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JO 2022: Big Air, slopestyle, halfpipe, mais comment on note le ski freestyle?

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Dernières née des épreuves de "ski acrobatique", le Big Air a rejoint le halfpipe et le slopestyle dans la sous-catégorie "ski freestyle" des Jeux d’hiver. Double médaillée olympique sur le pipe, Marie Martinod nous explique les critères de notation de ces disciplines pas toujours faciles à comprendre pour le grand public. Avec quatre grands critères au programme.

Ils sont désormais bien installés dans le panorama des sports d’hiver. Mais pour le grand public, leur compréhension reste encore limitée. Comment se notent les trois plus jeunes épreuves du "ski acrobatique", nom officiel de cette catégorie même si on lui préférera ski freestyle pour les disciplines dont on parle (réunies sous l’appellation "freeski"), à savoir le halfpipe, le slopestyle et le Big Air (les deux premières sont arrivés au programme des Jeux en 2014, la troisième cette année), dont vous retrouverez le fonctionnement en encadré au bas de cet article? Double médaillée d’argent olympique en halfpipe, à Sotchi en 2014 et à Pyeongchang en 2018, Marie Martinod est un témoin parfait pour vulgariser tout ça.

"Le ski freestyle est noté de la même manière sur toutes les épreuves, explique la membre de la Dream Team RMC Sport qui sera présente à Pékin. Il y a quatre critères. Il y a l’amplitude, la hauteur donc. Par exemple, dans le pipe, c’est à quel point tu montes haut au-dessus du coping (la limite de neige du halfpipe, ndlr) et de manière régulière. Ce n’est pas que sur un saut, c’est du haut jusqu’en bas du parcours. En slopestyle, c’est pareil, c’est l’amplitude sur les sauts, tout comme en Big Air. C’est vraiment la jolie parabole que tu vas faire, te servir correctement du kicker (le tremplin de neige pour le saut, ndlr) pour avoir une jolie parabole qui remonte et qui redescend." Il faut aller haut, donc. Mais pas que.

Amplitude, style, propreté, difficulté

"Il y a aussi une note sur le style, reprend Marie Martinod. On va apprécier la façon dont tu vas graber (attraper avec la main, ndlr) tes skis, si c’est de la bonne manière. Plus tu vas graber longtemps, du début à la fin de ta figure, plus ce sera apprécié. Si tu viens juste toucher ton ski et que tu le lâches tout de suite, ce n’est pas suffisant. La variété des grabs va jouer aussi si on rentre dans le détail. Ce n’est pas pénalisant si tu ne le fais pas mais si tu fais un run super et que ton pote canadien fait le même run mais qu’il a mis plus de variété dans ses grabs, ils vont aller chercher sur ce genre de détails pour vous départager et lui donner l’avantage. Bref, si tu fais des grabs différents, c’est forcément mieux."

Et l’ancienne double médaillée d’or aux X-Games, une fois à Tignes, une autre à Aspen, de poursuivre: "Le troisième critère est la propreté, c’est-à-dire dans tes réceptions, ce qu’on appelle le landing. Quand tu reposes tes figures, quelles qu’elles soient, il faut que ce soit bien propre, les deux skis bien parallèles, que ça ne te fasse pas te casser en deux car il y a un impact trop fort. On va chercher la fluidité dans la réception. C’est hyper important. Par exemple, il ne faut pas une main qui touche le sol sur un landing. Dans un run de pipe, par exemple, une petite main qui touche voire effleure le sol peut coûter 10 points sur les 100. C’est complètement rédhibitoire. C’est très frustrant et pour les gens qui ne connaissent pas et qui regardent, ça peut être assez surprenant et même incompréhensible car tu vas voir un run magnifique mais tu n’as pas fait gaffe qu’il y a une petite main qui a touché le sol sur le dernier saut et tu ne vas pas comprendre pourquoi la personne est autant pénalisée. Rater un grab, ce qui se voit bien au ralenti, est aussi une catastrophe. Tu sais que ton run ne passera pas si c’est pour aller des qualifs en finale ou pour monter sur un podium."

