"Gérer les moments forts": Benarbia s'attend à "une bataille tactique" entre Luis Enrique et Guardiola lors de PSG-Manchester City

Ali Benarbia, comment appréhendez-vous ce PSG-Manchester City qui semble très indécis...
C’est un plaisir de voir ce match dans un très beau stade, le Parc des Princes. Avec deux équipes qui vont nous donner du plaisir et deux coachs qui veulent gagner par le jeu et non pas absolument gagner. On va avoir une bataille tactique je pense, technique aussi, parce qu’on a la chance d’avoir des joueurs exceptionnels. Mais alors le scénario, sincèrement, je ne peux pas vous le donner, dans le sens où moi j'aime ces deux clubs et ils sont pratiquement dans la même position. En championnat, c'est vrai que Paris se sent beaucoup mieux que Manchester City, même si ça va un peu mieux en ce moment.
En Ligue des Champions, c’est quand même différent...
Oui, Manchester City s’est posé beaucoup de questions dans les derniers matchs et Paris s'en pose toujours autant, dans le sens où ils courent après cette place en barrage. Ça va passer par des moments forts et surtout le fait de savoir qui va pouvoir gérer ces moments forts.
Comment vous jugez cette équipe de Manchester City?
On parlait de colonne vertébrale. Ils avaient l'habitude de jouer d'une certaine façon, qui pouvait leur permettre de s’exprimer. Vous avez quand même un ‘rock’ qui est Ruben Dias, souvent blessé. Vous avez le moteur de l'équipe qui est Rodri et le cerveau qui est De Bruyne. Dès que ces trois joueurs jouent sur le terrain, Manchester City gagne pratiquement tous ses matchs. Mais dès qu'il en manque un ou deux... Ces trois joueurs n'ont jamais été à 100%. Dias est en train de revenir. Dès que vous voyez que Dias revient, déjà défensivement ça ne prend pas de but, le patron est de retour. L'équipe change. Manchester City a besoin de ce trio pour que les autres puissent s'exprimer.
Êtes-vous toujours impressionné par les performances d'Erling Haaland?
Oui. Mais surtout, ce que je trouve très impressionnant, c’est de pouvoir jouer à Manchester City dans son rôle d’avant-centre. Avec une patience assez importante lorsque le ballon tourne sur le terrain sans pouvoir le toucher et de pouvoir finir les actions. C’est très dur, ça requiert une mentalité quand même exceptionnelle pour un attaquant comme Haaland.
Comment peut-on expliquer la mauvaise passe traversée par City ces derniers mois?
Je pense que pratiquement tous les clubs ont des trous. On le voit avec le Real Madrid où les gens disent c'est terminé et puis à la fin, ils remportent la Ligue des champions. On l'a vu avec Liverpool ou le Bayern Munich, qui normalement, au bout des championnats écrasait tout le monde. Après, il faut être dans un vestiaire pour comprendre les choses qui ne vont pas trop bien. Je pense que c’est en train de s’arranger et on va le voir ce soir (lors de PSG-City).
Quel regard portez-vous sur l'ère Luis Enrique au PSG?
Je ne parle que football, j’ai toujours parlé du terrain. Après la communication... Ce que tu dis ou ce que tu ne dis pas, c’est un travail pour protéger à la fois l’équipe et le club. Mais c’est un peu similaire de ce que fait Guardiola, avec des joueurs différents, avec un travail sur le long terme. Mais c’est ce qu’essaie de mettre en oeuvre le nouveau PSG avec ce coach. Oui, ça grince des dents, c’est dur et on souhaite que ça marche directement. Après les choix, est-ce que lui a une vision plus lointaine que la nôtre? J’espère. Ce n’est pas du 100% top et on le voit en Ligue des champions. Bien sûr, on dit qu’il manque la finition, mais je suis désolé, la finition dépend aussi du défenseur, du gardien, du milieu terrain et de l'attaquant. Ce n'est pas que l'attaquant. Quand on critique Manchester City parce que les buts n’arrivent pas, c'est toute une chaîne. Ce n'est pas que Haaland.
