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Droits TV de la Ligue 1: nouvelle chaîne, compensation financière, risque d'écran noir... toutes les questions sur la table dans le conflit DAZN-LFP

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Après le refus mardi de DAZN de la proposition financière transmise par le médiateur dans le cadre du conflit autour des droits TV de la Ligue 1, le contentieux entre le diffuseur et la Ligue se poursuit. Avec une certitude pour les matchs de la fin de saison, mais des interrogations pour la suite.
  • Où voir les matchs de Ligue 1 ce week-end?

Malgré le conflit qui persiste donc entre la LFP et DAZN, il n’y a pour le moment aucun sujet quant à la diffusion des matchs de Ligue 1. DAZN va continuer de diffuser ses huit matchs par week-end. Son contrat prévoit la diffusion des cinq dernières journées ainsi que les barrages L1/L2.

  • Où voir les matchs de L1 la saison prochaine?

Cette question est beaucoup plus incertaine. Logiquement, vu qu’aucun accord à l’amiable de séparation n’a pas eu lieu entre DAZN et la Ligue, le contrat actuel doit continuer de s’appliquer. DAZN devrait donc continuer d’assurer la diffusion des matchs. Le montant de ses droits serait simplement un peu plus élevé, comme le prévoit le contrat sur la deuxième année.

Problème: DAZN ne veut pas continuer dans les conditions actuelles, s’estimant lésée par rapport au produit acheté. La plateforme perd trop d’argent à son goût (près de 240 millions d’euros de perte attendus sur la première saison). Il est donc fortement probable qu’elle veuille tendre la situation et faire valoir ses arguments en justice. DAZN a déjà déposé un recours contre la Ligue devant le Tribunal des activités économiques de Paris. Le diffuseur réclame 573 millions d’euros pour "manquement observé" et "tromperie sur la marchandise". Difficile dans ce contexte d’imaginer DAZN poursuivre sans sourciller la diffusion des matchs dans les conditions du contrat actuel.

Si la Ligue devait récupérer ses droits en fin de saison, les matchs pourraient être réunis sur une plateforme créée par la Ligue et distribuée le plus largement possible sur les fournisseurs d'accès internet et via Canal+ notamment. Ce devrait être le grand chantier de Nicolas de Tavernost, nouveau directeur général de LFP Media qui prendra ses fonction dans quelques jours.

  • Où en est ce projet de chaîne de la Ligue?

À l’heure actuelle, la seule alternative qui semble possible à DAZN pour la LFP, c’est la création de sa fameuse chaîne interne. Le projet avait déjà été sérieusement travaillé l’été dernier. Les équipes de Benjamin Morel, ancien DG de LFP Media avaient trouvé un accord avec Max, la plateforme commercialisée par WarnerBros, pour intégrer son portefeuille de contenu aux cotés de séries prestigieuses. L’abonné aurait donc eu accès à un large choix de contenu pour 27,99 euros par mois. Le projet avait été présenté au conseil d’administration mais finalement, devant le peu de garanties de revenus d’un tel modèle, les présidents avaient préféré, à deux semaines du début du championnat, opter pour l’option DAZN/beIN qui assurait des revenus immédiats. Mais le projet est toujours standby au sein de LFP Media.

Plusieurs présidents, comme Joseph Oughourlian ou John Textor souhaitent pousser cette option. Vincent Labrune a aussi clairement penché vers ce projet lors du collège de Ligue 1, mardi 15 avril. "Il faut avancer par nous-même", a-t-il lancé hier lors de la réunion avec les présidents. Nicolas de Tavernost, successeur de Benjamin Morel à la tête de LFP Media, devrait travailler dans ce sens. L’idée est de proposer tous les matchs de L1 au même endroit et que la Ligue soit maître de son produit de la production à la distribution en passant par tout l’aspect éditorial. Il faudrait trouver des accords de distribution avec tous les fournisseurs d’accès internet (SFR, Bouygues, Orange, Free) mais aussi Canal, voire Amazon, Netflix, Molotov… Un point crucial resterait à trancher: la tarification de l’abonnement afin de réunir le plus grand nombre d’abonnés possible.

L’autre enjeu énorme sur cette option, c’est le financement des clubs. En attendant que l’argent des abonnements s’accumule, il faudrait assurer les revenus des clubs en s’associant à un organisme financier durant plusieurs mois. CVC, actionnaire minoritaire de LFP Media, aurait le profil pour proposer une solution.

  • Les clubs recevront-ils l'argent de l'échéance du 30 avril?

Le 30 avril, c'est la date de l’avant-dernière échéance de paiement des droits TV pour DAZN cette saison. La dernière est attendue deux mois plus tard. La LFP et donc les clubs doivent recevoir 140 millions sur ces deux dernières échéances, dont 70 millions le 30 avril. Vu qu’aucun accord de séparation n’a été conclu mardi 15 avril, le contrat actuel doit s’exécuter.

Mais DAZN, lors de la dernière échéance de février, n’avait déjà pas payé en totalité son dû en temps et en heure. Le diffuseur n’avait versé que la moitié de son échéance à la Ligue, plaçant sous séquestre l’autre moitié afin de mettre la pression sur la LFP pour renégocier à la baisse le contrat.

Vu sa volonté de ne pas poursuivre sa collaboration dans les conditions financières actuelles, il est fortement probable que DAZN ne paie pas rubis sur l’ongle ces 140 millions d’euros restant au titre de cette fin de saison. Si tel était le cas, la Ligue devra vite réagir en demandant la saisie de la garantie de l’actionnaire de DAZN afin de faire exécuter le contrat et donc le paiement des droits. Une nouvelle action en référé serait aussi très probable.

  • Les clubs sont-il encore en grande difficulté financièrement?

Plus que jamais. Il y a une certaine hétérogénéité des finances des clubs en Ligue 1. Ceux qui ont participé aux Coupe d’Europe cette saison s’en sortent plutôt bien. Lille et Brest ont grandement renfloué leur caisse grâce à la manne de l’UEFA. Mais il y a une dizaine de clubs en grande difficulté économique. Parmi eux, on peut citer ceux qui ne sont pas détenus par un milliardaire ou un grand fonds d’investissement comme Le Havre, Montpellier, Angers, Reims. "Les prochaines échéances sont vitales pour qu’on finisse la saison", confie un président à RMC Sport. Au 30 juin, la DNCG table sur 1,2 milliard de pertes cumulées pour les clubs de Ligue 1 et Ligue 2.

Loïc Briley