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"C’est le moment de prendre Golovkin": l’appétit vient en mangeant pour Christian M’Billi

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Dix mois après sa dernière apparition dans l’Hexagone, Christian M’Billi revient combattre en France ce samedi soir, tête d’affiche de la réunion No Limit X (à suivre en direct sur RMC Sport) à Levallois-Perret. Premier boxeur de la "Team Solide" à 10-0, celui qui vit et s’entraîne au Québec réalise le plus beau début de carrière pro du collectif olympique français de Rio. Et il ne compte pas s’arrêter là: le garçon annonce vouloir les plus grands noms de la catégorie, à commencer par Canelo Alvarez ou un Gennadiy Golovkin qu’il imagine de plus en plus à sa portée.

Il est de retour en France. Dix mois après sa dernière apparition sur un ring hexagonal, une victoire par TKO sur le Biélorusse Il y a Kharlamau en décembre dernier au Zénith de Paris-La Villette, Christian M’Billi sera la tête d’affiche de la réunion No Limit X ce samedi soir à Levallois-Perret. Au programme? Le jeune Mexicain Abraham Juarez (15-3 ; 5 KO ; 22 ans) pour la ceinture WBC Francophone – face à quelqu’un qui ne parle pas français, ça ne s’invente pas – et la première des deux étapes d’une fin d’année bien chargée pour celui qui s’entraîne et réside à Montréal (Québec) et qui n’a plus boxé depuis sa victoire sur un autre Mexicain, Humberto Gutierrez Ochoa, en mars dernier à Philadelphie (Etats-Unis). "Il n’a pas boxé depuis un bout de temps et il a besoin de retrouver ses repères, cette notion de ring, pointe John Dovi, manager de l’équipe de France amateur qui continue de le conseiller. Il y a un autre combat prévu pour lui derrière le 30 novembre. C’est une sorte de package avec une préparation faite pour les deux combats. On espère quelque chose d’intéressant pour la fin d’année. Ce serait bien pour lui, il travaille, il espère et surtout il a le niveau pour."

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M’Billi, c’est le début de carrière pro au plus que parfait. Quatorze combats pour quatorze victoires, dont treize avant la limite, confirmation d’une puissance qui doit faire peur à plus d’un dans sa catégorie (les moyens). S’il n’a pas ramené de médaille des Jeux de Rio en 2016, au contraire d’autres membres de ce "Team Solide" dont il a inspiré le nom avec son surnom, le garçon de 24 ans a été le premier du collectif olympique tricolore à atteindre 10-0 chez les pros. Et sauf cataclysme, il sera le premier à 15-0 après ce samedi soir. Au passage, il a aussi remporté une ceinture, la WBC Youth (jeunesse), et devrait se parer d’une deuxième à Levallois. Toutes les cases sont cochées, quoi. "Il a énormément boxé et progressé depuis son passage chez les pros, a confirmé Tony Yoka, qui était avec lui à Rio où il avait remporté le titre des super-lourds, dans l’émission 13e Round sur RMC Sport. On sait que c’est un charbonneur, quelqu’un qui travaille, et j’espère qu’il ira au bout de son ambition."

Christian M'Billi
Christian M'Billi © Icon Sport

"Christian a passé un cap assez rapidement depuis ses débuts professionnels, note Brahim Asloum, consultant boxe RMC Sport et promoteur de ses combats en France via Asloum Event. Sincèrement, c’est celui à qui on a mis les adversaires les plus difficiles, souvent des invaincus. Dès le départ de sa carrière, il a été impressionnant. Et il l’est encore aujourd’hui." Avec une conséquence: les difficultés à trouver quelqu’un à lui mettre en face à ce stade de sa carrière. L’équation est insoluble ou presque. Pour le site spécialisé BoxRec, qui fait foi en la matière, Christian M’Billi se classe cinquante-et-unième des moyens à travers la planète. Pour un membre du top 30, le défier est un pari perdant-perdant. Si vous le battez, ceux qui ne connaissent pas le pugiliste français trouveront ça normal et cela ne boostera pas votre classement. Mais vu ses qualités, connues dans le milieu, le risque évident de perdre et de dégringoler dans la hiérarchie peut vous faire appuyer sur le frein. 

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"Aujourd'hui, il fait peur"

"Je ne vous cache pas que c’est de plus en plus difficile de trouver des adversaires, appuie Brahim Asloum. Très peu de boxeurs européens veulent le rencontrer donc on va énormément voir à travers le monde. Car aujourd’hui, il fait peur." Et le promoteur de pousser l’explication: "Son niveau réel est de boxer des garçons qui sont déjà dans le top 15 mondial. Mais bien évidemment, eux ne veulent pas descendre dans les classements. Il faut donc trouver de vraies opportunités. Parfois, il faut sans doute donner une bourse supplémentaire pour pouvoir les faire venir. C’est une progression normale. C’est un vrai problème mais un problème de riches: on a la chance d’avoir un boxeur talentueux, français, dans une catégorie très relevée à travers le monde."

L’intéressé a conscience du problème comme il l’a raconté au micro du podcast Fighter Club de RMC: "C’est un peu vexant de savoir qu’il est difficile de trouver un adversaire, d’autant plus qu’on n’est pas encore à un niveau de championnat du monde. Ça nous pousse à aller voir au niveau au-dessus pour pouvoir progresser mais il ne faut pas non plus que je brûle les étapes. Il faut que je trouve des adversaires à mon niveau, qui me fassent évoluer à mon niveau, et aller chercher de plus gros adversaires petit à petit. Mais on a un peu plus de mal en ce moment, c’est vrai." Lui rêve déjà plus grand, le regard tourné vers les grands noms des moyens. "J’ai envie des meilleurs mondiaux: Canelo Alvarez, Daniel Jacobs, Gennadiy Golovkin..." Le premier est champion WBA Super et The Ring (mais navigue aussi dans les eaux des super-moyens et des mi-lourds), le troisième détient la ceinture IBF, le deuxième est l’ancien champion WBA "régulier" et a affronté les deux autres pour deux défaites sur décision. Du lourd. 

