Sénéchal raconte les instants terribles après l'accident de Jakobsen

Septième sur le BinckBank Tour début octobre, deuxième de Gand-Wevelgem dimanche, le Français Florian Sénéchal (27 ans) semble avoir de très bonnes jambes à quelques jours du Tour des Flandres, sur lequel il pourrait avoir un coup à jouer. Pourtant, pour le coureur de la Deceuninck-Quick Step, cette saison 2020 n'a pas été de tout repos. Engagé sur le Tour de Pologne début août, le Nordiste a été témoin du terrible accident de son coéquipier Fabio Jakobsen, et a d'ailleurs été le premier à porter secours au sprinteur néerlandais. Deux mois plus tard, il n'a rien oublié, comme il le raconte ce mardi dans les colonnes de L'Equipe.
"Fabio perdait du sang, beaucoup de sang"
"Je me souviens avoir voulu voir de loin si Fabio avait gagné mais je n’ai aperçu que des barrières qui volaient dans tous les sens, décrit Sénéchal. En passant la ligne, je n’ai pas vu qui était tombé mais en m’arrêtant juste après, j’ai pu voir Fabio allongé tout seul et un photographe à côté de lui, inerte. Je suis allé directement vers lui, personne ne s’en occupait, tout le monde était autour du photographe qui avait perdu connaissance. Fabio lui, perdait du sang, beaucoup de sang. J’ai tout de suite compris qu’il était en train de s’étouffer, mon premier réflexe a été de prendre sa tête et de la relever tout doucement pour éviter que le sang remonte au cerveau ou aille dans son système digestif ou ses poumons. Il a repris alors un peu ses esprits, il a craché du sang mais son état semblait peu à peu plus stable."
Stable, mais tout de même très inquiétant... "Le plus terrible pour moi, c’est que je ne le reconnaissais pas, son visage était totalement détruit, je m’efforçais de le fixer dans les yeux. Je ne sais toujours pas comment j’ai pu réagir ainsi, je n’ai aucune formation de secouriste mais je l’ai fait presque instinctivement", poursuit le Français, visiblement marqué par ces "longues minutes" passé seul avec Jakobsen jusqu'à sa prise en charge par les secours.
"Comme une grenade en pleine face"
"Toute l’équipe m’a beaucoup aidé car j’étais vraiment traumatisé par ce que j’avais vécu, et surtout de voir Fabio dans cet état, avec ce visage qui n’en était plus un. Comme s’il avait pris une grenade en pleine face, décrit-il. Je me demandais comment il pourrait faire pour manger et respirer. Je ne savais pas s’il allait survivre. J’ai été suivi ensuite par un psychologue, ça m’a beaucoup servi."
Jakobsen, qui est sorti de l'hôpital, mais qui doit encore subir plusieurs opérations pour reconstruire le bas de son visage et sa bouche, a depuis salué le comportement de Sénéchal. "Je pense que désormais je suis lié étroitement à Fabio, à son histoire, reconnait le Nordiste, sans vouloir endosser le costume de sauveur. On était déjà plutôt proches mais aujourd’hui notre relation est encore plus forte. Je ne pourrai jamais oublier ce que j’ai vécu ce jour-là, à ses côtés. Près de la mort."