Basket: Fauthoux à la tête de l’équipe de France, ça va changer quoi pour Wembanyama et les Bleus?

Une page de l’histoire des Bleus s’est tournée sur le parquet de Bercy le 11 août dernier. Dans la chaleur de l’été olympique, ponctué par une défaite contre l’ogre américain en finale (98-87), Vincent Collet a coaché son ultime match à la tête de l’équipe de France de basket. Après 15 années sur le banc, le temps était venu de passer le flambeau.
Pour continuer de faire briller la flamme, et avec les JO 2028 de Los Angeles en ligne de mire, la Fédération française de basket (FFBB) a décidé de faire confiance à Frédéric Fauthoux, candidat déclaré à la succession de Collet. Joueur emblématique de Pau-Orthez (1990-2007), passé sur les bancs des Metropolitans 92 (anciennement Levallois Metropolitans et Paris-Levallois) de l’ASVEL (adjoint) puis de Bourg-en-Bresse, qu’il va d’ailleurs continuer à coacher en parallèle des Bleus, le Landais a la lourde tâche de succéder au sélectionneur le plus médaillé de l’histoire de l’équipe de France de basket.
Sous les ordres de Vincent Collet, l’équipe de France est montée sur huit podiums, dont un titre à l’Euro 2013, grâce à une identité défensive très forte. Pour les JO de Paris 2024, l’ancien staff des Bleus avait érigé la défense comme priorité, répétant à l’envi qu’une belle performance passerait forcément par la capacité à asphyxier l’adversaire et à encaisser très peu de points.
Cette philosophie a d’ailleurs porté ses fruits en phase finale, avec des Canadiens et des Allemands limités à 73 et 69 points en demie puis en quart. Mais l’ADN défensif porté par Vincent Collet a tout de même irrité certains de ses éléments. "Par moments, je pense qu'on se trompe dans la façon dont on veut jouer. Et on paie les pots cassés sur ça", avait pesté Evan Fournier à la suite de la gifle reçue contre l’Allemagne en poule (85-71). "De nos jours, la meilleure défense reste l'attaque. Ce n'est plus jeu des années 1990 ou des années 2000 où tu pouvais défense demi-terrain."
"Basket total"
Lors de sa présentation officielle à la presse, "Freddy" Fauthoux n’a pas voulu renier cette identité défensive. "Nos joueurs ont les qualités physiques et athlétiques pour s'imposer contre toutes les nations, c'est quelque chose qu'on va garder et amplifier", a-t-il assuré. Tout en insistant sur sa volonté d’ajouter sa patte sur le jeu des Bleus. "Si on veut aller loin dans les compétitions, il faut défendre dur et marquer beaucoup de points. Je rêve d'un basket total où on défend dur, mais où on peut aussi marquer beaucoup de points. Les équipes qui gagnent les compétitions internationales récentes évoluent souvent à 85-90 points par match, tout en étant dans les deux-trois meilleures défenses. Je ne sais pas si on y arrivera, mais en France, on a des joueurs d'exception, aujourd'hui et pour l'avenir."
Les principes offensifs énoncés par Fauthoux se vérifient d’ailleurs sur les parquets de Betclic Elite. Dans son sillage, Bourg-en-Bresse, que le technicien a emmené jusqu’en finale d’Eurocoupe (C2) la saison passée, était la troisième attaque du championnat de France en 2023-2024, avec 84,6 points marqués par match. De quoi imaginer une petite révolution chez les Bleus, qui n’étaient que la 10e attaque - sur 12 équipes - du tournoi olympique (80,8 points marqués). Seuls Porto Rico et la Grèce faisaient moins bien dans ce domaine.
"Plus de liberté individuelle aux joueurs"
"Il va autoriser plus de tirs en première intention, plus de jeu sur contre attaque et surtout plus de liberté individuelle aux joueurs sur des un contre un ou des prises d’initiatives personnelles", a décrypté Stephen Brun dans le Super Moscato Show, ce jeudi sur RMC. "On sait que Vincent Collet a toujours été un peu réticent sur les prises d'initiatives personnelles. Il voulait que le ballon circule entre les mains des joueurs pour faire bouger la défense et aller très loin dans la possession. Je pense que Freddy Fauthoux va vouloir jouer un peu plus de possessions. Et forcément, quand tu joues plus de possession, les scores offensifs vont monter."
"Si jamais ça ne fonctionne pas, il reviendra à la base” a poursuivi notre consultant basket. "C'est-à-dire prendre le moins de points possibles et peut-être qu’on jouera plus lentement. Cette déclaration ne veut pas dire que la France va marquer 100 points par match. Mais je pense qu’il a envie de donner plus de liberté aux joueurs."
Un tempérament de feu
Pour mener à bien leur projet de jeu, Fauthoux et son staff vont pouvoir s’appuyer sur un effectif toujours aussi solide. Après les retraites internationales de Nicolas Batum et Nando De Colo, Evan Fournier, Rudy Gobert et Victor Wembanyama sont attendus comme les leaders d’un groupe revanchard après trois défaites en finale sur les quatre derniers tournois (JO 2021, Euro 2022 et JO 2024). Tandis que Guerschon Yabusele (28 ans), Mathias Lessort (28 ans) et Isaïa Cordinier (27 ans), tous les trois précieux sur la phase finale du tournoi olympique, sont dans la force de l’âge, de nombreux jeunes représentent l’avenir. C’est le cas de Bilal Coulibaly (20 ans), Matthew Strazel (22 ans) et des trois grands espoirs tricolores sélectionnés dans le top 6 de la dernière draft NBA, Zaccharie Risacher, Alexandre Sarr et Tidjane Salaün. Point positif pour Fauthoux: il connaît très bien Victor Wembanyama et Zaccharie Risacher, les deux derniers N°1 de la draft, pour les avoir déjà coachés, respectivement à l’ASVEL (en tant qu’adjoint) et à Bourg-en-Bresse.
La prise de pouvoir de Fauthoux est également synonyme d’un changement assez radical de personnalité à la tête de l’équipe de France. Même s’il a été capable de discours mémorables, comme ce fameux speech avant le quart de finale du tournoi olympique, Collet est plutôt connu pour son flegme et sa mesure. Fauthoux, originaire des Landes, se distingue par un caractère très affirmé. "J'ai été basketteur pro, contrairement à ce que pourrait laisser croire mon gabarit. Du caractère, il en a fallu pour s'imposer dans cette forêt de géants. J'ai envie de gagner et si les joueurs ne font pas ce qu'il faut, je le leur dis fortement, mais pour l'intérêt général", a détaillé le nouveau des Bleus. "Mon tempérament peut ressortir. Mais je sais que l'équipe nationale vient avec des responsabilités. Alors vous ne me verrez jamais déborder. À part une ou deux fois peut-être", a-t-il conclu dans un éclat de rire. Un tempérament que le grand public va apprendre à découvrir en même temps que sa philosophie de jeu.