas le pratiquer, je suis mauvaise, ce n’est pas quelque chose que j'aime. Mais le regarder, je suis impressionnée. Je me dis que oui de notre côté on peut avoir un groupe qui marche aussi bien que celui de Cyprien, et qu’on peut faire des résultats comme ça, du jour au lendemain. On se dit que oui ça peut exploser pour nous également.
C’est une saison importante qui arrive avec les Mondiaux en février prochain. Ils sont déjà dans votre tête?
On y pensait déjà l'an dernier quand on skiait sur la piste lors des finales. Je pense que c'est des moments qui n’arrivent pas souvent. Et quand ils arrivent, quand t'es au pic de ta forme, de ta carrière, forcément tu l'as dans un coin de ta tête. Ça met un peu de pression, on est six filles à skier vite et bien. Mais il n’y a que quatre places. On essaiera de tirer notre épingle du jeu et les sélections seront faites par les coachs avec les résultats. Ça va être juste et j'espère que je serai dans le jeu.
Ça ajoute de la pression?
Oui forcément. Je parle avec le cœur ouvert. J'ai pris exprès une préparatrice mentale cette année. Je n’ai jamais été suivie auparavant. Et j'en ai pris une parce que les Mondiaux et les Jeux Olympiques arrivaient. Et parce que j'ai petit problème avec les confrontations pour les événements. Je me suis dit que j'allais mettre toutes les chances de mon côté et ça marche plutôt bien. C’est aussi une façon de se pousser pour être de plus en plus forte et skier plus vite.
Cette préparatrice mentale, vous la voyez depuis quand?
Je la vois depuis fin de l'été, fin août, une séance par semaine, c'est un projet qu'on a mis en place pour attaquer la saison assez prête mentalement. Parce que je n'ai jamais été quelqu'un de super fort à ce niveau-là. Il fallait que je m'entraîne aussi. C'est aussi important que le physique, la technique. On a des coachs pour le ski, le sport et donc pour le mental. Elle m'a vraiment bien aidé donc j'espère que ça va porter ses fruits pour ces projets à venir.
C'est une personne que vous avez trouvée vous-même?
Je ne sais pas trop comment répondre à cette question. On a parlé de Cyprien Sarrazin tout à l'heure et en voyant sa super saison, je me suis dit que j'allais prendre la même préparatrice mentale pour m'aider à skier aussi vite. C'est Cyprien qui en a parlé cet été. Je me suis penchée sur le sujet, je l'ai contactée. On a commencé à travailler ensuite.
Est-ce un réel besoin de l'avoir pour passer un autre cap?
C'est ça. J'étais un peu au pied du mur avec le dos. Je ne savais pas trop ce qu'il allait se passer par la suite. Et moi je n'étais pas à la recherche d'une préparatrice qui allait juste me mettre des idées dans la tête, et me persuader que je suis la meilleure. Je voulais quelqu'un qui m'aide aussi sur le plan physique, j'ai la chance d'être tombée sur cette personne. Elle travaille aussi en tant que kiné-ostéo. Elle m'aide sur pleins de points en plus du mental donc je suis contente.