RMC Sport

Mondiaux de judo: le titre historique de Gaba, pas de finale chez les femmes, l'absence de Riner... quel bilan pour l'équipe de France?

placeholder video
L’équipe de France de judo repart de Budapest avec quatre médailles individuelles dont le titre de Joan-Benjamin Gaba chez les moins de 73 kilos mais seulement une septième place dans la compétition par équipes. Le chantier pour Los Angeles 2028 est lancé.

Balayons le sujet d’entrée: les récents championnats du monde post-JO n’ont pas réussi à l’équipe de France. A Budapest, déjà, en 2017, la France repart avec trois médailles: titres pour Clarisse Agbégnénou et Teddy Riner, médaille de bronze pour Hélène Receveaux. En 2022 à Tashkent, il y a l’or de Romane Dicko et trois bronzes pour Amandine Buchard, Manon Deketer et Julia Tolofua. Le Budapest cuvée 2025 est du même tonneau. Quatre récompenses, le titre pour Joan-Benjamin Gaba (-73kg), une deuxième place et deux troisièmes places. La France se classe cinquièm nation derrière l’inamovible Japon (6 titres, 14 médailles), la Russie sous bannière neutre, l’Italie et la Géorgie.

Pas de finale pour les filles

Dans la maison France, il y a deux salles deux ambiances. Les garçons, jadis à la cave, qui montent en flèche. Les filles, autrefois reines de la planète, qui perdent du terrain: "Sur les filles on a hérité d’un niveau qui commençait à baisser", pointe Frédérique Jossinet, la patronne des Bleus. "Il y avait des signes qu’on avait remarqués. C’est une confirmation, chez les filles il faut mettre un certain nombre de choses en place. Pas de finale pour les filles. Le niveau chez les féminines grimpe. Tant mieux, ça va nous pousser dans nos retranchements."

Derrière les médailles de bronze de Sarah-Léonie Cysique (-57kg) et Romane Dicko (+78kg), il y a eu la cinquième place de Shirine Boukli (-48kg) et la septième de Margaux Pinot (-70kg). Amandine Buchard a buté sur la boss Uta Abe avant les matchs à médaille. Mais elle a été la seule à l’inquiéter sur la journée.

Les responsables de la fédération notent que plusieurs taulières s’approchent ou dépassent la trentaine. Certaines ont déjà deux olympiades dans le judogi. "On est à un tournant", admet Lucie Décosse, responsable de l’équipe féminine. "Il faut mettre de la concurrence, faire sortir les jeunes et les faire progresser. On ne peut pas penser à ne pas faire monter d’autres filles. A la fois il faut garder de la fraicheur psy car ça fait des années qu’elles sont là, elles ont enchainé les médailles et en même temps il faut continuer à travailler."

Un délicat équilibre pour les plus anciennes du groupe. Il y a 10 mois avant le prochain championnat officiel, un championnat d’Europe en Géorgie. Les Bleues ont du temps pour réparer la machine.

La semaine exceptionnelle de Gaba

Tout va bien pour les garçons, portés par la génération Forces Spéciales. Ces graines germées après l’an 2000 prennent de plus en plus de place. Déjà en vue aux Jeux olympiques, Joan-Benjamin Gaba a réalisé une semaine exceptionnelle où à ses six victoires en individuel il a ajouté trois succès par ippon dans le par équipe mixte. Son judo courage a muté vers un judo où il possède une solution technique pour chaque problème. Dans son sillage, il peut compter sur son ami Romain Valadier-Picard, médaillé de bronze chez les moins de 60 kilos: "Je suis super satisfait sur le plan comptable mais aussi sur l’état d’esprit", retient Daniel Fernandes, responsable des masculins. "Ça valide des choix sportifs et des stratégies d’entrainement choisies bien en amont. Il y a un excellent état d’esprit. Après les JO on pouvait attendre une retombée car on avait créé la surprise (4 médailles masculines). On prouve que ce n’est surtout pas de la chance, c’est le travail qui prime."

Walide Khyar (5e) et Maxime-Gaël Ngayap-Hambou (7e) se sont aussi approchés d’une récompense. En revanche, la France ne dispose pas de moins de 100 kilos ni de plus de 100 kilos lorsque Teddy Riner est absent. Après plusieurs championnats de rang sans médaille, les garçons sont revenus dans le jeu mondial. Les Russes et les Japonais dominent avec 3 titres chacun. Au milieu, le dernier or est pour Gaba, une manière de situer davantage sa performance dans le contexte international.

"Si on veut performer à Los Angeles il va falloir se réveiller"

Jamais langue de bois, le président de la fédération française de judo Stéphane Nomis a vu les efforts déployés par les nations étrangères: "Les autres pays mettent le paquet sur les féminines dans la perspective des équipes. Il va falloir booster cette équipe de France. On va réfléchir sur la data. Si on veut performer à Los Angeles il va falloir se réveiller."

Les encadrements ont changé seulement en janvier de cette année après une période de flottement post Jeux olympiques. Il faut du temps pour créer des liens. L’arbitrage a été scruté après plusieurs évolutions en début d’année. Les critères d’attribution du yuko et du waza-ari ont été adoucies par rapport à leur mise en vigueur. "On ne peut pas tomber, résume Frédérique Jossinet qui a vu des plats ventres donner des valeurs. Et nous on doit davantage faire tomber. C’est ce qui nous a manqué."

Quand Riner n'est pas là...

Elle pointe aussi un manque de dureté durant les matchs, d’état d’esprit, de tactiques qui s’étiolent. La semaine s’est terminée avec une septième position dans le tournoi par équipes. Une grande déception dans le clan bleu. Il y a ce quart de finale envolé face aux Coréens sur le tirage au sort après la blessure d’Angel Gustan puis ce revers face aux Brésiliens: "On voit que quand on n’a pas Teddy Riner en lourd c’est très dur", pointe Stéphane Nomis. "De l’extérieur je vois que beaucoup manquent d’envie, je ne connais pas les raisons. En tant que champion olympique on n’a pas le droit de perdre les Europe et les monde."

Un mauvais vendredi qui sera peut-être salvateur. Les Bleus ont prouvé dans le passé leur capacité de rebond dans cette épreuve. C’est vrai qu’elle est de plus en plus dure à remporter. Certains pays essentiellement basés sur leur judo masculin ont poussé des politiques féminines et en récoltent aujourd’hui les fruits à l’image de la Géorgie avec le titre d’Eteri Liparteliani en moins de 57 kilos et leur sacre historique par équipe. Le monde du judo est en train de bouger fort.

Morgan Maury à Budapest