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La Ligue 1 n'a jamais été aussi serrée depuis 30 ans (mais faut-il s'en réjouir?)

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Avec neuf points séparant le deuxième du dernier, qui compte un match en moins, la saison 2019-20 de Ligue 1 se déroule dans un degré d’homogénéité élevé qui permet aux clubs de rester au contact de la tête, sans s’éloigner de la zone rouge. Cette absence de hiérarchie claire ne décuple pas son attrait. Au contraire.

La Ligue 1 se rapproche du tiers de sa saison et rien n’est clair. Qui est en crise? Qui surperforme? A ses questions, il serait tentant de répondre que l’OL (10e), Monaco (15e), Nice (13e) ou Rennes (14e) sont à la peine quand Angers (2e) et Nantes (3e) font office d’énormes surprise alors que l’OM (4e) est au rendez-vous. Mais la lecture de ce classement serait biaisée par les faibles écarts en termes de points. Prenez Nantes, surprenant 3e mais engagé dans une spirale de trois défaites consécutives et qui n'a que trois points d’avance sur le 13e du championnat (Nice). Ou encore, l’OM, une seule victoire en 6 matchs avant ce week-end, et désormais 4e après son succès face à Lille (2-1), samedi. 

Angers plus faible dauphin de l’histoire

Même le PSG, leader sans surprise, ne paraît pas aussi souverain cette saison avec déjà trois défaites en 12 matchs. Une incongruité sur l’habituel ordre de marche fracassant des Parisiens (qui signent leur pire début de saison de l'ère qatarie). Mais une manière de souligner le niveau homogène de cette Ligue 1 où le deuxième et le dernier, (Nîmes, qui compte un match en moins), sont regroupés en neuf points seulement. Du jamais vu depuis 1987!

Deux victoires de suite et vous vous retrouvez en course pour l’Europe. Deux revers consécutifs et vous voilà à portée de tir de la zone rouge. Avec 20 points en 12 journées, Angers est le plus faible dauphin de l’histoire de la Ligue 1 (ex aequo avec Bastia en 2000-01 et Lyon en 1975-76). Le problème n’est pas le total d’Angers mais l’absence d’équipes au-dessus de cette barre. 

"Le dernier peut battre le 2e puis perdre contre l'avant-dernier"

Alors, bonne nouvelle? Pour le suspense, indéniablement. Pour les supporters (et les parieurs), c’est à en devenir fou. Tout le monde peut battre tout le monde à l’instar de Rennes, premier tombeur du PSG puis incapable de battre qui que ce soit pendant sept matchs entre les 4e à la 10e journées. "C’est un championnat bizarre où le dernier peut battre le deuxième et le troisième puis perdre contre l’avant-dernier le week-end d’après, illustre Morgan Sanson, joueur de l’OM. C’est pour ça aussi qu’il faut prendre de l’avance et qu’aucun match n’est à négliger. Si on commence à perdre des points bêtement, ceux de derrière nous rattrapent et inversement. Si on arrive à prendre les points rapidement, on se retrouve de suite en haut du classement, là où on veut être."

La densité, le salut de Villas-Boas

Les écarts sont si resserrés qu’ils dessinent des perspectives enchantées, comme l’a souligné André Villas-Boas avant la réception de Lille, que son équipe abordait pourtant en plein doute. "Nous pouvons toujours atteindre le podium, parce que le classement est comme il est, et dans ces moment-là, heureusement qu’il est comme il est, a confié le Portugais. Parce que quand tu as les résultats qu’on a dans le championnat, tu dois être plus haut."

"La fameuse homogénéité pourrie"

Cette densité masque difficilement un faible niveau de jeu même si la dernière journée fut un peu plus enjouée que la précédente. Celle qui avait fait sortir de ses gonds notre Daniel Riolo. "C’est le week-end le plus affreux depuis le début de saison en Ligue 1, avait-il lâché au bout du rouleau. Plus ça va, moins ça va, j’en ai marre. (...) C’est ça notre L1, c’est la fameuse homogénéité pourrie." Habituel défenseur farouche du championnat, Pierre Ducrocq, ancien joueur du PSG et membre de la Dream Team RMC Sport, avait aussi rendu les armes. "Je suis allé voir PSG-Le Havre en U17 cet après-midi, j’ai pris beaucoup plus de plaisir", avait lâché l’ancien Parisien. 

"Un bon niveau" pour Paulo Sousa

Malgré un niveau technique pointé du doigt, ce championnat, qui doit se renouveler saison après saison en raison de l’exode de ses pépites vers l’étranger, a évidemment ses défenseurs même parmi ses techniciens arrivés plutôt récemment. "Il y a un bon niveau, c’est un championnat dur et très physique, les équipes sont homogènes", confiait Paulo Sousa, entraîneur de Bordeaux la semaine dernière.

Cette saison confirme aussi l’importance des cycles dans les clubs. Angers, Nantes, Lille ou Reims semblent portés par la continuité de leurs effectifs même si cette lecture se heurte aussi aux faits (départs de joueurs majeurs à Angers et Lille, changement d’entraîneur à Nantes). Les équipes aux mercatos tardifs et conséquents (Nice, Rennes, Monaco…) ont eu leur mauvaise période. Mais là encore, un succès peut tout changer.

Cette compétitivité s’accompagne donc d’une certaine morosité jusque dans les tribunes entre huis-clos prononcés, gronde du public contre les joueurs et les dirigeants (à Nice et Bordeaux) et affluences en baisse dans les stades. En anticipant la mise en jeu des droits TV pour la période 2020-24 l’année dernière, la Ligue de football professionnel (LFP) a réalisé un coup de maître avec la barre du milliard d’euros franchie. L’homogénéité et la faible différence entre les équipes (et évidemment les stars du PSG) sont visiblement très vendeuses. 

Nicolas Couet avec FGe et NP