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JO 2022: l'histoire folle de Benjamin Alexander, ancien DJ et premier skieur alpin pour la Jamaïque aux Jeux d'hiver

Né d'un père jamaïcain et d'une mère anglaise, Benjamin Alexander (38 ans) deviendra à Pékin le premier athlète à porter les couleurs de la Jamaïque lors d'une épreuve de ski alpin aux Jeux olympiques d'hiver. Une consécration pour cet ancien DJ et mannequin reconverti dans la haute finance et qui a découvert le ski en 2015.

Difficile de ne pas y voir un joli remake de Rasta Rockett. Version ski, cette fois. Comme la première équipe jamaïcaine de bobsleigh, dont l'épopée aux Jeux de Calgary en 1988 avait inspiré le cinéma, Benjamin Alexander aura peut-être droit à son film dans quelques années. A 38 ans, il vient de décrocher son billet pour Pékin. Dans moins d'un mois, il deviendra le premier athlète à représenter la Jamaïque lors d'une épreuve de ski alpin aux Jeux olympiques d'hiver. La consécration d'un parcours hors normes.

Né d'un père jamaïcain et d'une mère anglaise, élevé près de Northampton (centre de l'Angleterre), il n'était pas vraiment promis à un destin olympique. C'est même sur un coup de tête qu'il s'est mis à skier lors de vacances au Canada en 2015. Un déclic.

Désert, Ibiza et haute finance

"Je me souviens très bien de la première fois où je suis sorti skier sans moniteur. Je suis tombé 27 fois en une seule descente. Mais je me suis dit, bon, c'est juste le début. Si la prochaine fois je réussis à tomber moins de 27 fois, ce sera déjà un progrès. Et c'est ce qui s'est passé", racontait-il en décembre à l'AFP. Le ski est alors devenu pour lui une obsession. Comme s'il avait trouvé un nouveau sens à sa vie. Elève brillant, il a d'abord étudié la physique puis l'ingénierie dans une prestigieuse université londonienne. Avant de percer dans des domaines aussi distincts que la musique et la finance. Comme DJ, sa renommée a largement dépassé les frontières du Royaume-Uni. Il a enchaîné en quelques années les plus gros festivals. Des plages les plus prisées d'Ibiza au célèbre Burning Man dans le désert du Nevada.

C'est ensuite dans le mannequinat qu'il s'est fait un nom. Et puis il s'est lancé dans la haute finance en s'installant à Hong Kong. Un secteur dans lequel travaille toujours celui qui a voyagé dans plus de soixante pays. Pour son dernier défi en date, qu'il s'est véritablement lancé après avoir assisté aux JO d'hiver 2018 en Corée du Sud, il a su convaincre des sponsors de l'épauler et n'a pas compté ses efforts. Ce bourreau de travail, qui n'a pas d'entraîneur à temps plein, affirme avoir skié plus de 450 jours au cours des deux dernières années. Encore fallait-il atteindre le niveau suffisant pour gagner sa place pour les Jeux. C'est ce qu'il a réussi à faire mercredi lors d'une compétition au Liechtenstein en cochant le critère qualificatif pour Pékin, à savoir passer sous un seuil de points fixé par la Fédération internationale de ski, comme le rapporte The Guardian.

"Des choses folles peuvent arriver"

"Le Comité international olympique souhaite avoir le plus de nations possible représentées aux JO. Ils permettent à chaque nation de proposer un athlète féminin et un athlète masculin dans chaque discipline selon certains critères. Si vous allez sur le site de la Fédération internationale de ski, vous verrez que je suis le meilleur skieur jamaïcain. Cela ne veut pas dire grand chose. Si vous regardez le classement, je pense que je suis à la 3748e place mondiale en slalom géant. Suis-je meilleur que le skieur moyen ? Bon sang, bien meilleur. Suis-je meilleur qu'un enfant autrichien qui skie depuis l'âge de deux ans, qui fait de la course depuis l'âge de sept ans et qui a maintenant 14 ans ? Non, ce jeune est probablement bien meilleur que moi", confiait-il ce mois-ci à Eurosport. Benjamin Alexander est lucide. Il sait qu'il n'a aucune chance de rivaliser avec l'élite mondiale du ski alpin. Mais ce n'est pas ce qui compte à ses yeux.

"Je suis parti avec un plan fou, qui semblait fou pour la plupart des gens, mais je pensais que c'était tout à fait réalisable. Ce qui était fou, c'était d'exécuter ce plan sous la contrainte de la pandémie. C'est un rêve fou devenu réalité. Mon but est d'assister à la cérémonie d'ouverture, passer bon moment et montrer aux autres Jamaïcains, aux autres minorités, à d'autres personnes qui n'ont pas commencé à skier à l'âge de deux ans, que des choses folles peuvent arriver et que les rêves peuvent devenir réalité", expliquait-il à Eurosport. Sept ans après avoir dévalé sa première piste verte, Benjamin Alexander s'apprête à devenir le 15e athlète à concourir pour la Jamaïque aux Jeux olympiques d'hiver.

https://twitter.com/rodolpheryo Rodolphe Ryo Journaliste RMC Sport