Coupe de France: président, entraîneur, commercial... Guillaume Allanou, l'homme à tout faire du Stade Briochin

"Il a des capacités différentes des autres, c’est certain, pour pouvoir assumer tout ça". "C’est un gros travailleur qui ne compte pas ses heures". "Quelqu’un qui se donne corps et âme au club". Que ce soit Matthieu Auffret, l’entraîneur-adjoint, le défenseur James Le Marer ou le gardien Franck L’Hostis, les Briochins ne cachent pas leur admiration à l’évocation de Guillaume Allanou. Tous côtoient au quotidien l’homme de 48 ans, celui qui est à la fois l’entraineur du Stade Briochin, son directeur sportif et son président. Une triple-casquette rare! "On peut même ajouter commercial du Stade Briochin", sourit le principal intéressé comme si ça ne suffisait pas. "Quand on est président, forcément on est là pour aller chercher des budgets. Le fait que je sois chef d’entreprise fait que j’actionne mon réseau donc j’ai aussi la fonction de commercial en plus."
N’en jetez plus la coupe est pleine. Son emploi du temps aussi. "On lui demande souvent comment il arrive à faire des journées de 30 heures alors qu’il y en a que 24", lance James Le Marer, le capitaine des Griffons, au club depuis 13 ans. "On en rigole avec lui. A qui on parle? Au président, au coach? Ce ne doit pas être évident de réussir à changer ses casquettes. On l’a vu l’autre jour quand on était en déplacement (match aux Herbiers le 14 février), il était en train de gérer le Roazhon Park tout en préparant le match. Avec ce qu’il vit en ce moment, je pense que les nuits doivent être très courtes". Et le téléphone portable jamais loin. "Non je crois que je ne l’ai jamais vu sans", réfléchit Matthieu Auffret. "Guillaume et son téléphone, il fait tout avec. C’est un investissement de fou". "Quand on aime, on ne compte pas", relativise Allanou. "Je préfère ne pas commencer à compter combien d’heures le Stade Briochin me prend dans la journée. Je n’ai qu’un seul téléphone. C’est peut-être un tort car quand un numéro m’appelle, je ne sais jamais si c’est pour le club, ma vie professionnelle ou la vie personnelle et familiale. J’essaie de filtrer. Je sais switcher d’une casquette à l’autre dans la même journée car c’est juste de la passion".
"Inconsciemment, les joueurs ont envie de lui rendre, de le récompenser"
Quand on lui demande de nous rappeler son historique avec le Stade Briochin, l’ancien défenseur central nous interrompt gentiment. "Vous n’aurez pas le temps, on va synthétiser! J’ai été joueur quand le club a connu le professionnalisme pendant trois ans (en Division 2 de 1993 à 1997), marqué par un dépôt de bilan (en mars 1997 relégation en CFA 2). Je suis revenu comme joueur amateur à la fin des années 90, début 2000. Et puis je suis devenu président en 2009. Pourquoi je ne sais pas? On a tous un club de cœur. Moi c’est celui-là. J’ai été ensuite directeur sportif et aujourd’hui entraineur de l’équipe A (depuis janvier 2024) car j’aime le vestiaire. J’ai coutume de dire que je suis un entraîneur qui préside et non un président qui entraîne. La nuance est importante croyez-moi."
Au quotidien, Guillaume Allanou gère le Stade Briochin (550 licenciés répartis en cinq sections foot masculin, féminin, sport adapté, foot en marchant et futsal) et son budget modeste de N2 s’élevant à 1,2 million d’euros, épaulé par Coralie Labbé la directrice générale et un tissu de bénévoles fidèles. Il jongle sans sourciller entre l’administratif, les problèmes récurrents de pelouse du stade Fred Aubert obligeant le club à se délocaliser pour les entraînements et la mise en place des plots, des petits buts pour les séances et les mises en place tactiques. Adepte "des circuits courts" comme il dit, sa triple-casquette lui donne l’avantage de connaître parfaitement ses joueurs. "En tant que directeur sportif, il nous a tous fait venir au club. Il a fait en sorte de trouver du boulot pour certains. Il a fait tout ce qu’il fallait pour qu’on se sente bien ici", explique James Le Marer, lui-même éducateur au sein du club auprès des jeunes. "Je l’ai rencontré il y a un an et demi et le feeling est tout de suite passé", renchérit Franck L’Hostis. "On a eu des discussions simples, franches et honnêtes. C’est quelqu’un de sain. C’est un plaisir au quotidien d’évoluer avec Guillaume. Il connaît les joueurs de l’équipe humainement et sportivement. Il les a choisis. Et ce n’est pas anodin qu’on puisse faire un parcours comme celui-là. Il y a vraiment une alchimie, une symbiose au sein du club". "Je pense qu’inconsciemment, les joueurs ont envie de lui rendre, de le récompenser. On a tous envie de réussir pour lui", ajoute Le Marer.
Malgré ses triples responsabilités, il est entièrement bénévole
Sur les 24 joueurs qui composent le groupe briochin, un peu plus de la moitié ne vivent que du foot avec "des salaires modestes de gens qui travailleraient dans le privé, des SMICS améliorés. Cà ne va pas chercher beaucoup plus loin. Je ne veux pas et on ne peut pas", précise Allanou. Le reste travaille en formation qualifiante au sein du club dans les services administratifs ou marketing. Le défenseur central Hugo Boudin, le héros du 8e de finale face à Nice, est courtier en prêt immobilier. L’arrière gauche Leo Rouillé travaille dans la grande distribution. Malgré ses responsabilités à rallonge, Guillaume Allanou lui est… entièrement bénévole! "Je me suis toujours refusé à prendre de l’argent sur ce club là. Ce n’était pas vocation. L’argent n’est pas du tout mon moteur", assume t-il. "J’ai la chance d’avoir une activité professionnelle qui me passionne aussi". Allanou est promoteur immobilier. Avec sa société, il est même sponsor du club. "Cela me coûte de l’argent finalement", sourit-il. "Quand on s’implique dans la vie associative, je ne me voyais pas m’auto-rétribuer. Cela n’a pas de sens pour moi. Le fait en plus d’être totalement bénévole me permet d’avoir aussi une totale liberté et la liberté ça n’a pas de prix".
Alors que le magnifique parcours des Briochins en Coupe de France risque fort de s’arrêter mercredi soir, Guillaume Allanou se dit fier car "cette épopée laissera une belle aventure collective et humaine. Ces moments, ils seront pour nous à vie. Et puis il y a le plaisir d’avoir offert aux gens du club, les bénévoles qui œuvrent dans l’ombre des émotions. J’ai vu des gens qui sont proches des 70 ou 80 ans pleurer et nous dire merci". Que laisser en héritage? "Quand la lumière s’éteindra sans doute le 27 au matin, l’argent qui restera de la Coupe de France (au moins 218.000 euros) servira à structurer le club dans des projets associatifs ou par exemple pour renouveler les mini-bus des jeunes qui ont tous plus de 300.000 kms au compteur", liste-t-il. Allanou réfléchira ensuite à peut-être passer la main. Il y pense. Christophe Kerbrat, 38 ans, la légende de Guingamp vainqueur de la Coupe de France en 2014, au club depuis 2020 arrêtera sa carrière en juin prochain. Il est déjà programmé pour prendre le poste de coordinateur-directeur sportif. Un relais bienvenu. Mais avant les au revoirs, ce sont les étoiles parisiennes, un feu d’artifice et un sacré bouquet final qui attendent Allanou et le Stade Briochin mercredi soir devant les 29.000 spectateurs du Roazhon Park.