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Judo: les judokas à suivre lors des Mondiaux

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Les championnats du monde de judo s’ouvrent ce dimanche à Doha et se termineront dimanche prochain avec l’épreuve par équipes. Ce rendez-vous placé pour la première fois en mai, dans un pays pas fou de judo, est crucial dans le chemin vers Paris 2024. Focus sur les judokas qui pourraient briller et qui présenteront de sérieuses menaces pour les Français.

• Naohisa Takato (Japon) -60kg

Dimanche soir, au bout de la première journée des Mondiaux, Naohisa Takato laissera peut-être Shozo Fujii, Yasuhiro Yamashita et Naoya Ogawa dans le rétroviseur. Le champion olympique des moins de 60 kilos pourrait avoir cinq sacres mondiaux et devenir le masculin nippon le plus titré lors d’un Mondial (Ryoko Tamura a sept titres chez les femmes). Le fantasque Takato n’a plus été aperçu en compétition depuis son 4e succès planétaire à Tashkent (Ouzbékistan) en octobre dernier. Il s’était imposé largement, éblouissant la compétition de ses petits fauchages intérieurs (ko uchi-gari). Il aurait dû combattre au tournoi de Paris mais une vilaine blessure à un doigt l’a laissé sur la touche jusqu’à ce rendez-vous de Doha. "Aussi longtemps que je n’ai pas d’accident je suis sûr de l’emporter", a affirmé Takato au site Ejudo. Confiant ? Arrogant ? Un succès à Doha le placerait idéalement pour conquérir un deuxième titre olympique un an plus tard à Paris.

• Miku Takaichi (Japon) -63kg

C’est un retour en force, plein de résilience. Aux JO 2020, Miku Tashiro est appuyée sur un pilier du Budokan. Elle pleure de chaudes larmes. Elle était attendue sur le podium. Dès le deuxième tour, la Polonaise l’envoie sur le dos. Tashiro est la seule Japonaise à terminer ces JO à la maison sans médaille individuelle. Magnifique adversaire de Clarisse Agbégnénou dans la finale mondiale 2019 lors d’un combat de 11 minutes, la Japonaise a pris beaucoup de temps pour se relancer. Guérir son mental, son épaule, et se marier avec le moins de 66 kilos Kengo Takaichi. La moins de 63 kilos va repasser par toutes les étapes nationales pour retrouver l’équipe japonaise. Coupe du Kodokan, tournoi de Tokyo, Masters, elle a tout gagné et se présente en candidate sérieuse pour l’or. Clarisse Agbégnénou a hâte de la retrouver: "C’est avec ces filles comme ça qu’on augmente notre niveau. C’est grâce à ce genre de fille qu’on fait bien parler du judo."

• Lucy Renshall (Grande-Bretagne) -63kg

Clarisse Agbégnénou en mode pouponnage avec sa petite Athéna les choses ont énormément remué dans la catégorie des moins de 63 kilos. La numéro 1 mondiale est Britannique et s’appelle Lucy Renshall. Elle n’a pourtant aucune médaille continentale et mondiale senior à afficher dans l’armoire. Grâce à un classement qui favorise les stakhanovistes des tournois, Renshall s’est installée au sommet. Régulière sur les compétitions intermédiaires, elle bloque encore à l’étage supérieur. Elle s’appuie sur un judo de droitière avec une garde haute et, c’est la force des Britanniques depuis plusieurs saisons, un ne-waza de grande qualité. En 2021 lors du Masters, à Doha, terre de ces Mondiaux 2023, elle avait été emportée par la tornade Clarisse Agbégnénou sur un contre (ura-nage), en route vers le titre olympique six mois plus tard à Tokyo. La Française n’a jamais perdu contre Renshall en trois confrontations. Est-ce que la Britannique brisera son plafond de verre ?

• Tato Grigalashvili (Georgie) -81kg

Depuis sa 5e place aux Jeux Olympiques 2020, le Géorgien aux bouclettes brunes n’a laissé échapper que quatre petits combats dont un face au Français Alpha Oumar Djalo. Au passage, Tato a glané titre européen, mondial et Masters. L’an dernier, en finale des Mondiaux, il a livré l’un des plus beaux combats de l’histoire face au Belge Matthias Casse. Un défi ébouriffant où les deux adversaires se sont rendus technique pour technique. C’est finalement l’homme de l’Est qui l’a emporté. Grigalashvili est aussi à l’aise dans le plus pur style géorgien des arrachés que sur des mouvements plus classiques comme ses redoutables seoi-nage (mouvement d’épaule). Grigalashvili a passé une année en France à Grand-Quevilly lorsqu’il avait 13 ans, dans le club du médaillé olympique Ugo Legrand, de son frère Paco et de leur père Rodolphe. Il lui en est resté quelques petits mots de notre langue. A Doha, il devra livrer bataille dans une catégorie de monstres où se trouve l’Azerbaïdjanais Mollaei, le Belge Casse, le Japonais Nagase ou encore le Français Alpha Djalo. On en salive déjà.

• Alice Bellandi (Italie) -78kg

L'Italie est la nation qui monte depuis plusieurs saisons. Ses générations se succèdent avec à chaque couvée plusieurs judokas de très haut niveau. A Rio en 2016, c’est le tout frais Fabio Basile qui avait surpris son monde en allant prendre l’or olympique en moins de 66 kilos. Depuis quelques années, on se régale avec Manuel Lombardo (-73kg), Christian Parlati (-90kg) ou Odette Giuffrida (-52kg). Mais la mieux placée, c'est Alice Bellandi. Numéro une mondiale des moins de 78 kilos, la judoka de Brescia brille en tournoi et vient de terminer troisième du dernier championnat d’Europe, sa première médaille dans une grande compétition. Depuis deux ans, elle tourne à plus de 80% de victoires. Elle a battu les Françaises Madeleine Malonga, Audrey Tcheuméo, Fanny-Estelle Posvite et la Japonaise Shori Hamada, championne olympique. La Squadra coachée par Francesco Bruyère semble tailler pour réaliser un gros coup à Paris. Alice au pays des merveilles dans un an au Grand Palais éphémères ?

• Alisher Yusupov (Ouzbékistan) + 100kg

Qui peut dire "j’ai placé un arraché à Teddy Riner et je l’ai fait tomber"? L’Ouzbek peut lever la main. Début février dans un Bercy rempli à ras bord, il a placé ses deux mains autour de la taille du Français de 150 kilos et l’a retourné dans un mouvement de type ura-nage. La marque (waza-ari) sera finalement annulée pour saisie illégale mais rares sont ceux à avoir fait parcourir un tel frisson dans la maison du triple champion olympique. Il finira par s’incliner. Le longiligne de 24 ans est deuxième mondial des plus de 100 kilos. Depuis l’automne, il ne manque pas un podium. Il a battu les deux derniers finalistes mondiaux, le Cubain Granda et le Japonais Saito. Porté par l’excellente dynamique de l’équipe coachée par Ilias Iliadis, deux titres mondiaux à la maison l’an passé, Yusupov pourrait raviver le souvenir d’Abdullo Tangriev, dernier ouzbek médaillé olympique en lourds (2e en 2008). Ce dernier avait réussi à écarter Teddy Riner ce jour-là.

Morgan Maury