
JO 2021: tennis-ballon, Marseillaise, urinoir porte-bonheur, les fleurettistes français savourent
Il s’en va par la plus grande des portes. Une porte en or massif. Pour la dernière compétition de sa carrière, Erwann Le Péchoux a décroché la médaille d’or en compagnie de l’équipe de France de fleuret, ce dimanche aux Jeux olympiques 2021. De quoi donner un large sourire à l’escrimeur de 39 ans, sur son petit nuage à Tokyo.
"J’ai savouré le moment passé sur la piste avec les gars. J’ai savoure notre journée, qui a été dure mais incroyable. Par contre, je ne réalise pas encore qu’on est champions olympiques, explique-il. Il va falloir encore quelques jours pour ça. Je réalise qu’on a été incroyables tous les quatre, soudés, unis. Ils m’ont offert un beau cadeau pour ma dernière. Il y a eu pleins de mots et pleins d’émotions, c’est ce que je retiens aujourd’hui. Ce n’est pas forcément la victoire, c’est surtout le soutien des gars."
Des gars qui se sont battus ensemble, les uns pour les autres, afin de surclasser la Russie lors d’une finale à sens unique (45-28). Hitoire d'offrir à l’escrime française une cinquième médaille au Japon (dont deux en or). "Cette équipe s’est bâtie sur des années, raconte Enzo Lefort. Je passe plus de temps avec ces gars-là qu’avec ma famille. Je les vois le matin, l’après-midi. Parfois, on déjeune ensemble. On fait des trucs en dehors de l’Insep, où on s’entraîne. Quand on part en compétition, on est en chambre ensemble. On découvre des villes ensemble. On vit ensemble et c’est ce qui fait notre différence avec les autres nations. On n’est pas juste une addition d’individualités. On est un collectif. On connaît nos forces et nos faiblesses. Il y a des trucs qu’on ne peut pas expliquer."
"Le coach du Japon a changé d'urinoir"
Maxime Pauty, le remplaçant du groupe (qui n’a pas combattu en finale), livre tout de même une anecdote amusante sur cette vie collective. "Je gère le côté superstitieux, c’est moi qui m’occupe du karma, témoigne-t-il. Lorsque je vais aux toilettes, depuis le début de la journée, je vais au même urinoir. Il y en a trois, je choisis celui du milieu, comme la première marche du podium. Mais avant la finale, je suis arrivé pour pisser et tous les urinoirs étaient libres sauf le mien. C’était le coach du Japon. Je me suis arrêté et j’ai attendu. Et là il m’a fait: ‘mais qu’est-ce qu’il se passe?’. Et je lui ai dit: ‘c’est mon urinoir, je suis superstitieux’. Il n’avait pas commencé, du coup, il a changé et il m’a laissé l’urinoir. C’est grâce à ça qu’on a gagné (sourire)."
Au-delà de ce petit rituel, les Français se sont aussi distingués par leur décontraction durant cette journée historique. "On s’est échauffés avec un tennis-ballon avant la finale, s’amuse Lefort. Les Russes faisaient des étirements, ils avaient leur routine. Et nous, on faisait un tennis-ballon. C’est aussi ça qui caractérise cette équipe, c’est le fun. On s’amuse, on prend du plaisir ensemble."
"J'ai chanté faux pendant la Marseillaise"
"Ça fait cinq ans qu’il n’y a pas de compétition. On a su créer des choses à l’entraînement pour garder cette motivation et cette force d’équipe, appuie Julien Mertine. Ça paye. Les émotions sont là. J’ai pleuré pendant la Marseillaise et du coup, j’ai chanté faux." Le Péchoux a lui aussi été envahi par l'émotion durant les hymnes: "C’’était un beau moment de voir le drapeau comme ça. Je garde de très mauvais souvenirs de Rio, malgré la médaille. Ça a été très dur pour moi émotionnellement. Du coup, là j’ai vraiment savouré de voir le drapeau au-dessus des autres. C’était une fierté, ça m’a fait du bien."
En battant les Russes, les Bleus se sont effectivement offert une revanche étincelante après leur finale perdue à Rio il y a cinq ans. "Ça trottait dans la tête de tout le monde, reconnaît Lefort. C’est ce qui a fait qu’on a été aussi rigoureux. N’importe quelle touche pouvait nous mettre en danger. On ne voulait leur donner aucune touche facile. On a tiré comme des morts de faim. On ne leur a laissé aucune touche facile. C’est pour ça qu’il y a un tel écart. Cette déconvenue de Rio nous a donné un supplément d’âme."