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JO 2022: "Mon statut a changé", admet Laffont, qui ne veut pas (encore) entendre parler de médaille

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Ce jeudi, le ski de bosses fera son entrée sur la piste des Jeux olympiques 2022 avec les premiers sauts de Perrine Laffont, championne olympique en 2018 et favorite cette année, à Pékin. L'Ariégeoise s'est confiée à RMC Sport avant ses grands débuts.

Perrine Laffont est prête. Prête jusqu’au bout des ongles, qu’elle a peints en bleu blanc et rouge. "J’ai même emmené le vernis doré en plus! Pourquoi pas après la course…", rigole la championne olympique en titre des bosses, quand on lui fait remarquer qu’il manque la couleur d’une médaille au bout de ses doigts.

A 23 ans, l’Ariégeoise, qui a réalisé une saison 2020-2021 quasi parfaite après avoir traversé une grosse période de doutes et même pensé à mettre un terme à sa carrière, s’est dite "plutôt tranquille" à la veille de son entrée en lice jeudi (11h, heure française) sur les qualifications (finales dimanche).

Perrine Laffont, ce sont vos 3es Jeux olympiques mais les premiers dans cette situation de favorite et de tête d’affiche de la délégation tricolore. Comment gérez-vous ce nouveau statut?

Je me sens plutôt bien. Avant le départ en France il y a eu pas mal de demandes, mais là je me suis mis dans une petite bulle, j’ai coupé mon téléphone et les réseaux sociaux. Je me sens tranquille et sans avoir l’impression d’avoir tous les regards braqués sur moi ce qui fait que je suis plutôt bien je me concentre sur ce que j’ai à faire sur la piste et le reste c’est secondaire.

Avec quels objectifs en tête allez-vous attaquer ces JO?

Ouh là… On en est loin avant de parler de médaille, il faut passer les qualifications et les finales. Je ne me concentre pas trop sur le résultat parce que je ne le maîtrise pas. Il y a d’autres filles, des juges qui vont noter ma performance aussi. Moi je vais faire le job que j’ai à faire sur la piste et on verra bien où ça nous emmène. C’est sûr que mon statut a changé , mais je reste la même skieuse. Et moi je suis là pour faire du ski, pour la performance technique. Tout ce qu’il y a autour, ça ne me concerne pas. Je ne sais pas (elle rigole)... Oui, c’est sûr que si je repars avec une médaille ce serait forcément mieux, et je serai forcément plus contente que si je n’en ai pas, mais ça reste une course d’un jour. Je vais tout donner en tout cas pour faire une très, très belle course.

Quel regard posez-vous sur le chemin parcouru depuis Pyeongchang?

J’y repense souvent. Parce que c’est passé vite. Franchement, j’ai l’impression que c’était la semaine dernière. Quand on arrive aux Jeux, on se dit que c’est quatre ans de travail acharné qui sont passés. Le fait de se retrouver quatre ans plus tard sur le devant de la scène, en position de pouvoir prétendre à un bon résultat, c’est satisfaisant. Cela fait quatre ans que je joue sur le top de mon sport. Et réussir à tenir sur la longueur, c’est déjà une belle satisfaction.

Quatre ans de remise en cause et de doutes aussi, tout de même…

J'ai eu envie d'arrêter ma carrière, donc de se retrouver là deux ans plus tard, avec le sourire, et toujours motivée à l'idée de faire des belles choses sur la piste, le tout en ayant progressé, c’est une petite victoire aussi.

Quand on a presque tout gagné, comment garde-t-on la motivation?

Par l’amour du sport et en essayant de se construire un quotidien et un cocon autour de moi qui fait que je me sens bien. Que je ne ressens pas la pression des résultats, l’attente qu’il peut y avoir autour de moi. Parce que ce sont des choses qui inhibent, et me retirent mon plaisir de skier. J’ai plus l’impression de skier parce qu’il y a des gens derrière moi, et pas par choix personnel. Je suis là parce que j’ai envie d’être là, et j’essaye justement de couper avec tout ce qu’il y a autour. Parce que je ne fais pas du ski pour les médias et ce qu’il y a autour. Je fais du ski parce que j’aime skier, parce que je suis contente de voyager et de faire des Jeux olympiques.

Comment voyez-vous l’atmosphère, assez curieuse de ces JO en raison des mesures anti Covid?

C’est vrai que ça fait assez bizarre, par rapport à ce que j’ai connu sur mes précédents Jeux. (Des agents en combinaison intégrale passent à ce moment-là) Quand on voit des gens comme ça, masqués, avec carrément du scotch autour des masques, ça fait un peu bizarre ! Mais je dirais que c’est rassurant aussi, parce que vu le contexte et le covid qui circule beaucoup, on se sent en sécurité. La Chine a mis les moyens pour bien protéger les athlètes, et c’est vrai que c’est différent. Mais ça fait deux ans que ça dure, donc on était un peu préparé!

Vous allez évoluer sur un site où il fait très froid et avec du vent, sont-ce des éléments qui peuvent perturber?

Pour le froid on écourte un peu les séances. Cela a un impact sur le corps mais ça va, le froid, on a l’habitude. Ce qui est un peu plus gênant, c’est le vent en haut de la piste sur le premier saut. Quand il souffle très fort, sur le saut, ça nous décale carrément. Le vent décale la trajectoire et c’est ce qui est le plus pénible à gérer. La neige artificielle, c’est différent de ce que l’on peut avoir habituellement. C’est une neige qui est très très abrasive, et elle réagit différemment sous le ski. Cela nécessite un peu d’adaptation. Depuis 2017, on a des coupes du monde en Chine pas très loin d’ici, et on savait que ce serait comme ça. C’est bizarre, mais on s’adapte.

Julien Richard