JO 2021 (basket): pourquoi les Bleus peuvent croire en leurs chances contre Team USA en finale

Parce que la France a déjà battu Kevin Durant & Co
Jamais deux sans trois? Si la France aimerait voir cette expression prendre un tour concret, c’est bien dans le tournoi olympique de basket. Les deux dernières rencontres entre les Bleus et les Américains se sont en effet soldées par une victoire tricolore : la première en quart de finale de la Coupe du monde 2019 (89-79), la seconde au premier tour à Tokyo (83-76) derrière un Evan Fournier en feu (28 points). En confiance, le collectif français va s’attaquer à la montagne triple championne olympique en titre avec appétit et confiance.
"On va se préparer pour ce gros challenge, lançait le pivot Rudy Gobert après la victoire sur la Slovénie (90-89) en demie. On sait qu’on est capable de jouer cette équipe si on est tous focus." Le défi est le plus grand du basket international: battre Team USA pour l'or aux Jeux. Mais impossible n’est pas français, et encore moins maintenant…
"Rien n’est impossible, confirme la star du Utah Jazz. C’est un challenge de très haut niveau, oui, mais si on peut réussir à le surpasser, ça rendra la médaille encore plus belle. Quand j’ai commencé le basket, mon rêve était de battre les Etats-Unis en finale olympique. On l’a fait il y a deux ans au Mondial. Mais là, ce n’est pas pareil. C’est vraiment l’opportunité d’une vie. Il faut apprécier ces moments, c’est pour ça qu’on joue au basket." La motivation d’une médaille d’or sera forcément présente dans les têtes américaines. Mais elle sera peut-être encore plus grande dans celles des Français: rien ne serait plus beau que battre Team USA en finale des Jeux, un exploit qui deviendrait à jamais la plus belle page d’histoire du basket tricolore. Et quelque chose nous dit que Kevin Durant et ses potes ne rêvaient pas, eux, de battre la France en finale olympique quand ils étaient petits…
Parce qu’on les joue désormais les yeux dans les yeux
Qu’il semble loin le temps de 1992 où les adversaires prenaient les Américains en photo avant de les jouer. Qu’il semble loin le temps de 2000 où accrocher Team USA le plus longtemps possible en finale était déjà un exploit XXL. Qu’il semble loin le temps de 2012 où la grosse armada US nous mettait à plus de vingt-cinq points au premier tour (98-71). Avec la mondialisation de la NBA, et des joueurs venus des quatre coins de la planète qui s’y imposent (le MVP de cette saison était le Serbe Nikola Jokic, celui de la finale le Grec Giannis Antetokounmpo qui a mené les Milwaukee Bucks au titre), les stars locales de la grande ligue ne sont plus vues comme intouchables. Désormais, on les joue les yeux dans les yeux, sans trembler ni s’imaginer battus d’avance.
Avec un triple meilleur défenseur NBA et double All-Star (Rudy Gobert) qui n'a pas de réel équivalent dans l'effectif américain, un leader offensif qui tournait à près de vingt points de moyenne à Orlando ces dernières saisons (Evan Fournier, désormais aux New York Knicks après quelques mois aux Boston Celtics), un homme à tout faire très apprécié dans la ligue et auteur de "l’action de (s)a vie" en demie avec le contre décisif en fin de match (Nicolas Batum), l’un des meilleurs joueurs d’Euroligue des dernières saisons (et même de l’histoire, Nando De Colo) et plusieurs bons éléments de complément (Thomas Heurtel, Guerschon Yabusele, Vincent Poirier, Timothé Luwawu-Cabarrot), les hommes de Vincent Collet n’ont pas à rougir de l’opposition proposée aux Américains. Et ils comptent bien le leur prouver une nouvelle fois.
"On est déçu mais pas surpris car ce serait une sorte de mépris de l'équipe française, comme si nous étions censés les battre de trente points, avait expliqué Gregg Popovich, le coach US, après la défaite face aux Bleus en ouverture du tournoi. C'est une sacrée équipe, avec un grand staff technique, des joueurs talentueux dont certains évoluent en NBA. Je ne vois pas où on peut y voir une surprise. Ils ont juste mieux joué que nous."
Parce que Team USA n’est pas la plus belle machine collective… et n’aime pas les ballons FIBA
La défaite face aux Bleus au premier tour l’avait prouvé. Au-delà de leurs qualités individuelles, toujours affolantes, les Américains ont le désavantage de présenter un collectif pas très bien huilé. Avec une sélection montée presque plus sur les refus de certains que sur l’engagement des autres, la carrière NBA passant la plupart du temps au premier plan par rapport à l’équipe nationale (alors que le Slovène Luka Doncic avait par exemple expliqué qu’il préférerait gagner l’or olympique avec son pays que le titre NBA avec les Dallas Mavericks), trois joueurs arrivés la nuit précédant le premier match du tournoi (Jrue Holiday, Khris Middleton et Devin Booker, qui avaient tous les trois joué la finale NBA), difficile de trouver du liant commun en si peu de temps.
Meilleur marqueur en quart contre l’Espagne (29 points) et en demie contre l’Australie (23) et meilleur marqueur de son équipe tout court (19 par match en moyenne), Kevin Durant monte en puissance et fait peur tant son talent est aussi grand que ses bras sont longs. La star des Brooklyn Nets est bien épaulée par Jayson Tatum, treizième meilleur marqueur du tournoi pour l’instant (14,4 points par match), Holiday, Booker et Damian Lillard. Mais la réalité dessine une évidence: le temps où Team USA pouvait mettre des joueurs NBA et s’attendre à tout exploser sur son passage est révolu. La preuve en quart comme en demie où Espagnols et Australiens ont plus que bousculé les favoris avant de voir la machine se mettre en route. "C’est un peu de l’orgueil de penser qu’on peut juste sortir la balle et gagner", confirmait coach Popovich après la défaite face aux Bleus au premier tour.
Construire un collectif ne se fait pas en claquant des doigts. Seuls deux joueurs US étaient déjà là lors de la Coupe du monde 2019, Middleton et Taytum, contre sept du côté français, où Vincent Collet tient les rênes de l’équipe depuis 2009 alors que "Pop" (assistant aux Jeux en 2004, où Team USA avait seulement pris le bronze, sortie par l'Argentine en demie) a pris les commandes après les JO 2016. "Beaucoup de ces équipes jouent ensemble depuis cinq-dix ans, rappelait Draymond Green, le joueur des Golden State Warriors, après le revers initial contre les Français. La cohérence et la continuité dans leur façon d’attaquer, la familiarité qui existe entre eux: ce sont des choses que nous ne pourrons jamais remplacer."
Dernier point positif: le ballon des compétitions FIBA. S’il est de la même taille que dans la ligue US, la marque qui le fabrique est différente et la sensation de toucher aussi, que ce soit au dribble, à la passe ou au tir. Avec des joueurs habitués à un style de plus en plus tourné vers le tir primé et un manque de préparation, l’adaptation n’est pas toujours la plus évidente. "C’est un des plus gros ajustements à faire, expliquait Holiday après la défaite contre la France en ouverture du tournoi. Car nous devons le mettre dans le panier." Team USA s’est depuis familiarisé avec. Mais si ça peut leur permettre de rater quelques tirs qui seraient peut-être rentrés avec le cuir NBA, on ne va pas s’en plaindre.