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Kings League: les joueurs peuvent-ils vraiment espérer décrocher des contrats dans des clubs pros?

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L'édition française de la Kings League, compétition de football à sept diffusée sur Twitch, débute le 6 avril. Près d'une centaine de joueurs y participent. Avec peut-être l'espoir de se faire repérer par un club professionnel?

Les joueurs de la Kings League France peuvent-ils rêver plus grand? Ils sont plus de 80 dans les starting-blocks pour le grand début de la compétition de football à sept, conçue par l'ancien international espagnol Gerard Piqué et portée par des figures de la scène francophone de Twitch et de Youtube. Même si quelques personnalités comme Benoît Costil et Jérémy Ménez font partie de cette aventure, les participants sont inconnus du grand public pour la plupart. Ils vont pourtant être scrutés par des milliers d'internautes dès dimanche 6 avril. Un coup de projecteur puissant qui pourrait donner quelques espoirs à certains de se faire repérer.

"Si des joueurs sortent du lot, ça les met en valeur, ça les expose", croit Clément Goguey, numéro un de la draft et formé à l'Olympique de Marseille. Il était présent dans l'équipe française de la Kings World Cup, organisée au Mexique en 2024. Ses performances avaient attiré l'attention. "J’ai eu des appels, c’était des premiers contacts. Mais comme je ne pouvais pas me déplacer et quitter ce que j’avais entrepris avec mes études de kiné, je n’ai pas pu donner suite", confie-t-il à RMC Sport.

L'espoir que des joueurs puissent basculer dans le monde du haut niveau est aussi dans l'esprit d'Adil Rami, président du Wolf Pack FC: "J’aimerais donner des opportunités à des jeunes joueurs talentueux et passionnés. Je kifferais voir un de mes joueurs partir dans un club pro. On est loin, bien évidemment".

"Ce n'est pas pris au sérieux"

En Espagne, où tout a commencé, la Kings League existe depuis 2022. Pas un joueur n'en a décroché un contrat de footballeur pro par la suite. En revanche, deux gardiens mexicains, passés par l'édition américaine du format, ont réussi à tirer leur épingle du jeu: Marco Millan a rejoint Atlante en D2, James Hernández est allé chez les espoirs de Cruz Azul en D1, comme le rapporte Futbol Total.

La nature de la compétition aide peut-être les gardiens à mettre en valeur leurs réflexes, alors que c'est bien moins évident pour les joueurs de champ. Les qualités nécessaires à sept ne sont pas les mêmes qu'à onze, en particulier sur le plan physique. Sans compter l'aspect tactique. Et les règles très particulières, destinées au divertissement, n'aident pas.

Théo Chendri est catégorique: "La Kings n’est pas encore respectée par les professionnels du foot". Le milieu français de 27 ans, formé au FC Barcelone, parle par expérience. Lui aussi a participé à la Kings World Cup. "Je ne pense pas que des joueurs puissent se faire repérer. La plupart des gens dans le monde du foot, entraîneurs, directeurs sportifs ou présidents, dénigrent encore un peu le format. Ils se disent: «C’est quoi ce truc de clowns, avec des streamers, avec des pénalties, des cartes...» Ce n’est pas pris au sérieux. Ils prennent ça comme un passe-temps". Ce qui avait d'ailleurs été illustré par les propos cinglants sur RMC de Jérôme Rothen. "N'appelle pas ça du football", avait lâché l'ancien international français l'an dernier, avant de finalement rejoindre le staff de UNIT3D, l'équipe de Squeezie.

D'autres débouchés?

Il y a aussi une question de niveau. Quand ils n'ont pas déjà raccroché les crampons, bon nombre des joueurs de la Kings League sont sans contrat depuis plus ou moins longtemps. Pour certains, à l'image par exemple de Christian Nsapu, gardien chouchou de Foot2Rue au Mexique, c'est après s'être retrouvé en échec en National 3. Les requis en cinquième division sont certes élevés par rapport au commun des mortels. Mais les places y sont justement très chères et exigent sans doute plus que de certitudes que ce que ce show sur Twitch peut montrer.

"Après la Kings World Cup, je n’ai reçu aucune sollicitation de club", raconte Théo Chendri. "Ça donne une visibilité médiatique, par rapport aux réseaux sociaux. Ça fait parler de toi, mais surtout dans des communautés de jeunes, qui ont entre 10 et 20 ans. J’ai reçu beaucoup de messages, très bien bienveillants, mais pas vraiment de clubs qui me disaient être intéressés, non. Les clubs avec qui j’ai été en contact cet été savaient que j’avais fait la Kings World Cup, mais ils m’ont juste demandé si ça s’était bien passé, ça s’arrête là".

À défaut d'offrir des opportunités pour les terrains de 105x68 mètres, la Kings League peut faire briller autrement. Pas pour en vivre directement: la rémunération se limite à 200 euros par match maximum (hors joueurs invités). Mais de bonnes performances peuvent booster l'image ou le réseau. Dans l'édition espagnole, certains joueurs de D5 ont préféré miser sur la Kings League plutôt que de continuer dans l'ombre. C'est ce qu'avait constaté Alberto de la Bella, ancien défenseur phare de la Real Sociedad: "Au final, c'est similaire en termes de salaire et que cela a beaucoup plus d'impact. Avec les sponsors, c'est un monde qui s'ouvre à eux". Après tout, quoi de mieux qu'un événement phare sur Twitch, avec les plus grands créateurs de contenu du pays, pour essayer de percer dans le monde du streaming ou de l'influence?

Julien Absalon avec Alexandre Jaquin