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"Il repère chaque kilomètre de l’étape et il note tout dans son carnet" Après Paris-Nice, Matteo Jorgenson peut viser plus haut

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L’Américain de 25 ans a remporté ce dimanche Paris-Nice pour la deuxième année d’affilée. Parti il y a une semaine comme en vainqueur en titre mais avec son coéquipier Jonas Vingegaard comme leader naturel, Matteo Jorgenson s’est affirmé en fin d’épreuve et se fixe de nouveaux objectifs, pour l’année prochaine.  

Cette semaine aurait pu être tout autre. Retour en novembre dernier, quand dans une réunion de la Visma-Lease a Bike, le directeur de la compétition Grischa Niermann annonce à Matteo Jorgenson que l’équipe souhaite le programmer sur Tirreno-Adriatico, qui se déroule en même temps que Paris-Nice, parce que Jonas Vingegaard veut inscrire la Course au Soleil à son calendrier 2025. "Après avoir réfléchi pendant ma coupure de trois semaines, j’ai rappelé Grischa et je lui ai dit que franchement, Tirreno-Adriatico ne me donnait pas les mêmes sensations, pas la même motivation de travailler tout l’hiver que Paris-Nice. Alors j’ai demandé si c’était possible de venir plutôt sur Paris-Nice avec Jonas et ils ont tous les deux dit oui", racontait dimanche après sa victoire finale l’Américain qui habite à Nice. La formation néerlandaise a bien fait de se raviser.

Des bonifications pour prendre le pouvoir

Avant le départ la semaine dernière, Matteo Jorgenson disait à la fois avoir l’ambition de gagner "la plus grande course d’une semaine du calendrier", et reconnaissant en même temps: "Jonas est beaucoup plus fort que moi, la question ne se pose même pas." Mais dès la première étape, il est allé chercher quatre secondes de bonifications pour le classement général au sprint intermédiaire dans une petite côte des Yvelines. Rebelote le lendemain, où il a pris deux secondes de bonifications supplémentaires. Des efforts effectués dans un seul but, être le coureur le mieux classé de son équipe, pour endosser le maillot jaune mardi soir après le contre-la-montre par équipe remportés par les frelons. Jonas Vingegaard a pris la tunique mercredi, avant de chuter le lendemain, handicapant le Danois dans le final de l’étape des murs. Jorgenson se classe lui troisième derrière Lenny Martinez et Clément Champoussin, pour reprendre le lead au classement général et ne plus le lâcher. "J’étais coleader depuis le début de l’épreuve, chaque étape a été comme une course d’un jour, mais j’ai bien géré toute la semaine. Je me suis senti plus calme que l’an dernier, où j’étais plus nerveux le matin, et les émotions étaient plus intenses avec les interviews et les podiums après les étapes. Cette année j’ai plus profité", savoure Matteo Jorgenson, qui n'a pas récupéré le maillot jaune lors de la dernière étape, comme en 2024.

L’étape de vendredi lui a permis d’endosser véritablement ce rôle de leader. Alors que Jonas Vingegaard abandonnait la course, l’Américain explique à ses coéquipiers le matin que le point-clé du jour sera la côte des Baux-de-Provence. "On doit aborder le sommet en tête, dans la descente on va tellement s’étirer, s’il y a assez de vent on verra s’il est possible de créer une bordure", dit-il dans une vidéo du briefing publiée par la Visma-Lease a Bike sur les réseaux sociaux.

Il y avait du vent, une pluie battante, et la bordure a bien eu lieu à l’endroit annoncé à l’initiative de son équipe. "Matteo s’impose naturellement comme leader, c’est probablement le plus investi de tous dans l’étude du parcours", explique son coéquipier français Axel Zingle. "Même si on a de très bons directeurs sportifs, tous les matins Matteo est sur son ordinateur dans le bus, il repère chaque kilomètre de l’étape et il note tout dans son carnet. C’est un perfectionniste, c’est super motivant d’évoluer avec un leader comme ça et on a envie de tous se sublimer pour l’accompagner au mieux."

Un des coureurs les plus complets

Dans le dernier week-end escarpé dans les Alpes-Maritimes, le maillot jaune s’est rapidement retrouvé sans coéquipier pour l’aider à défendre sa position, sans conséquence. "Jonas nous a manqué pour avoir deux coureurs à l’avant, mais Matteo était super bon, il a pu faire tout le travail difficile par lui-même", confirme Arthur Van Dongen, son directeur sportif. Les attaques de son dauphin Florian Lipowitz (Red Bull-Bora), et des Ineos Grenadiers du troisième Thymen Arensman, n’ont pas fait vaciller Jorgenson, que ce soit sous la neige d’Auron ou sous le soleil du dernier jour, sur des routes que l’Américain installé à Nice connaît parfaitement. "Matteo a démontré toute la semaine que c’était l’un des coureurs les plus complets du peloton, il a magistralement défendu son maillot", estime Yannick Talabardon, directeur de la Course au Soleil. "Ce n’est pas un leader de rechange. L’année dernière il avait pris le maillot le dernier jour, cette année il l’a pris plus tôt et a su contrôler en grand leader qu’il est. Gagner Paris-Nice deux fois de suite, cela montre qu’on est un sacré coursier!"

Et la suite? La Visma-Lease a Bike lui a proposé d’être leader sur le Giro cette année, Jorgenson a décliné, "trop tôt" pense-t-il, préférant passer une saison de plus à épauler Jonas Vingegaard sur le Tour de France si tout va bien. "Jouer le classement général sur vingt-et-un jours, c’est encore autre chose mais on croit en lui et on pense qu’il peut le faire", juge son directeur sportif Arthur Van Dongen. ,"Avant, les objectifs que je pensais comme presque impossible ont été atteints, comme gagner Paris-Nice par exemple. Maintenant, il faut des objectifs plus hauts. Je peux pas dire que je suis capable de gagner un Grand Tour, je ne le sais pas, mais au moins je veux essayer et travailler pour ça" explique Matteo Jorgenson, qui a trois ans de moins que Jonas Vingegaard.  

Kevin Morand (à Nice)