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"Marquer, c'est un clin d'œil à la vie": comment le grand frère de Nabil Bentaleb a vécu son grand retour, huit mois après un malaise cardiaque

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Victime d’un malaise cardiaque le 18 juin dernier, Nabil Bentaleb a rejoué au football dimanche et a même marqué lors de la victoire de Lille à Rennes (0-2) pendant la 22e journée de Ligue 1. Son frère Karim, auteur d'un massage cardiaque salvateur au moment de l'incident, a partagé pour RMC Sport l'émotion de toute la famille en le voyant sur le terrain avec les Dogues.

Il a sauvé son petit frère mais veut faire profil bas. Karim Bentaleb n’est pas d’un naturel très bavard. Il faut affûter ses arguments pour convaincre ce travailleur en bâtiment de sortir quelques instants de son silence. D’une voix posée, un café à la main, le grand frère de la famille a accepté de revenir sur les derniers mois vécus par son petit frère Nabil. L’international algérien a rejoué au football dimanche et a même marqué lors de la victoire du LOSC à Rennes (0-2).

Victime d’un malaise cardiaque le 18 juin dernier, Nabil Bentaleb a fait son grand retour à la compétition. L’ancien milieu de terrain de Tottenham possède désormais un défibrillateur sous-cutané, une première pour un joueur pro en France. Dans la conférence de presse d’avant-match, il avait évoqué la nature de la relation qu’il a avec son grand frère, qui lui a prodigué un massage cardiaque ce jour de juin. C’est au cœur du quartier Wazemmes à Lille, d’où est originaire la famille, que Karim Bentaleb évoque avec beaucoup de pudeur la trajectoire de son petit frère.

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Le Top de l'After Foot : l'histoire incroyable de Nabil Bentaleb – 16/02
3:07

Karim, quel est votre sentiment après ce jour qui restera important dans la vie de la famille Bentaleb?

C'est un jour un peu exceptionnel. On ne va pas dire un jour important, mais c'est une très bonne chose de faite après les étapes un peu en dents de scie depuis le 18 juin dernier. Aujourd'hui, on peut dire que c'est une bonne chose d'accomplie. Faire partie encore du voyage du LOSC, ça fait une belle petite chose à garder en mémoire.

Qu'est-ce que vous avez ressenti au moment où il rentre, au moment où il marque?

Le fait de rentrer pour nous, c'était déjà une bonne chose. Le fait d'être dans le groupe, c'était déjà un petit truc. Marquer, c'est un petit clin d'œil à la vie. Franchement, c'est difficile d'expliquer l'émotion. Il y avait de la joie, de la tristesse, un petit flashback de ce qui s'est passé. Il y avait un petit peu de tout ça qui se mélangeait, mais c'était vraiment un truc bien particulier, exceptionnel. Sur le but, je pense que je n'ai même pas réalisé. Je me suis juste dit que c'est mon frère qui a marqué. Je n'ai pas fait le moindre commentaire après.

Pour vous, c’était un but comme un autre?

Il en a marqué... Après, à Lille, c'est vrai qu'il n’en avait pas encore inscrit. En Ligue 1, le dernier but qu'il a mis en plus, clin d'œil au destin, c'était contre Rennes aussi avec Angers. Donc là, il marque là-bas. Un but important en plus, 0-0, il rentre. Comme disait un de mes potes, il n'est pas arrivé sur la pointe des pieds. Là, il est venu et on dirait que rien n'avait changé. Il a repris sa petite place. Il met son petit but et il rentre chez lui. Il part avec la victoire aussi, ça ne peut faire que plaisir.

"Si ça n'avait pas été le foot, ça aurait été le bâtiment."

Ces huit mois, comment est-ce que vous personnellement, comment la famille et les proches les ont vécus? Dans quel état d'esprit étiez-vous?

C'est long. Après, on était bien entourés. Ça s'est super bien passé. Il y a eu pas mal de hauts, de bas. Ce qui était dur, c’était l'attente, l'incertitude de se dire: 'bon, est-ce que ça va le faire, ça ne va pas le faire?' Médicalement, ça allait. Mais c'était juste par rapport au football. Dès le départ, on a nourri l'espoir qu'il reprenne le foot. Après diverses interrogations, on a nourri l'espoir qu'il reprenne et qu'il refasse ce qu'il aime le plus, en mode safe. Vraiment en mode secure. Et il a fait au jour le jour un travail qui a porté ses fruits.

Mais pour vous, ça n'a pas forcément changé grand-chose au quotidien, entre vous deux?

Non, c'est mon petit frère, je suis son grand-frère. On était proches avant ça, on l'est toujours. Pour nous, c'est quelque chose de normal. Comme il l'a dit, on a une relation pudique. Mais bon, c'est comme ça, c'est une relation de frères. On s'entend bien, on s'est toujours bien entendus. On est simple. Si ça n'avait pas été le foot, ça aurait été le bâtiment, ensemble, ça aurait été la même chose pour nous. Il n'y a rien de spécial.

