Boxe: star virale mais sacré boxeur, le chemin vers les sommets du beau gosse Ryan Garcia

Il n’a jamais été champion du monde. Mais son étoile brille plus fort que beaucoup d’autres. Avec 9,6 millions d’abonnés sur Instagram, Ryan Garcia monte sur le podium du genre dans la boxe actuelle derrière Anthony Joshua et Canelo Alvarez. Sans avoir porté la moindre couronne planétaire. Le constat raconte en grande partie "King Ry" et sa montée vers le statut de superstar. A vingt-quatre ans, le Californien qui fait face au plus gros défi de sa vie dans un ring ce week-end à Las Vegas face à son rival Gervonta Davis n’est pas un boxeur comme les autres.
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Garcia doit moins sa popularité XXL à ses performances entre les cordes qu’à sa capacité à créer de la viralité sur les réseaux sociaux. Insta, TikTok ou YouTube, le garçon à la gueule d’ange – ce qui ne gâche rien pour ça – sait ce qu’il fait. Il met en lumière son exceptionnelle vitesse de bras avec des concours où il lance le plus de coups en le moins de temps possible. Il teste son célèbre crochet gauche sur les abdos (protégés par un plastron) de stars comme le gigantesque Francis Ngannou. Il se dévoile, il ouvre son monde, et il arrive avec tout ça à réunir sur son nom des yeux qui ne prêtaient aucune attention au noble art avant lui.
Mais le clinquant ne doit pas faire oublier le reste: Ryan Garcia est un sacré boxeur. A ne surtout pas prendre à la légère dans le ring. Le futur "King Ry" (on le surnomme aussi "The Flash") s’essaie au noble art à sept ans, poussé par son oncle. Garcia joue alors au baseball mais son envie de face-à-face va être rassasié avec les gants. "Je suis la personne la plus compétitive que vous pouvez trouver, expliquait-il à Daily Press en 2014. La boxe n’est pas un sport d’équipe. Vous êtes responsable de ce qui arrive dans le ring. Vous n’avez pas à vous soucier de dire à quelqu’un que vous avez perdu à cause de lui ou que quelqu’un vous le dise."
Le talent est là, indéniable, évident. A commencer par la défense. "Il voit les coups arriver, témoigne en 2014 son père Henry, impliqué dans sa carrière et son entraînement depuis les amateurs (sa mère gère également ses activités commerciales). Il a ça en lui naturellement. Il évite les coups et ça lui permet de lancer des contres." Il va vite faire fructifier ses qualités. Multiple champion national chez les amateurs, dans les rangs desquels il signe un bilan de 215-15 avec notamment six combats (trois victoires, trois défaites) contre l’actuel champion incontesté des légers Devin Haney, qui défend ses titres le 20 mai face à Vasiliy Lomachenko, Garcia rêve des JO de Rio en 2016.
Mais le gamin qui s'inspire des vidéos de Floyd Mayweather, Oscar De La Hoya, Manny Pacquiao et Meldrick Taylor n’atteint pas son objectif et passe pro en juin de cette même année, à dix-sept ans. Quelques mois plus tard, il s’engage avec Golden Boy Promotions, la société dirigée par... Oscar De La Hoya. Beau gosse, énorme potentiel dans le ring, latino: les parallèles entre Garcia et la légende sont nombreux. Il faut maintenant confirmer. Chose faite. En un an, Garcia signe neuf victoires, dont une seule sur décision. Au bout de deux ans, il est déjà à 15-0, avec un seul succès sur décision en plus et quelques titres ramassés au passage (WBC-NABF Junior, WBC-NABF et WBO-NABO chez les super-plumes).
En octobre 2018, alors que sa popularité décolle sur les réseaux sociaux depuis quelques mois, sa carrière prend encore un tournant lorsqu’il rejoint l’équipe d’Eddy Reynoso, coach d’un certain Canelo Alvarez, dans sa salle de San Diego. Son premier test arrive en novembre 2019, huit mois après avoir eu sa fille et deux mois après avoir signé un nouveau contrat de cinq ans avec Golden Boy Promotions. Placé en co-main event du choc Canelo-Kovalev pour la ceinture WBO des mi-lourds, Garcia martyrise le Philippin Romero Duno en moins d’un round pour s’emparer des ceintures WBC Silver et WBO-NABO des légers. Idem trois mois et demi plus tard, où il a besoin de moins de dix coups (avant de terminer avec son crochet gauche) pour éteindre le Nicaraguayen Francisco Fonseca lors de la première reprise et conserver son titre WBC Silver.
L’heure de sa plus grosse victoire en carrière jusque-là arrive en janvier 2021. Face au champion olympique britannique Luke Campbell, "King Ry" est envoyé au sol pour la première fois de sa carrière pro dès le deuxième round. Mais il se relève et finit par faire encore parler son crochet gauche pour un foudroyant coup au foie qui termine son adversaire lors de la septième reprise. Champion WBC intérimaire grâce à cette victoire, Garcia semble filer tout droit vers une chance mondiale. Son potentiel superstar est évident. Habituée à collaborer avec les grands noms du sport US, la célèbre boisson Gatorade ne s’y trompe pas et fait de lui le premier boxeur américain à apparaître dans ses campagnes publicitaires.
Mais le combattant va faire face à un nouvel adversaire: lui-même. Alors qu’il doit défendre son titre intérimaire contre Javier Fortuna, il annonce renoncer au combat et s’éloigner quelques temps des rings pour soigner sa santé mentale. Il revient aux affaires un an plus tard, en avril 2022, alors qu’il vient de quitter le clan Eddy Reynoso (la communication était difficile car Garcia ne parle pas espagnol) qui lui reprochera son manque de sérieux, et signe deux nouvelles victoires en trois mois, Emmanuel Tagoe et Javier Fortuna. Mais le regard de celui qui a commencé il y a quelques mois à s’entraîner en jiu-jitsu brésilien – et s’il passait en MMA un jour? – est déjà tourné vers un défi XXL: Gervonta "Tank" Davis.
Désormais coaché par Joe Goosen, Garcia veut ce combat plus que tout et ne recule devant rien pour l’obtenir. Il accepte toutes les demandes du camp adverse, prêt à choquer le monde en battant un Davis favori de la plupart des observateurs. Pour la première fois de sa carrière, le Californien affronte un invaincu. Il n’a encore jamais fait face à un tel talent chez les pros. Mais il croit en lui, en ce succès qui le propulserait dans une autre dimension sportive.
Plus grand que son rival, il pourra se souvenir de ses paroles chez les amateurs, en 2014: "J’adore avoir un avantage de taille dans le ring. C’est le meilleur avantage possible. Votre adversaire doit travailler plus dur pour vous toucher, alors que je peux juste me relaxer et travailler." Avec Gervonta Davis, Ryan Garcia fait face au combat de sa vie. "Il sera le visage de la boxe pour sa génération", ose Oscar De La Hoya, ultra confiant dans son poulain. S’il veut atteindre ces hauteurs, "King Ry" n’a pas d’autre choix: il devra faire tomber le "Tank".