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Des risques de "traumatismes crâniens plus graves": pourquoi les commotions cérébrales dans le cyclisme ne doivent pas être prises à la légère

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Dans une interview au Parisien, le cycliste français Marc Sarreau a annoncé prendre sa retraite en raison de commotions cérébrales à répétition. Avant de prendre cette décision, il avait notamment rencontré le neurologue Jean-François Chermann. Le spécialiste des commotions cérébrales chez les sportifs a expliqué à RMC Sport ce que représente ce danger qui, au même titre que les rugbymen ou les footballeurs, touche aussi les cyclistes.

Dans son interview, Marc Sarreau raconte ses symptômes et parle de maux de tête, de manque d'attention, de fatigue, de hausse de tension. Ce sont les symptômes types des commotions cérébrales ?

Oui, dans tous les sports où il y a des commotions cérébrales, il y a une période où même quand on ne fait rien, on peut avoir mal à la tête, on est fatigué, on peut avoir des nausées, des sensations vertigineuses. Au total, il y a 22 symptômes dans les commotions que l’on a recensées, par exemple dans le SCAT que l’on fait dans le rugby, dont les maux de tête, la fatigue, les troubles visuels, la photophonophobie (gêne de la lumière), le bruit, l’irritabilité. Il y a plein de trucs très embêtants.

La commotion se traduit de la même manière dans tous les sports. Mais la différence dans le cyclisme ou dans le hippisme, par rapport au rugby ou au football, c’est le risque de survenue de traumatismes crâniens plus graves qu’une commotion, du fait de la haute cinétique et de la violence des chocs. Je rappelle que la commotion appartient au cadre des traumatismes crâniens légers, alors que si le TC s'accompagne d’un hématome cérébral, on parle d’un TC modéré, voire grave si coma. 

Le coureur explique avoir observé une période de 15 jours sans compétition, mais dès la reprise, il a senti des symptômes. Ça suffit de s’arrêter deux semaines ?

Vous le savez très bien comme moi, en rugby, on a mis en place un protocole HIA (head injury assessment). On pense qu'il faut avoir un minimum de 48h de repos puis un protocole de reprise d'activité physique par palier: d’abord vélo puis jogging le lendemain si tout va bien, et augmentation progressive de l’activité physique en fonction de la réapparition ou non des symptômes. 

"Les coureurs ont envie de rester parce que sinon ils sont éliminés"

Et dans le vélo, vous pensez que le suivi n’est pas assez développé ?

Là-dessus, je ne pourrais rien dire. Moi, je ne m'occupe pas du vélo. Il y a des gens qui viennent me voir dans certains cas, mais je n'ai pas mis en place des protocoles comme j'ai pu les mettre pour le rugby par exemple.

Le vélo est un sport individuel. Pendant la course, pour quelqu'un qui tombe, le réflexe, c'est de remonter sur le vélo et de continuer…

En fait, en cyclisme, le coureur ne peut pas être arrêté transitoirement comme en rugby avec un remplacement, par exemple, parce que c'est un sport individuel. C'est ça, la problématique.

Les coureurs n'ont évidemment pas envie de sortir, ils ont envie de rester parce que sinon, ils sont éliminés. Et ça, c'est un vrai problème. Il faudrait arriver à trouver un système dans lequel, si on a une suspicion de commotion, ils puissent être arrêtés dix minutes, une heure, pour être évalués, et ne pas être pénalisés.

Propos recueillis par Pierre Thevenet