Est-ce que vous pouvez revenir sur cette journée du 18 juin, raconter un petit peu ce five (un match sur terrain réduit où Nabil Bentaleb a fait son malaise cardiaque), ce moment-là?

Ce n'était pas un five déjà, c'était un 8 contre 8 entre potes. C'était en extérieur. Fin de journée, on a organisé une partie avec des potes, un petit 8 contre 8, vraiment détente. Le match n'avait même pas commencé. C'était vraiment deux ou trois minutes avant qu’on débute. Et puis, il est arrivé ce qui est arrivé. Après, c'est compliqué de rentrer dans les détails. Ce n'est pas trop intéressant, en vérité. Ce n'est pas que ce n'est pas intéressant, je sais que ça peut l’être pour certains. Mais pour nous, c'est de l'histoire ancienne. On retient, on le sait. Il a fait un malaise cardiaque. Les secours sont venus. Ils ont fait le job. Tout le monde a été là pour lui, du début à la fin. Que ce soient les pompiers, le SAMU, l'équipe de réanimation, l'équipe de cardio, les rythmologues, le LOSC, ses préparateurs physiques, son kiné, les médecins, des amis médecins qu'on connaît aussi, proches de la famille. Le président du LOSC aussi, exceptionnel.

"Le football c'est éphémère, on sait ce que ça vaut."

On a l’impression que beaucoup de monde a fait corps autour de lui. Vous a-t-il fait part de sa joie d’être très bien entouré pendant cette période?

Oui, exactement. Après, ce ne sont pas des choses qui se disent, c'est au feeling. Ça a été naturel. Du premier jour où ça s'est passé, jusqu'à ce qu'il sorte de l'hôpital, jusqu'à sa rééducation, jusqu'à hier. En fait, les gens ont été vachement bienveillants. Il y avait de la bienveillance, il y avait de la sympathie. Il y avait vraiment beaucoup de choses. Il n'y avait pas de business derrière. C'était vraiment, 'on aime bien Nabil, on est là parce qu'on le veut vraiment'. Ce n'est pas juste, 'c'est Nabil Bentaleb, c'est un joueur de foot, je veux faire partie du truc'. Non, Nabil, c'est quelqu'un de bien et tous ceux qui le connaissent, ils savent qui il est réellement. Tout le monde a été top et nous, on le savait. Moi, je le sais, peut-être que lui, il n'en a pas conscience, mais les gens l'apprécient, c'est naturel.

Est-ce que cette période peut renforcer sa force de caractère?

Il le dit lui-même, il a développé une force de caractère autre, dont lui-même ne savait pas qu'il en était capable. Il a un caractère bien trempé, il sait ce qu'il veut, fidèle à ses valeurs, à lui-même. Il est fidèle en famille et en amitié. En termes de caractère, oui, il a une personnalité bien tranchée. Il sait ce qu'il veut, il sait où il veut aller, il sait ce qu'il ne veut pas aussi. Il y a souvent une petite étiquette qui lui a été collée à la peau, involontairement et franchement de manière très déplacée. Aujourd'hui, c'est tout, les choses reviennent forcément à leur place avec le temps. Aujourd'hui, ça se fait bien, tout se goupille bien.

Même si Nabil a fait son retour sur le terrain, vous avez pris conscience qu’il y a bien plus important que cela?

Le football, c'est éphémère, on sait ce que ça vaut. Tout le monde peut penser 'footballeur, la réussite, l'argent, les strass, les paillettes, on a tout ce qu'on veut'. Non, ce n'est pas vrai, ça, c'est faux. Tout ça, c’est un plus. Il a des facilités dans la vie aujourd'hui en tant que footballeur, c'est normal. Après, voilà, c'est un bon footballeur, il est apprécié des gens. Maintenant, une carrière c'est 15 ans. 15 ans, quand on a une santé de fer, etc. Je pense qu'on sait où on est, on sait où on va. Bien sûr, le football, c'est éphémère. C'est un métier. Quand on a fini le métier, on fait autre chose.

Traverser ces événements a apaisé la famille Bentaleb?

On a toujours été un peu tranquille. On ne vit pas à 300 à l'heure. On est très tranquille. Regardez, on est aujourd'hui à Wazemmes (le quartier de Lille d’où est originaire la famille). Nabil, ça se trouve, dans une heure ou deux, il va être là. Il va boire son petit chocolat chaud avec ses enfants ou ses amis ici. C'est notre mode de vie. Maintenant, on a toujours été plus ou moins tranquille. Concernant cette situation, on l'a prise au jour le jour. On est croyants. On sait qu'il y a une force au-dessus de nous qui gère les choses. Si ça s'est passé comme ça, c'est que ça devait l'être. C'est tout.

Propos recueillis par Thomas Palmier