On arrive au dernier critère. "Evidemment, c’est la difficulté, détaille notre consultante, le nombre de tours que tu fais en l’air, si c’est un double ou un triple, si tu arrives en arrière (en switch, ndlr) ou de face. Toutes ces choses-là comptent dans la note de difficulté." Au-delà de ces points de notation, ces épreuves ont également la particularité de s’apprécier sur une vue d’ensemble.

Cavet: "Pas de programme annoncé"

Sur les bosses, le feeling a aussi son importance. "Il n'y a pas de programme annoncé, je peux changer d'avis au dernier moment, nous précise Benjamin Cavet à propos du ski de bosses, épreuve sur laquelle il a terminé quatrième. La notation c'est 60% de ski, avec l'équilibration (sic), les genoux bien collés, les bras stables. Après il y a 20% pour les deux sauts et les 20 restants pour la vitesse. Chaque saut a un degré de difficulté."

"Ce qui est intéressant et qui plaît aux puristes mais qui embête ceux qui aiment par exemple le patinage artistique, c’est qu’il n’y pas de coefficient de difficulté, précise Marie Martinod. Il y a une appréciation qui se fait au global. On y tient car ça reste une discipline où les juges doivent avoir un ressenti général sur le run. Il y a un côté sensibilité devant ce que tu vois, il faut que le run ‘claque’. Pour plus de visibilité du grand public, on a quand même critérisé tout ça et je pense que ce sera aussi le cas aux Jeux mais par exemple sur les Coupes du monde les quatre critères dont on parle sont visibles sur l’écran à la fin du run. Il y a un synthé exprès et on s’en rend bien compte. C’est de la pédagogie pour que le grand public comprenne. Mais le freestyle reste du freestyle. En saut acrobatique ou en ski de bosses, un backflip n’a pas le même coefficient multiplicateur qu’un 360°. Nous, on n’est pas du tout dans ces rapports-là. Il n’y a pas de coefficient de difficulté."

Avec tout ça, le Big Air semble le plus facile à décrypter pour le grand public avec chaque athlète qui fait un saut chacun à son tour (trois tentatives en finale et non une session de 20 à 30 minutes avec le plus de sauts possibles comme ça se fait lors des X-Games sur ESPN dans une logique de programmes plus courts pour mieux satisfaire les téléspectateurs). "On a un ralenti sur un seul saut, il est décortiqué et avec un bon consultant, tu vas vite comprendre ce qui s’est passé et te faire une idée, appuie notre consyltante. Il y a aussi des axes de rotation que tu vas trouver beaux et d’autres qui vont moins te plaire. Tu ne sais pas forcément pourquoi, en tout cas le grand public, mais tu vas vite le comprendre en suivant un Big Air. C’est plus simple et plus lisible." Vous êtes désormais prêts pour noter le ski freestyle depuis votre canapé.

Slopestyle halfpipe, Big Air: tout comprendre aux épreuves de ski freestyle

Slopestyle: Les skieurs descendent une piste avec des tremplins, des bosses et des rampes de métal et effectuent des figures acrobatiques sous les yeux de juges qui en évaluent le style et la qualité en fonction de leur difficulté et de leur variété. A l'issue des deux manches de qualifications, seuls les meilleurs vont en finale (trois autres manches).

Halfpipe: Dans un demi-cylindre en pente dont les parois font près de 7 mètres de haut, les compétiteurs enchaînent les figures acrobatiques en passant d'une paroi à l'autre. Leur passage est noté par des juges qui évaluent l'exécution, l'amplitude, la difficulté et les enchaînements. Après deux manches de qualifications, les meilleurs en disputent trois autres lors de la finale. Le meilleur de leurs deux scores est retenu.

Big Air: après s'être élancés du haut d'un tremplin géant, les concurrents effectuent un saut jugé sur l'amplitude, la difficulté, la créativité et l'exécution des figures, ainsi que sur la qualité de la réception. Seul le meilleur score des deux sauts est retenu en qualifications. Les concurrents qualifiés en finale ont trois nouvelles tentatives, dont les deux meilleures sont prises en compte.

Alexandre Herbinet