"L'envie de tourner la page": longtemps disparu, le créateur du Vendée Globe réapparaît pour être honoré

Vendée Globe - Philippe Jeantot, le 2 novembre 2024 - -
Il avait disparu en 2008, sans laisser de trace. Le voici désormais de retour aux Sables d’Olonne, où un quai porte son nom, à Port-Olona. Sans lui, le Vendée Globe n’existerait pas. Pour cette raison, la ville des Sables d’Olonne a décidé de rendre hommage au créateur de cette incroyable course à la voile autour du monde, sans escale et sans assistance.
"C'est une émotion forcément. Ça me fait très plaisir. Je suis ému. Je remercie monsieur le maire d'avoir pris cette initiative", a déclaré Philippe Jeantot au micro de RMC Sport, touché de retrouver des visages qui lui ont semblé familiers à l'occasion de cet émouvant retour aux sources.
L’ancien skipper s’était fait très discret ces dernières années. Philippe Jeantot avait échappé à la vigilance des radars après sa deuxième condamnation pour fraude fiscale (ses ennuis judiciaires avaient débuté en 2003, avec sa mise en examen après le placement en liquidation judiciaire de l’entreprise organisatrice). Ces histoires, il ne veut plus en entendre parler.
C’est oublié, et puis… J’ai la mémoire courte
Ouest-France avait fini par retrouver sa trace en octobre 2016, en Thaïlande, où il a entamé une nouvelle vie depuis cinq ans.
"Il y avait l'envie de tourner la page, et puis de dire maintenant de toute façon je démarre une nouvelle vie", nous a-t-il confié. "Je cherchais un pays dans lequel je pouvais aller avec mon bateau et puis vivre dans des conditions faciles et favorables. Quand on veut vivre sur un bateau à l'année, il n'y a pas beaucoup d'endroits dans le monde où on peut aller. Je voulais éviter les endroits avec des cyclones, avec des tornades. Donc là je suis en Thaïlande et c'est vraiment une nouvelle vie. Je suis quelqu'un de très simple, je n'ai pas une vie compliquée, je ne suis pas un flambeur: la mer, la plongée, le bateau, les copains, je suis parfaitement heureux."

Philippe Jeantot: "C'est très, très violent"
Plus de vingt ans après son départ, Philippe Jeantot a constaté beaucoup de changements, forcément, en déambulant dans la ville des Sables-d’Olonne: "Il y a plein d'endroits que je n'ai pas reconnus. Le port, quand je vois tous ces bateaux, c'est sûr que c'est impressionnant, je suis très, très surpris." La course elle-même n’a plus grand-chose à voir avec ce qu’elle était au début des années 1990 lorsqu’elle fut créée, après avoir été imaginée dans un bar de Sydney, en 1986.
"D'après ce que j'ai entendu, c'est violent. C'est très, très violent. Avec des sièges où les skippers sont sanglés avec des casques… À mon époque, on était loin de ça. Nous, on passait plus de temps dehors qu'à l'intérieur. C'est vrai que la première fois on partait dans l'inconnu quand même. Les treize concurrents qui sont partis étaient des marins quand même très expérimentés. Des gens qui avaient déjà fait des tours du monde en solitaire ou en équipage. Sur des bateaux, à l'époque, révolutionnaires, mais aujourd'hui qui paraissent comme des reliques. Parce que l'évolution qu'il y a eu en 20 ou 30 ans, c'est extraordinaire. On est passé de vitesse journalière de 250 à 500 milles."
Les marins qui ont fait la légende du Vendée Globe ces dernières et qui prendront le départ de la 10e édition dans une semaine, Philippe Jeantot le reconnaît sans mal, il ne les connaît pas. "Je connais Jean Le Cam, et sinon, je n'en connais pas d'autres. Mais je suis content pour eux, parce que ce sont des gens qui vont vivre une expérience extraordinaire. Je leur souhaite de franchir la ligne d’arrivée."
"Certains qui ont assisté au départ du premier Vendée Globe me l'ont dit après. On part, tous les bateaux accompagnateurs sont là. Ils nous suivent sur 5 ou 10 milles au large. Et à un moment donné, ils font demi-tour. Et ce jour-là, il y avait un vent d'Est glacial. On m'a dit après qu’il y a eu un silence de mort pendant plusieurs minutes. Les gens se disaient tous, combien vont revenir? Parce que pour eux, on partait au suicide. Ça n'avait jamais été fait. Il y a treize concurrents au départ. Est-ce qu'il y en a au moins un qui va revenir?"