Ski alpin: "Parfois je me demande ce que je fous là", les confessions d'Adrien Théaux, le doyen des Bleus

Adrien Théaux - Gepa / Icon Sport
Cette semaine, on retrouve Adrien Théaux à Wengen. La première fois qu’il est venu dans la petite station Suisse, c’était en 2006, pour un super combiné. Depuis, il a pris trente fois le départ à Wengen. "J’adore l’endroit, c’est chouette", sourit le Français. Et évidemment quand on parle de cette classique du ski alpin, on pense à la descente sur la mythique piste du Lauberhorn.
Samedi, Théaux prendra le départ de sa 16e descente suisse. "Il y a des passages où j’ai du mal. Le chemin, ce n’est pas là où je me débrouille le mieux. J’ai fait des bons résultats ici mais je n’ai jamais fait de podium. Ça reste une piste que j’apprécie. Il y a une super ambiance". L’an passé, il s’était classé 6e de la descente. "L’objectif sera d’aller chercher devant. Le podium je ne sais pas. Quand je prends le départ c'est pour aller devant, je déteste perdre. Il y a des moments, il faut être réaliste. Je sais que je peux faire des gros coups. Peut-être pas partout ça c'est sûr. Jouer devant, être placé vers les dix ça serait top".
Jamais lassé, toujours le même plaisir malgré onze saisons au plus haut niveau. "Parfois je me demande ce que je fous là. Ça m'arrive, alors qu’avant non. Mais avec les accidents que j'ai eus je me dis mais qu'est-ce que je fais", soupire Adrien. "J'aime m'entraîner aussi. J'adore ça. Il n’y a pas un matin où je n'ai pas envie d'aller à la salle de muscu, ou aller courir... sur les skis, pareil. On a une chance énorme de vivre ce qu'on vit. Tant que ça marche on continue. Je prends du plaisir à faire ça".
Et son plaisir, il l’a aussi grâce au groupe vitesse, avec qui il passe une grande partie de sa saison. "Après le plaisir que j'ai, c'est de partage avec le groupe. On a des moments en stage, c'est hors normes, hors du temps aussi pour moi. Il y a une communion. Une fraternité qu’on ne retrouve pas ailleurs".
"J’ai des souvenirs de lui à la télé"
Il faut dire que les skieurs passent mais lui reste et est toujours là. "Ça fait 15 ans que je suis là et lui était là bien avant moi. J’ai des souvenirs de lui à la télé quand j’étais jeune", rigole Blaise Giezendanner, 34 ans. "J’ai appris à le connaître quand j’ai intégré les groupes. C’est quelqu’un de très entier, humble. Il ne faut pas oublier qu’il a une carrière et un palmarès XXL. Ça reste un mec tout à fait simple, gentil, qui échange beaucoup avec les jeunes".
D’ailleurs, dans les plus jeunes, il y a Matthieu Bailet, 28 ans. "C’est le doyen. Celui que l’on respecte le plus par l’âge mais pas que, par son palmarès aussi. Il ne faut pas oublier tout ce qu’il a fait. Il a un rôle pour moi de stabilisateur, de médiateur. Il est calme, posé, de bonne humeur, c’est le pilier. C’est l’athlète pour lequel j’ai le plus de respect dans le groupe. Je m’entends très bien avec lui. On a de la chance de l’avoir. J’espère qu’il va continuer encore longtemps".
Des éloges partagés par Florian Loriot, 26 ans, le plus jeune du groupe vitesse à Wengen. "Moi il m’inspire beaucoup. À 40 ans, être impliqué comme il est… Il est investi à 100% dans les entraînements. Il fait plus de manches que nous", sourit Loriot. "C’est un moteur, il donne envie de se surpasser. Nous, les plus jeunes, on le pousse dans ses retranchements. Sur les poussées de bâton je suis performant et lui aussi donc on se tire la bourre. J’espère qu’il sera là le plus longtemps possible".
"Je n’ai pas l’impression d’avoir 40 ans"
Ces petits challenges, Adrien les adore. "Eux, ils n’ont pas envie de se faire taper par moi et moi par eux. C'est bon enfant. C'est ça qui est chouette. J'essaye d'apporter ce que je peux, avec mon caractère et comme je suis. Moi en tout cas je me régale avec eux. Ils m'apportent beaucoup de fraîcheur et je n’ai pas l'impression d'avoir 40 ans. Quand je suis avec eux, j'apprends plein de nouvelles choses et c'est chouette".
Florian Loriot a un peu de mal à accepter de se faire battre sur certaines manches d’entraînement par le "doyen". "C’est un peu rageant mais j’essaye de tout mettre en place pour repasser devant lui. C’est un petit jeu qui s’installe entre nous. Je le charrie plus que lui me charrie", s’amure Loriot.
Mais il doit le reconnaître, à son âge, tout n’est plus aussi facile sur les skis. L’engagement est, de temps en temps, moins marqué. "Oui je mets le frein à main. Alors pas forcément sur les courses même si des fois je ne mets pas l'engagement que je mettais avant. Mais à l'entraînement oui, je gère beaucoup plus qu'avant. Parce qu'inconsciemment à 40 ans quand on a pris des gros pètes, derrière c'est plus compliqué. Les jours de course j'arrive à passer en mode course et ça me demande un travail mental énorme, qu'avant je ne me rendais pas compte. Mais c'est moi qui décide d'être là donc à moi de me bouger les fesses pour faire quelque chose de bien". Et il aura à cœur de le prouver ce week-end à Wengen.