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Tour de France: "Il faut arrêter de parler de dopage", les spectateurs au soutien de Vingegaard et Pogacar

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Parce qu'ils se livrent un duel fantastique depuis le début du Tour de France, Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar n'échappent pas au poids du soupçon. Même si le public veut croire en leur probité.

"J’ai toujours des frissons, c’était complètement fou!" Vingt-quatre heures après, Paul n’est pas redescendu de son petit nuage. Des étoiles plein les yeux, cet étudiant libournais de 22 ans se revoit dans les pentes du Tourmalet, où il était aux premières loges jeudi pour assister au bras de fer fantastique entre Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard. Avec sa petite-amie Eva, "capable de réciter de tête toute la biographie de Julian Alaphilippe" mais "nostalgique d’Alberto Contador", ils se sont décidés à suivre le Tour de France pour la première fois en caravane. "Au moins les deux premières semaines, on verra si on se supporte jusqu’à Paris", plaisante Paul, rencontré ce vendredi au départ de la septième étape, sous le soleil de Mont-de-Marsan.

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Casquette du maillot jaune vissée sur sa crinière blonde, et pancarte en mains à la gloire de Thibaut Pinot, il n’a que des compliments pour les deux monstres de cette 110e édition. "Il faut le dire, ils sont bluffants. Je me posais des questions sur la forme de Pogacar depuis sa blessure au poignet sur Liège-Bastogne-Liège. Mais ça fait plaisir de le voir à un tel niveau. Avec Vingegaard, ils font le spectacle, on ne s’ennuie jamais", savoure-t-il. Avant d’ajouter spontanément : "Et en plus, ils sont propres ! J’en suis persuadé. Ils font partie de la nouvelle génération, qui ne doit pas être associée au dopage. Ils sont juste meilleurs que les autres. Bien sûr, je n’oublie pas que le cyclisme a un lourd passé mais c’est aujourd’hui l’un des sports plus contrôlés au monde. Je pense qu’il est quasiment impossible de se doper sans que ce soit repéré."

"Il faut arrêter de parler de dopage"

Un avis globalement partagé autour de lui. Campé quelques mètres plus loin au pied du podium protocolaire, en quête d’autographes pour ses deux adolescentes, Romain, 38 ans, ne veut pas non plus rejoindre le clan des sceptiques, ceux qui émettent automatiquement des soupçons devant chaque performance maousse de Pogacar ou Vingegaard, ceux qui hurlent à la triche sans la moindre preuve, ceux qui ne peuvent s'empêcher de comparer les records battus dans les cols du Tour à ceux de la furia des années EPO. "Oui, ils sont tous les deux au-dessus du lot, confie-t-il, caché sous ses lunettes de soleil aux couleurs d’AG2R Citroën. Oui, ils sont incroyables. J’étais dans le dernier kilomètre du Tourmalet quand ils sont montés comme des mobylettes. Ce sont des mutants, des extraterrestres. Il y a eux et le reste du monde. Mais on ne pense surtout pas aux questions de dopage, surtout pas. Avec tous les contrôles qu’il y a maintenant, il faut arrêter de parler de ça."

Sur les réseaux sociaux, le moindre coup d’éclat de Pogacar et Vingegaard, qui n'ont jamais été contrôlés positifs, charrie pourtant son lot de suspicions. Ce fut aussi le cas l’an dernier lorsque le Danois avait bouclé les 3343,8 kilomètres du Tour 2022 à une vitesse moyenne de 42 km/h, la plus élevée de l’histoire. Plus rapide que celle du Tour 2005 remporté par un certain Lance Armstrong (41,654 km/h), avant l’annulation de son titre. Une accélération justifiée par une multitude de facteurs : meilleur matériel, qualité du bitume, professionnalisation accrue des coureurs, conditions météorologiques favorables, stratégies de course... Invariablement, les Jumbo-Visma n’avaient pourtant pas échappé au poids du soupçon.

"Voir Pogacar craquer, ça rassure"

"Nous sommes propres à 100%", s’était défendu Vingegaard, alors que Wout van Aert s’était agacé face à ces "questions de merde". Puisqu'il s'agit ici de cyclisme, sport marqué il y a quelques semaines encore par les contrôles positifs au tramadol de Nairo Quintana, synonyme pour le Colombien de disqualification du Tour 2022, ces questions risquent de se reposer à l'avenir, forcément ou malheureusement. "Dans le vélo on restera toujours suspicieux, on continuera de s’interroger sur le dopage ou la triche mécanique, reconnaît Aldric, 40 ans, présent au bord de la route sur la septième étape menant à Bordeaux. C’est triste à dire, mais le mal a été fait. Parfois quand on regarde des courses on se dit : ‘Ah c’est vrai que là c’est bizarre…’ Mais je n’ai pas de doute sur Pogacar et Vingegaard. Voir Pogacar craquer dans le col de Marie Blanque, ça rassure."

Même ressenti du côté de Bernard, 60 ans et maillot de la mythique formation espagnole Kelme sur le dos : "Je peux comprendre ceux qui ont des doutes et je crois qu’il y en aura toujours dans le vélo... Mais je veux croire que Pogacar et Vingegaard sont propres. Je préfère faire abstraction de tout ce qui peut se dire pour profiter de ces étapes merveilleuses." "C’est vrai que c’était dingue de voir Pogacar laisser sur place Vingegaard jeudi à Cauterets-Cambasque. Mais il ne faut pas penser aux affaires qui ont pu toucher le Tour dans le passé, sinon ça gâche le plaisir. On fait confiance aux contrôles et aux coureurs", complète Martine, 63 ans, séduite par "le panache" et "les prises de risques" de "Pogi". "Je peux vous dire que j'en ai connu des éditions du Tour gâchées par le dopage... Mais je crois en ces deux petits jeunes. Ils attaquent et ils s'attaquent en permanance, ils me plaisent beaucoup", renchérit Emile, 81 ans, alors que Jacqueline, 61 ans, se dit "impressionnée par la simplicité" du duo Pogacar-Vingegaard. "Moi je vibre devant ce Tour, dit-elle. On n’est jamais à l’abri d’une sale affaire, mais il y a tellement de contrôles… Je ne pense pas au dopage. Pas cette année."

Rodolphe Ryo, à Mont-de-Marsan