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Piste, casques, airbags... La sécurité des skieurs, un vrai enjeu après l'accident de Cyprien Sarrazin

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À Bormio, la piste avait fait énormément parler, du fait de sa préparation et la grave chute de Cyprien Sarrazin notamment. Cette semaine, les descendeurs sont de retour, en Suisse, à Wengen et les Français saluent le travail des organisateurs même s'ils estiment que des solutions doivent être trouvées pour améliorer encore la sécurité des skieurs.

"Mon opinion est claire: ils ne savent pas préparer une piste. Cela fait 40 ans qu'ils préparent des pistes mais ils ne savent rien faire à part des choses dangereuses. Je trouve que ce n'est pas respectueux pour les athlètes. Quand on arrive ici, c'est déjà défoncé lors du premier entraînement", avait fortement réagit Nils Allègre à l’issue du deuxième entrainement de Bormio où son pote Cyprien Sarrazin a lourdement chuté. Une déclaration qui avait fait réagir la Fédération Internationale de ski, obligée de se défendre concernant l’état de la piste: "Les organisateurs font leur maximum pour préparer au mieux les pistes et elle a été préparée comme elle l'est chaque année." Avant de pointer du doigt le matériel, cause, selon elle, des accidents: "C'est trop agressif, nous avons atteint les limites, il n'y a plus de marge. Il est difficile de trouver les bons skis qui fonctionnent sur les secteurs durs et moins durs. Si tu vas à la limite, il arrive ce qu'il s'est passé vendredi', référence à la chute de Sarrazin.

Les mouvements de terrain pointés du doigt

Après ce malheureux épisode en Italie, l’étape de Coupe du Monde de Wengen, prévue cette semaine, était évidement attendue. Deux entrainements de descente ont eu lieu. Une seule chute: celle du Suisse Stefan Rogentin, sans trop de gravité, seulement des écorchures. "On le voit cette semaine, on a une piste qui est parfaitement préparée. Tout se passe bien, il n’y a pas de problème. Lors de la course, il y aura des gars qui vont pousser, ça arrive. Ça reste du ski", souligne Blaise Giezendanner.

Depuis Bormio, son coéquipier Maxence Muzaton s’est fait mal au dos, il a reskié seulement à Wengen lors des entrainements pour se rassurer. "Ça fait du bien aussi de revenir sur une piste compacte, où on peut s'exprimer, ancrer notre ski dans la neige et avoir de bonnes sensations. De ce côté-là, ça fait du bien au moral. Là au moins j'ai plus la sensation d'être un pilote et d'avoir le contrôle de ce que je fais." Est-ce que les critiques sur la préparation de piste de Bormio ont pu jouer sur celle de Wengen? Pas sûr selon Adrien Théaux. Mais lui aussi souligne une piste du Lauberhorn parfaite. "C’est un Wengen très bien préparé. Ils se sont donnés du mal. Elle est moins bosselée que certaines années. Là elle est uniforme de haut en bas. C’est la même neige partout. La piste est très belle. Ils ont bien réussi leur préparation et c’est le top. Quand c’est bien fait faut le dire."

Revoir le matériel pour plus de sécurité

Théaux, 40 ans, doyen de cette équipe de France, a vu évoluer depuis plus de dix ans son sport. "Il y a des accidents qu’on ne pourra pas enlever, ça fait partie de notre sport. Il faut accepter ça aussi. On fait de la descente… Sur les chutes, des fois on ne se fait rien, des fois on se fait mal. Ça fait partie du jeu. Il y a beaucoup de boulot à faire sur notre sécurité c’est sûr. J’y réfléchis. Je n’ai pas trouvé de solution." Mais il pointe du doigt l’émergence des mouvements de terrain, qui, selon lui, ajoute de l’insécurité. "Certains pensent que c’est ce qui va nous faire ralentir. Mais moi je ne pense pas. Ça crée aussi beaucoup de désordre dans notre ski et rend plus compliqué la chose. On perd peut-être un peu en vitesse mais aussi en sécurité. Parce que les skis se mettent à taper dans tous les sens et on maîtrise moins la chose. Donc ce n’est pas la bonne solution."

Au-delà de la préparation de la piste, le matériel peut-être une solution. Aujourd’hui, tout le monde est à la recherche de la performance, de plus de vitesse. Et les marques et les fabricants oublient peut-être les risques encourus. "Il y a des normes pour tout, les skis, les combinaisons, les casques. Mais je pense que les casques… Enfin je ne dis pas que l’accident de Cyprien ne serait pas arrivé avec tel ou tel modèle. C’est sûr que quand on voit la différence entre un casque de moto, en termes d’épaisseur et de poids, ça n’a rien à voir. Moi je fais de la moto et le casque protège. Il y a des choses à améliorer. On ne peut pas négliger l’impact d’une chute en descente, même en slalom", souligne Blaise Giezendanner. Qui s'interroge:

"Est-ce que skier à 150km/h avec un casque plus lourd ça serait possible? On évolue."

La FIS avait rendu les airbags obligatoires depuis cette saison, avant, de finalement, accepter certaines dérogations. Une aberration pour Xavier Fournier, le directeur du groupe vitesse de l’équipe de France de ski alpin. "Je ne trouve pas ça normal. Pour moi, à un moment donné la FIS doit prendre ses responsabilités. Ceux qui n’ont pas l’airbag ne skient pas et c’est tout." Pour éviter, prévenir les accidents, lui, a des propositions comme "faire tester les pistes comme on faisait avant". "D’anciens coureurs pourraient faire ça et donnent leur avis la semaine d’avant", poursuit-il. "Si les bosses volent trop par exemple. On ne doit pas arriver sur une piste avec une bosse qui vole trop. A nous de travailler en collaboration avec la FIS, les organisateurs pour améliorer les choses. C’est un sport, que ce soit en amateur ou professionnel, qui est accidentogène et on doit améliorer ça. L’image pour le sport n’est pas forcément bonne, de voir tous ces blessés."

Léna Marjak