NBA: pourquoi la cote de Rudy Gobert n’est-elle pas plus élevée aux Etats-Unis?

Après le scénario rocambolesque des demi-finales de la conférence ouest contre les Los Angeles Clippers (4-2 après avoir mené 2-0) l'an dernier, le Jazz de Utah peut-il aller chercher le premier titre NBA de son histoire après deux finales perdues en 1997 et 1998? Opposé à Dallas lors du premier tour des playoffs, Utah pourra compter sur Rudy Gobert, l’un de ses hommes forts dans la raquette (15 pts, meilleur rebondeur de la saison régulière avec 14,7 rebonds en moyenne). Si le Français et son gabarit atypique (2,16m) s’affirment comme l’une des pièces maîtresse de son équipe, sa cote n’est pas aussi élevée que ça outre-Atlantique.
- Il n’est pas Américain
Cela peut paraître bête, mais l’une des raisons pour lesquelles Rudy Gobert n’est pas vraiment apprécié par la NBA est sa nationalité. En tant que non-Américains, le pivot fait partie d’une longue liste de joueurs qui peuvent se plaindre d’un traitement plus dur de la part des suiveurs de la NBA. Avant lui, Tony Parker ou la légende des Dallas Mavericks, Dirk Nowitzki, ont dû gagner un titre pour être reconnus à leur juste valeur.
“Il n’aura pas la même aura que Tony Parker. Rudy est un joueur intérieur, alors que TP était un meneur. L’exposition n’est pas la même, surtout qu’il évolue à Utah, une franchise assez discrète. Ce n’est pas New-York ou Los Angeles. Évidemment, s’il arrive à remporter une bague, la situation peut changer car la médiatisation ne sera plus la même”, explique Thierry Chevrier, le directeur du Cholet Basket, le premier club du pivot du Jazz.
- Le patient 0 de la NBA
Les fans de basket n’oublieront jamais l’épisode du “patient zéro” lors du début de la crise sanitaire en 2020. Lors d’une conférence de presse, l’international français avait fait une blague en touchant tous les micros et les enregistreurs après une question sur l’épidémie. Résultat: le joueur du Jazz est testé positif 48 heures plus tard et devient le premier cas positif en NBA. Cette séquence n’a évidemment pas arrangé l’image du pivot.
“Rudy est très fort mentalement et il est intelligent. On ne lui a rien donné, il a les ‘cojones’. Depuis que je le connais, il est resté lui-même avec sa répartie”, souligne Sylvain Delorme, son entraîneur chez les espoirs à Cholet. Un sentiment partagé par David Soulard, qui connaît le bonhomme depuis 10 ans. “Rudy a progressé dans sa communication. Son image est différente de celle du joueur de 17 ans, qui avait une approche froide. Aujourd’hui, il a gardé une bonne répartie sur et en dehors des parquets. C’est un garçon intelligent et cultivé.”
- “Le pleurnicheur” en attente d'une sélection au All-Star Game
Aux Etats-Unis, le Français est perçu comme lâche, peureux mais arrogant. Un bien vilain tableau, pas nécessairement exact, que Gobert paye donc déjà de facto, sans pouvoir rien y faire. Mais de fait, chacune de ses critiques envers l’arbitrage ou de ses plaintes quant à l’absence de reconnaissance nourrissent ce ressenti des Américains envers lui. Personne n’a oublié, par exemple, les critiques de Draymond Green après les larmes du Français à la suite de sa non-sélection au All-Star Game 2019. Rudy Gobert avait craqué devant les journalistes: ”C’était une soirée difficile. Ma mère m’a appelé en pleurant. C’était difficile, mais c’est comme ça.”
Une réaction qui avait provoqué le fou rire de Draymond Green, le joueur de Golden State, également absent du match des étoiles la même année. “J’imagine que je dois pleurer aussi…pas de Charlotte?”, tweetait le pivot des Warriors. Depuis, les deux protagonistes s’envoient sans cesse des piques, dont la dernière remonte au dernier All-Star Game, à Cleveland, où Green a été vexé d’être comparé au Français. Quatre fois All-Star, l’Américain compte une sélection de plus que Gobert, choisi trois fois de suite depuis 2020, souvent en dernier choix. “Avec ses trois titres de défenseur de l’année, Rudy montre que c’est un joueur rare avec un bon niveau. Il a une réelle influence sur le jeu de son équipe”, poursuit Sylvain Delorme. La preuve en est dans les chiffres, puisque Utah reste une demi-finale de conférence face aux Clippers de Los Angeles après avoir réussi le meilleur bilan de la ligue (52 victoires - 20 défaites).
- Il doit faire ses preuves face aux stars
Pour décrocher la reconnaissance tant attendue, le joueur de 29 ans doit nécessairement gagner le respect de ses pairs. Et tout commence par des résultats dans le money-time, notamment lors des play-offs. Sur les cinq dernières saisons (Gobert est à Utah depuis 2013, ndlr), le Jazz reste sur cinq qualifications pour le premier tour des play-offs. Mais Salt Lake City n’a jamais dépassé le stade des demi-finales sur la période. La dernière finale de conférence remonte à la saison 2007-2008 (face aux Spurs). Il faut regarder en 1998 pour trouver trace d’une finale NBA perdue contre les Bulls de Chicago.
Pour David Soulard, “Rudy Gobert doit être le premier à gravir les montagnes et ses objectifs.” Il faut pour cela s’offrir des matchs références contre Joël Embiid ou Nikola Jokic, deux autres monstres dans les raquettes de NBA. Et tout commence samedi (19 heures en France), avec le match 1 du premier tour sur le parquet de Dallas, où règne en maître Luka Doncic, un autre Européen qui régale les parquets américains.
Le programme des play-offs NBA
A partir de samedi 16 avril:
Dallas-Utah
Minnesota-Memphis
Philadelphie-Toronto
Golden State-Denver
A partir de dimanche 17 avril:
Boston-Brooklyn
Miami-8e à l'est
Milwaukee-Chicago
Phoenix-8e ouest