Ligue des nations: pourquoi Israël joue ses matchs dans la zone Europe

La modeste Bozsik Arena et ses 8.200 places. C’est ici en Hongrie, privée de son capitaine Kylian Mbappé, laissé à la disposition du Real Madrid, mais aussi sans son ancien maître à jouer Antoine Griezmann, néo-retraité, que l’équipe de France s’apprête à ouvrir une nouvelle ère, ce jeudi. Dans le cadre de la Ligue des nations, elle a rendez-vous à 20h45 avec la modeste équipe d'Israël pour une rencontre délocalisée à Budapest en raison de la guerre au Proche-Orient. Depuis l'attaque du Hamas contre l'Etat hébreu le 7 octobre 2023 et la contre-offensive menée par l'armée israélienne dans la foulée dans la bande de Gaza, l'UEFA a interdit "jusqu'à nouvel ordre" l'organisation de matchs en Israël. C'est donc en Hongrie, dirigée par le Premier ministre Viktor Orban, soutien d'Israël, que la sélection nationale dispute toutes ses parties "à domicile".
En parallèle, une autre question peut se poser : pourquoi Israël et les clubs israéliens, à l'instar du Maccabi Tel-Aviv engagé cette saison en Ligue Europa, jouent leurs matchs pour le compte de la zone Europe ? Entre 1954 et le début des années 1970, le pays était membre de la confédération asiatique, et disputait les matchs organisés au sein de cette zone. Israël a même remporté la Coupe d’Asie des nations en 1964 avant de se qualifier pour la phase finale du Mondial 1970 au Mexique. Mais, en 1974, Israël a été exclu de toutes les fédérations sportives d’Asie et s’est même retrouvé contraint de disputer des matchs de la zone Océanie en raison du refus de plusieurs pays arabes de jouer contre des équipes israéliennes dont ils ne reconnaissent pas l'Etat.
Un tournant dans les années 1990
Il a fallu attendre le début des années 1990, après vingt ans de "nomadisme", pour voir l’Europe finalement intégrer Israël dans ses compétitions. "Géographiquement, Israël devrait appartenir à la zone Asie, ce qui a d'ailleurs été le cas dans le passé. Sauf que face aux refus de certains pays arabes d'évoluer face à Israël, il a été décidé de modifier les frontières des zones. Israël a rejoint les instances sportives européennes (à partir de 1994) afin de participer aux compétitions internationales. (…) Cela témoigne de la solidarité affichée par les pays occidentaux à l'égard d'Israël. L'idée de cette démarche est qu'il n'y ait pas de boycott important d'Israël dans la zone Asie", expliquait en 2015 Pascal Boniface, directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), auprès du magazine Le Point.
"Le meilleur exemple reste les qualifications à la Coupe du monde de 1958. La Turquie, l'Indonésie, l'Égypte et le Soudan avaient refusé de jouer contre Israël, qui remportait du coup tous ces matchs sur tapis vert. La Fifa a donc organisé à la dernière minute un match de barrage contre le pays de Galles qui s'est imposé. Plus tard, nombre de pays arabes ou musulmans ont refusé à nouveau de jouer face à Israël. D'une certaine façon, les instances ont jugé plus simple de basculer la sélection dans la zone Europe", ajoutait Pascal Boniface. Il y a une semaine, la Fifa a par ailleurs refusé de trancher sur la demande de suspension de la fédération israélienne de football émanant de son homologue palestinienne, quasiment un an jour pour jour un an après l’attaque du Hamas et le début de la guerre à Gaza.
En revanche, l’instance mondiale du football a annoncé son intention de lancer deux enquêtes qui doivent lui permettre de se décider. L’une porte sur l’accusation de "discrimination" portée par la fédération palestinienne ; la seconde sur "la participation à des compétitions israéliennes d’équipes de football israéliennes prétendument basées sur le territoire palestinien". Il s’agit de clubs qui évoluent en Cisjordanie dans des colonies israéliennes illégales. Lors du 74e Congrès de la Fifa en septembre, son patron, Gianni Infantino, avait refusé de mettre au vote les sanctions réclamées par la fédération palestinienne (PFA) contre son homologue israélienne (IFA). Il avait estimé que d’éventuelles sanctions devaient "être gérées" par l’exécutif de l’organisation.