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Saint-André : "J’assume d’avoir été un mauvais sélectionneur"

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EVENEMENT RMC SPORT. Philippe Saint-André était l’invité du Super Moscato Show ce mercredi sur RMC. L’ancien sélectionneur du XV de France est revenu sur le dernier Mondial, achevé sur une déculottée en quarts de finale face à la Nouvelle-Zélande (62-13). « PSA », qui publie le livre « Devoir d’inventaire : dans les coulisses d’une branlée historique », assume le fait de ne pas avoir été à la hauteur de sa fonction.

Aucune rancœur contre les médias

« Fâché ? Non. Je n’ai aucune rancune. C’est votre métier. Pendant quatre ans, on n’a pas gagné beaucoup de matchs, donc c’était normal de se faire attaquer. Les mois de novembre ont toujours été d’un bon niveau… à part le dernier et cette branlée historique. »

Le moment le plus dur du mandat

« Le plus dur dans ces quatre ans, c’est que quand tu es l’ancien capitaine du XV de France et que tu deviens sélectionneur, tu rêves de victoires, de faire vibrer le rugby français, que les supporters soient à 200% derrière l’équipe. Et on n’a pas su le faire, ou on l’a fait trop rarement. On a formé une jeune génération qui va arriver à maturité, je l’espère, lors des quatre prochaines années avec Guy Novès. Dès samedi, je serai le premier supporter de l’équipe de France. »

Le Top 14, la clé du problème

« Je prends une grosse responsabilité dans l’échec, attention. Avoir des étrangers comme Jonny Wilkinson, c’est toujours bien, mais quand tu en as 70%... Quand tu es sélectionneur de l’équipe de France, que tu vas voir des matchs et qu’aux ailes, il y a trois Fidjiens et un Australien… Nos jeunes de 19 à 25 ans ne jouent pas. Nos jeunes peuvent avoir des résultats exceptionnels avec les équipes de France, mais ils ne jouent pas dans leurs clubs ! »

« Je ne suis pas du tout dégoûté du rugby»

Une nouvelle génération difficile à manager

« Je me suis trompé. Sur mon vécu d’entraîneur, j’ai travaillé dix ans en Angleterre et à Toulon, qui était plus une équipe anglo-saxonne que française. C’est certain que sur le message, je ne suis pas arrivé à les transcender sur une longue période. D’un autre côté, j’ai vraiment la sensation qu’avec cette nouvelle génération, c’est à nous de nous adapter. Et je n’ai pas su m’adapter. Le très haut niveau, ce sont des stats, de la haute performance, une auto-détermination incroyable, vouloir bouffer tout le monde. Comme joueurs, on en a pris des branlées, et des grosses, mais après on en voulait au monde entier et on était capables de se resserrer et de renverser des montagnes. Là, j’avais la sensation qu’au contraire, plus on prenait la pression et plus ça annihilait les joueurs. C’est pour ça que j’ai essayé d’en prendre, mais ça n’a pas suffi. C’est la première génération de vrais professionnels. Il faut que la Fédération s’adapte, qu’elle soit celle qui salarie les 32 meilleurs joueurs. Le problème est culturel mais j’assume d’avoir été un mauvais sélectionneur. »

Blanco, une gêne ou un apport ?

« Quand tu es sélectionneur, tu es la tête d’affiche. Et à partir du moment où ça grêle, tu prends la grêle. Serge Blanco était vice-président de la FFR, il est arrivé à un moment et il venait la veille du match, il était à côté de moi pendant les matchs mais il n’est jamais rentré dans une composition d’équipe, dans une préparation. Il est arrivé dans une période un peu difficile, où je prenais beaucoup de coups, pour essayer d’en prendre un peu. Avant, il y avait un comité de sélection qui était quand même un contre-pouvoir. Là, le comité de sélection n’existait plus, donc j’ai été exposé en première ligne. Le problème, c’est quand tu perds un match sur deux et qu’il faut expliquer l’inexplicable. Vous avez été très gentils avec nous les 18 premiers mois. Mais quand tu ne gagnes pas, c’est normal que tu prennes la grêle. J’ai accepté le poste, avec les bonnes et les mauvaises choses. »

Bientôt de retour sur un banc ?

« Je ne suis pas du tout dégoûté du rugby, ni de cette jeune génération, au contraire. On doit s’adapter et j’aurais dû trouver d’autres solutions. Entraîneur ? Pour l’instant, j’ai choisi de faire autre chose. Je me lance par contre dans la formation. J’ai monté une académie à Tignes sur la formation des jeunes. On crée nos propres spécimens. Je suis en train de partir sur d’autres horizons. Je ne dis pas que je ne vais pas revenir, mais pour l’instant, j’ai besoin de recharger les accus. »

« Pour moi, Trinh-Duc était un n°1 »

La mise à l’écart de Mermoz

« Maxime à mes yeux n’était pas titulaire, ce n’était pas un premier choix dans mon équipe. Sincèrement, j’ai surtout envie de lui dire bonne chance car il est dans le groupe France, il va peut-être jouer samedi et j’espère faire un grand match avec Guy Novès. Je responsabilisais énormément les joueurs, j’essayais de leur annoncer l’équipe le plus tôt possible car pour moi, c’est important. La conférence de presse était le jeudi, les joueurs le savaient le mardi et je n’ai pas apprécié que le mercredi, l’équipe et les remplaçants soient connus dans la presse. Quand on est dans un groupe, il y a des règles et quand on prend des décisions, il faut les assumer. »

La non-sélection de Trinh-Duc

« Le cas de François était simple. Pour moi, il était dans les 36. C’était lui ou Frédéric Michalak titulaire pour la Coupe du monde car j’avais besoin d’un mec qui avait de l’expérience. Je voulais un ouvreur n°1 et un deuxième choix. Pour moi, François était un n°1 mais pas un n°2. C’était clair avec Michalak. Ils se sont tirés la bourre. J’avais des incertitudes sur les deux. Dans la préparation, les deux ont joué le jeu, ils ont eu un investissement exceptionnel. Après, il faut faire des choix. »

En colère contre Galthié

« On va dire que c’est un plaquage, peut-être un peu à retardement, mais viril et correct. Surtout, ce que n’ai pas apprécié, c’est qu’à un moment donné, on a fait le tour des clubs de Top 14, que Yannick Bru est allé à Montpellier et qu’on lui a interdit l’accès au club, aux vestiaires. Pour moi, quand tu es entraîneur en Top 14, tu dois ouvrir la porte aux entraîneurs du XV de France. »