Angleterre: l'irrésistible ascension de Mings, du foyer pour sans-abri à la sélection

Adil Rami employé à la mairie de Fréjus puis champion du monde avec les Bleus, Troy Deeney en leader de gang puis cadre à Watford, Jamie Vardy passé de la sixième division à un titre de champion en Premier League… le foot ne manque pas de parcours étranges. Cette semaine, l’Angleterre a fait la connaissance de Tyrone Mings et de son destin presque incroyable.
A 26 ans, le défenseur d’Aston Villa fait partie des quatre petits nouveaux sélectionnés par Gareth Southgate pour affronter la Bulgarie ce samedi puis le Kosovo lors des éliminatoires de l’Euro 2020. Et le nouveau membre des Three Lions a savouré sans se cacher ce nouveau rebondissement dans une carrière déjà riche en soubresauts.
"J’avais d’autres buts à l’époque où j’étais conseiller en hypothèque et que je jouais au football en semi-pro ou amateur, a reconnu le néo-international anglais en conférence de presse. Jouer pour l’Angleterre, c’était un autre monde. Je ne peux pas dire, quand j’étais assis à mon bureau, que jouer pour l’Angleterre était un objectif réalisable."
Un mental de guerrier façonné par la vie
Si Tyrone Mings semble aujourd’hui vivre comme dans un rêve, cela n’a pas toujours été le cas. Enfant, il s’est même retrouvé contraint de vivre pendant près d’une année dans un refuge pour sans-abri avec sa mère, Dawn, et ses trois sœurs. "Je me suis retrouvé dans plein de situations compliquées en grandissant, a avoué le natif de Bath auprès du Telegraph en mars dernier. J’ai vécu dans un foyer pour sans-abri. […] Je ne me souviens pas exactement de l’âge que j’avais mais je me rappelle que l’on avait deux lits superposés et que l’on vivait à cinq là-dedans avec mes sœurs et ma mère."
La faute à une séparation houleuse entre sa maman et son compagnon de l’époque, le jeune Tyrone a ainsi vécu dans cette condition "terrible" pendant plusieurs mois avant d’être placé dans un logement social avec ses proches. Ensuite, le football est entré dans sa vie lorsqu’à huit ans, il a rejoint Southampton, avant de ne pas être conservé au centre de formation des Saints pendant l’adolescence.

Rattrapé de justesse par les Bristol Rovers, il a ensuite bénéficié d’une bourse pour jouer au football à Yate Town puis Chippenham. C’est au sein des obscures divisions du football anglais que le défenseur a débuté avant d’être remarqué par Mick McCarthy entraîneur d’Ipswich Town en Championship et de faire son entrée dans le foot pro.
"Je ne regarde pas mon passé de façon négative, a encore expliqué le joueur de 26 ans. Je le regarde avec le sourire. Cela me permet de m’identifier à des gens et je n’ai pas vécu des choses aussi terribles que certaines personnes que j’ai pu rencontrer et qui dorment dans la rue. Toutes les expériences que j’ai vécues, je veux les utiliser positivement."
Le nouveau Bad Boy (un peu fragile)
Après trois nouvelles saisons passées en D2, Tyrone Mings a tapé dans l’œil de Bournemouth qui n’a pas hésité à miser près de 12 millions d’euros sur le rugueux défenseur lors de son accession à la Premier League en 2015. Malheureusement pour lui, seulement douze minutes après ses débuts dans l’élite du football anglais, le défenseur a été victime d’une déchirure des ligaments du genou et a encore dû patienter près d’un an et demi avant d’effectuer son retour sur les terrains. Après seulement six nouvelles apparitions en Premier League, Tyrone Mings a encore fait parler de lui en se retrouvant au centre d’un violent échange avec Zlatan Ibrahimovic.
Si le Suédois a écopé de trois matchs de suspension pour un coup de coude, l’Anglais a pris cinq rencontres ferme pour avoir piétiné le crâne de l’ancien Parisien. "Je jouais le ballon et malheureusement, il a sauté sur mon coude, avait même affirmé le géant Suédois après la rencontre. Je ne l’ai pas fait exprès. Espérons qu’il ne soit pas blessé."
De retour dans les petits papiers d’Eddie Howe pour la saison 2017-18, Tyrone Mings a encore vu sa carrière perturbée par une grave blessure. Touché au dos en septembre 2017, le défenseur n’a pas rejoué avant décembre 2018… juste le temps de s’envoler pour Aston Villa en Championship. Et pour sa première avec les Villans, l’Anglais a encore fait des siennes en marchant sur le visage de l’ancien Rennais Nelson Oliveira.
Il n'a pas été sanctionné pour ce coup de crampons involontaire, mais la réputation de Mings est alors définitivement établie. Et pourtant, son dévouement ainsi que, paradoxalement, le peu de cartons reçus pendant sa carrière (18 jaunes et aucun rouge direct) en font rapidement l’un des chouchous des supporters partout où il passe.
Un mentor nommé Terry
Grand artisan de la montée d’Aston Villa cet été, Tyrone Mings possède de nombreuses qualités pour s’installer durablement en Premier League. Leader dans l’âme et dur au mal, il doit apprendre à se canaliser et à garder son calme. Et cela tombe bien puisque le nouvel assistant des Villans, John Terry, semble être le modèle idéal pour l’aider à progresser. Interrogé sur l’apport de l’ancien capitaine de Chelsea et de la sélection anglaise, le néo-retraité a déjà eu une bonne influence sur son protégé. D’abord coéquipiers pendant six mois, les deux hommes s’entendent à merveille.
"Il me dit que je dois finir un match sans être trop vu ou même mentionné, a expliqué pour Sky Sports le défenseur de 26 ans. Il m’explique que c’est un bon reflet de la performance d’un central. Cela veut dire que j’ai fait tranquillement fait mon travail. Après un match, on analyse ma performance avec la vidéo et il me dit ce qu’il aimé ou pas."
Après s’être rendu indispensable à Aston Villa en l’espace de quelques mois, Tyrone Mings possède une vraie chance de s’installer dans l’effectif des Three Lions. Si Harry Maguire, défenseur le plus cher de l’histoire, semble indéboulonnable, il reste une place à ses côtés. Michael Keane, John Stones ou Joe Gomez n’ont pas toujours convaincu Gareth Southgate et l’ancien gamin des rues pourrait bien poursuivre son rêve jusqu’à l’Euro 2020.