Peyron : « La Route du Rhum est un challenge délirant »

Loïck Peyron - AFP
Loïck Peyron, racontez-nous pourquoi vous serez à bord de Banque Populaire pour le départ de la Route du Ruhm et non sur Happy, la réplique du fameux Olympus de Mike Birch, vainqueur de la Route du Rhum en 1978 ?
J’avais envie de refaire la Route du Rhum à l’ancienne, avec un petit bateau. Je voulais revivre le vertige de l’incertitude. Malheureusement ou heureusement, il y a quelques semaines, j’ai reçu un coup de file de Banque Populaire, que je connais très bien puisqu’on a gagné ensemble le trophée Jules Verne (en 2012). Armel (Le Cléac’h) s’est blessé à la main laissant ce bateau immense, Banque Populaire VII, sans chauffeur. Donc on a appelé « pépère » en disant : « Qu’est-ce que tu fais dans deux semaines ? » J’ai répondu la Route du Rhum, mais on m’a demandé si je ne voulais pas changer de bateau. Je n’ai pas accepté tout de suite car le challenge est délirant. Le bateau n’a pas du tout été prévu pour un solitaire. Mais c’est un challenge génial et puis En Avant Guingamp ! Depuis, je m’entraîne. J’ai ressorti mon vélo de la naphtaline.
L’entraînement est essentiellement physique ?
Oui, c’est énorme. Ce sont des manœuvres très longues et très lourdes. C’est un bateau qui est mené normalement par dix personnes ! Moi, je ne ressemble même pas à une personne, je ne suis pas épais. Et puis ça va vachement vite. La dernière fois que j’ai fait une transat en solitaire en multicoques, c’était la Route du Rhum en 2002. J’avais perdu mon bateau dans la mer, Fujifilm, écrasé dans les vagues. J’avais oublié ce niveau de stress. Ou du moins, je voulais l’oublier. Je n’ai jamais rêvé de faire la Route du Rhum sur un bateau capable de gagner.
Malgré toutes ces conditions, vous partez quand même…
Oui, car c’est passionnant de relever de tels challenges. Je suis extrêmement honoré qu’on me le propose. Et puis je suis surtout capable de le faire. Peut-être qu’on n’est pas beaucoup. C’est un vrai challenge. Quant au stress, étonnamment, plus le bateau est grand, voire difficile à manœuvrer, plus il est sécurisant.
Ne craignez-vous pas la casse, vous qui n’avez jamais été verni sur la Route du Rhum ?
Bien sûr. C’est la crainte permanente. Je vais égaler le record de participations de Mike Birch, mon maître à penser et mon « maître Jedi ». Il en avait fait sept. Ce sera donc ma 7e Route du Rhum. Malheureusement, je n’ai fini que trois des six éditions auxquelles j’ai participé. A chaque fois sur casse mécanique.
Et du coup, que deviens Happy ?
Il va être vendu à un propriétaire charmant qui me le revendra dans quatre ans, car j’ai vraiment envie de faire la Route du Rhum avec ce bateau.