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Mondiaux de judo: l'équation Abe résiste encore à une Buchard en bronze

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Amandine Buchard est allée chercher une quatrième médaille de bronze mondiale ce lundi à Doha. Pas dans un grand jour, la judoka du PSG Judo a toujours trouvé la solution. Sauf face à la Japonaise Uta Abe qui la bat pour une 8e fois en 9 confrontations.

Le frisson a parcouru le clan japonais et fait se lever les supporters français, lundi aux Championnats du monde de judo, à Doha. A 25 secondes de la fin d’un quart de finale qu’elle a traversé sans vraiment être actrice, Amandine Buchard a frôlé le casse en faisant tomber Uta Abe sur son kata-guruma (roue autour des épaules). Il s’en est fallu de quelques degrés et d’un genou vite mis en opposition pour que la Nippone sauve la situation. Sur l’action suivante, d’un fauchage rageur, Abe a puni Buchard (ippon). Derrière, elle filera vers sa 4e couronne mondiale. Une nouvelle défaite contre la reine des 52 kilos que Buchard a mis un moment à accepter : "Beaucoup de déception sur le quart, car je viens sur ce genre de championnat pour ces matches-là et préparer au mieux les JO. Ce qui a été plus dur c’est de me remobiliser."

Uta Abe, six lettres, un prénom qui signifie chanson et un refrain que l’on répète sans cesse à Buchard. Comment passer l’obstacle originaire de Kobe ? Buchard l’a déjà fait. Elle est la seule non-japonaise à l’avoir réussi. C’était en 2019 au tournoi de Tokyo, toujours sur ce kata-guruma, son passe-partout. La petite princesse du judo en avait pleuré toutes les larmes de son corps. Ce succès aurait été le seul en 9 confrontations malgré quelques affrontements mémorables dont la finale olympique ou la demie des Mondiaux 2022 à Tashkent. Ce jour-là, Buchard avait remonté un waza-ari de retard. A Doha, Christophe Massina, son entraîneur en équipe de France, n’a pas du tout vu le même visage de sa protégée : "Si on regarde la demi-finale mondiale de l’année dernière ça n’a rien à voir. L’an passé, elle est montée en voulant être la patronne. Je n’ai pas ressenti ça aujourd’hui."

Avant de grimper sur le tatami, Buchard a répété dans les couloirs de la salle: "faut aller à la bagarre". Ce n’est pas que ça qui lui a manqué bien sûr, mais c’est une partie du problème. Rapide en action, Abe n’aime pas le judo de guérilla comme les Japonais en général. Un judo de pressing et d’attaques multipliées. Buchard en convient. Impossible d'espérer l’emporter sans un tempo au niveau de l’opposition : "Contre Abe, le top du top, je ne peux pas me permettre d’avoir des baisses de rythme. Il faut tout le temps être dominatrice, agressive et au top du rythme. Il va falloir que les coups d’accélération que je mets de temps en temps et qui la mettent en danger, les prolonger plus longtemps."

Changer la donne à Paris, en 2024

La Française a vu que sa grande rivale avait préparé certaines ripostes. Abe commence à attaquer sur sa jambe avancée. Contre presque toutes les autres adversaires du plateau, Buchard a sa cartouche en argent avec son kata-guruma. Contre Abe, il faut remplir le chargeur. Si l’on excepte l’affrontement avec Buchard, la Japonaise n’a pas tremblé ce lundi. Comme lorsqu’elle a pu planter par deux fois la Kosovarde Krasniqi, championne olympique des 48 kilos, puis l’Ouzbek Keldiyorova en finale sur un retournement au sol simplissime. Elle dispose de rares qualités gymniques pour parer les temps chauds.

Elle sait faire chuter aussi bien sur des mouvements d’épaule que de jambes. Un arsenal complet auquel s’ajoute son sourire inflexible malgré la dureté des affrontements. Buchard a déjà exploré d’autres voies pour tenter de faire tomber le phénomène. Souvent le naturel la ramène à son kata-guruma mais avec un sode (mouvement d’épaule), elle l’a déjà mise en danger. Un travail de techniques vers l’arrière a aussi été entamé pour multiplier les pistes. Assurée du strapontin olympique grâce à sa victoire aujourd’hui, Abe sera la fille à battre dans la verrière du Grand Palais Ephémère l’an prochain aux JO.

"Je m’entraîne tous les jours pour être championne du monde et olympique mais quand on a un tel obstacle sur son chemin ça pique forcément admet la native de Noisy-le-Sec. Il va falloir trouver les ressources, travailler encore plus. Va falloir la battre." C’est une task force d’entraîneurs nationaux, de clubs, d’hommes à la vidéo, qui va s’activer autour de Buchard pour que l’histoire ne soit plus la même dans 14 mois à Paris.

Morgan Maury à Doha