"Golovkin, il faut qu'on aille le chercher"

Voix de sage, John Dovi nuance: "Il faut franchir les paliers sûrement mais progressivement". Autre homme de grande expérience, l’ancien champion olympique et du monde Brahim Asloum approuve: "Comme le dit Christian, on a envie d’avancer. Mais il ne faut pas avancer trop vite non plus car très vite, ce sera des cadors de la catégorie. Je ne dis pas que Christian ne peut pas les boxer. Mais est-ce qu’on est prêt à les boxer tout de suite?" Il suffit de lui demander. Alors, ce Golovkin de 37 ans qui a eu du mal à se défaire de l’Ukrainien Sergiy Derevyanchenko le week-end dernier au Madison Square Garden de New York pour la ceinture IBF (décision unanime), il donne envie? "C’est ce que je disais à mon coach il y a deux jours: c’est le moment de le prendre, confie Christian M’Billi. On a un an ou deux pour aller chercher Golovkin. Il est sur sa fin de carrière et il montre des signes de faiblesse depuis déjà deux combats. Il faut qu’on aille le chercher, c’est le bon moment."

La puissance de Christian M'Billi (à droite) en action en décembre 2017
La puissance de Christian M'Billi (à droite) en action en décembre 2017 © Icon Sport

"Golovkin commence à nous montrer quelques lacunes dues à l’âge, confirme Brahim Asloum. Il n’a plus vingt ans, il a fait deux combats très, très durs devant Canelo, des combats qu’il faut digérer. Et pas sûr qu’il les ait digérés, il faut être honnête... Ses qualités et sa puissance, on n’en doute pas. Mais en face de lui, il a des jeunes qui ont faim, qui ont un gros cardio, qui vont lui poser problème. Et à partir du moment où tu résistes devant GGG, tu peux lui rendre la pareille. Christian a les capacités demain, et quand je dis demain on est sur une année ou deux, d’aller se frotter à ce genre de garçons et leur poser de vrais problèmes." A le voir défier la légende kazakhe, on pourrait croire le garçon trop impétueux. Tout faux. Juste conscient de ce qu’il est capable de faire. "On a la chance dans cette génération d’avoir des boxeurs qui sont travailleurs, qui ont faim, envie de percer, et qui n’ont peur de rien, se satisfait Brahim Asloum. On les critique beaucoup, car quand un boxeur avance comme ça on lui dit de se calmer, mais au contraire, il faut leur donner cette possibilité de le dire. C’est en croyant à ce que tu vas faire que les opportunités vont arriver et que tu vas atteindre ton but."

"Calme-toi, c’est autre chose, Canelo n’est pas un rigolo"

Tony Yoka, pas du genre à se cacher non plus, s’en amuserait presque: "On sait que Christian veut un certain boxeur et d’ailleurs je le chambre souvent avec ça en lui disant: 'Calme-toi, c’est autre chose, Canelo n’est pas un rigolo'. Mais c’est quelqu’un de déterminé et je préfère voir quelqu’un avec de l’ambition comme ça plutôt que l’inverse." Pour atteindre son but, Christian M’Billi pourra compter sur un entourage idéal. Sur la quiétude de sa vie québécoise, où il peut progresser à vitesse grand V en côtoyant dans sa salle des gens comme le Canadien David Lemieux (ancien champion IBF des moyens qui a combattu GGG mais aussi le Britannique Billy Joe Saunders lorsqu’il était champion WBO de la catégorie), le Russe Artur Beterviev (champion IBF des mi-lourds) et les Colombiens Oscar Rivas (battu en juillet par le Britannique Dillian Whyte pour le titre WBC intérimaire) et Eleider Alvarez (ancien champion WBO des mi-lourds).

Autant de noms qui le préparent aux grands, à l’image d’un Lemieux qui peut le conseiller dans sa quête après avoir tutoyé les sommets de la catégorie. "C’est ce qui se passe actuellement", sourit celui chez qui on commence parfois à déceler une pointe d’accent québécois. "Quand vous avez la chance d’avoir ce genre de garçons avec vous l’entraînement, ça aide beaucoup, confirme Brahim Asloum. Vous les regardez du coin de l’œil pour voir comment ils s’entraînent, vous pouvez vous jauger contre eux quand ils sont dans la même catégorie... Techniquement, je sais que Christian est au-dessus d’un Lemieux, qui résiste à ce niveau-là grâce à sa puissance. Et quand vous avez la chance de mettre les gants avec lui comme Christian, vous prenez de la confiance et de l’expérience. Ça promet pour la suite." Elle passera d’abord par Levallois et Abraham Juarez. "Les Mexicains aiment la guerre sur le ring? On va leur en donner, lance le boxeur français. J’espère pouvoir encore faire un séjour au Mexique sans avoir une affiche de recherché par la police. (Rire.) Ce sont des boxeurs qui en veulent et qui n’ont pas peur, comparés aux boxeurs européens qui demandent trop au niveau de la bourse ou qui disent non tout court." On en connaît un qui ne dira pas non quand les grands noms s’ouvriront à lui. 

Alexandre HERBINET (@LexaB)