Un 100m bientôt en moins de 9"50? Pourquoi les records ne tombent pas aux Mondiaux d'athlétisme malgré les "super pointes" en carbone

L'homme le plus rapide de tous les temps est formel: avec les "super spikes", il aurait pu courir 100m en 9"42. Depuis 16 ans, les 9"58 d'Usain Bolt réalisés aux Mondiaux d'athlétisme de Berlin semblent inatteignables. Pourtant, les nouvelles technologies de chaussures ont révolutionné la course à pied depuis la fin des années 2010.
Que ce soit sur route ou sur piste, les équipementiers travaillent sans relâche pour proposer des produits toujours plus performants pour les athlètes élites, mais surtout pour les coureurs amateurs (principale source de revenus des marques). En 2025, il paraît impossible de se présenter sur une course professionnelle sans chaussures équipées d'une plaque en fibre de carbone et d'une mousse ultra-légère.
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Censées mieux renvoyer l'énergie, ces chaussures (régulées par World Athletics après plusieurs polémiques) sont en partie associées à des records sur longues distances (marathon, semi-marathon, etc.). Des chronos historiques et un gain marginal - que les cyclistes adorent - beaucoup moins perceptibles pour l'instant sur le sprint.
"La biomécanique a changé au niveau de toutes les courses. Sur les courses à économie, on se rend compte qu'ils ont un gain de fou, ils apprennent à utiliser cette chaussure qui leur fait récupérer de l'énergie et aller vers l'avant", a remarqué Ladji Doucouré dans le podcast 'RMC Running'. "Sur les épreuves techniques et courtes, on le voit un peu moins."
Mais l'ancien champion du monde du 110m haies et désormais entraîneur de Sasha Zhoya estime que les performances augmentent bien au niveau global. "Il y a une explosion au niveau de la densité, il y a beaucoup plus de femmes qui font moins de 11" ou qui se rapprochent des 10"90. Il y a quand même un impact positif (...) À mon époque, il y avait un fossé entre les têtes de série (4-5 athlètes) et les autres."
Un problème générationnel?
D'après une étude menée par des chercheurs de l'Université St. Edward's et de l'Université du Michigan et publiée en mai 2024, les coureurs portant des "super spikes" ("super pointes" en anglais) voient leur économie de course augmenter de 2% par rapport aux pointes traditionnelle, ce qui pourrait se traduire par une amélioration de 1 à 1,5% des temps.
Puma va même plus loin puisque c'est sur la base d'une étude menée en interne qu'Usain Bolt a affirmé qu'il aurait pu battre son record du monde de 16 centièmes. La star jamaïcaine a d'ailleurs pris l'exemple de sa compatriote Shelly-Anne Fraser-Pryce. "Elle a continué après ma retraite était et j'ai vu ce qu'elle a fait: Elle est devenue plus rapide avec les pointes. J'aurais probablement couru beaucoup plus vite si j'avais continué et si j'avais su que les pointes auraient atteint ce niveau."
Un constat partagé par Ladji Doucouré. "Usain Bolt, c'était un fou, un taré. Je suis certain qu'avec ces nouvelles pointes, il aurait fait encore mieux", a-t-il lancé. Si la qualité de la piste ou encore les conditions météorologiques jouent aussi, le problème serait donc générationnel. "Il faudrait qu'il y ait une rareté comme Bolt pour voir ce que ça donne avec des qualités et des pointes", a-t-il ajouté.
Selon le Jamaïcain, cette star n'est pas encore arrivée, même si Kishane Thompson a couru en 9"75 en juin dernier, meilleure performance réalisée en dix ans. "Je pense que le talent est là et que ceux qui arrivent réussiront, mais pour l'instant, je ne pense pas qu'ils soient capables de battre le record du monde", s'est-il avancé.