Le Paris Saint-Germain, c'est la même chose. Après, si on regarde l’effectif du PSG et le nombre de matchs joués, ce n’est pas évident dans cette compétition de pouvoir terminer les actions, pour faire la différence. Il faut un certain nombre de matchs pour pouvoir mettre la pression à l’adversaire et cette agressivité devant le but. Tu ne peux pas l’avoir avec très peu de matchs en Ligue des champions. On ne peut pas tout demander à une équipe qui est entourée de beaucoup de jeunes comme le PSG. Après, si tu arrives à conserver ses joueurs-là, dans trois, quatre ou cinq ans, c’est top. Malheureusement, au PSG on a besoin de résultats tout de suite et ce n’est pas évident. Luis Enrique fait un bon travail, il se trompe aussi parfois (...) Regardez Pep Guardiola, sur les sept-huit matchs sans victoire. Pourquoi il n’a pas rectifié? On peut aussi se poser des questions, même le meilleur peut se tromper. Luis Enrique est en train de mettre en place quelque chose. Peut-être que cette fois-ci on va avoir un peu plus de patience avec ce coach.
Comment le PSG peut faire vaciller Manchester City?
L’agressivité. La façon de se déplacer et la conservation du ballon qu’a le PSG est très bonne. Le PSG devra avoir de l’agressivité dans tous les domaines et pendant 90 minutes. Ca sera très difficile physiquement. Le PSG peut le faire. Il faut qu'ils nous sortent ce qui se fait de mieux en termes de pressing. La récupération est ce qu’adore Luis Enrique. C'est ce que fait aussi Guardiola à City. Qui va récupérer le plus vite le ballon et le plus haut, c'est ce qui fera la différence. Après, ça reste du football et il faut des buts. Le PSG est très bon en transition. On en revient à la base, qui va faire la différence en premier et comment va réagir l’adversaire.
Que pensez-vous du choix de Luis Enrique d'évoluer sans véritable n°9?
Moi, j'ai toujours eu besoin d'un attaquant. Alors jouer sans numéro 9 et sans numéro 10, ça ne me plait pas trop. Mais maintenant, quand tu vois la façon dont ils développent leur jeu, le fait de passer par les côtés, parce que de plus en plus de défenses sont très solides dans l'axe, ils ont raison. Il faut que tu arrives à trouver un attaquant qui soit assez patient pour être performant dans la moindre occasion ou dans le moindre centre et ça c'est très dur à trouver pour ces équipes-là. Guardiola m’avait posé une question: 'Tu serais content de jouer dans mon équipe?', bien évidemment, ce serait un plaisir. Quand tu as le ballon, tu as dix solutions, c’est beaucoup plus facile pour ne pas perdre le ballon.
Vous êtes venu ce mercredi au sein de la rédaction de RMC sport avec certains trophées de Manchester City, comme celui de la Premier League...
Ca m'impressionne tout le temps parce que je sais ce qu’il faut faire pour gagner un trophée, ce qu'il faut faire pour gagner un championnat. Moi, ça a été surtout les championnats. C’est toute une saison, c’est totalement différent d’une coupe. Par exemple, le PSG a mis la main sur la Ligue 1, mais avec cette nouvelle version de la Ligue des champions, ce n’est pas évident, c’est totalement différent. Il va falloir que le PSG bataille sur le long terme pour pouvoir aller jusqu'au bout.
Après avoir porté le maillot du PSG (1999-2001), vous avez évolué durant deux saisons à Manchester City (2001-2003). Quel est votre meilleur souvenir en Angleterre?
Alors c'est impressionnant, c'est mon premier match. Je suis à l'aéroport Charles de Gaulle, je dois prendre mon vol. Je manque le premier vol, je prends le deuxième, j'arrive à 11h et le match est à 12h30. C’est le fameux gros match contre Birmingham, sous un beau soleil. Kevin Keegan (l'entraîneur de City), qui est un ami désormais, m’a dit: 'Pour la première, tu es en retard. Allez, dépêche-toi'. Je suis rentré, j’ai fait mon match et j’ai eu la chance de faire une passe décisive. On gagne finalement 3-0. J'ai eu une standing ovation et j'ai été désigné homme du match. Je pense que ce que m'ont donné les fans lors de ce premier match a été essentiel pour la suite, ça m'a permis d’enchaîner deux saisons exceptionnelles à Manchester City.
Vous n’êtes resté que deux ans et pourtant les fans de City sont toujours très reconnaissants envers vous...
Exactement. Mais je pense qu'il s'est passé quelque chose. A cette période, Manchester City faisait beaucoup l’ascenseur entre la première et la deuxième division. Avec une manière de jouer un peu à l’anglaise. On va dire que j’ai préparé le Manchester City d’aujourd’hui. A certains moments, Kevin Keegan nous faisait confiance et on pouvait se retrouver avec trois numéros 10. Pour une équipe qui joue le maintien en Premier League ou le maintien en deuxième division, ce n’est pas du tout dans le style. Et ça a super bien fonctionné. J’ai aussi eu la chance d’être capitaine de City en Premier League. Depuis, City a enchaîné et le club n’est jamais redescendu.