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XV de France-Huget : "On veut prouver qu’on a enfin grandi"

A quelques jours du début de la Coupe du monde de rugby (18 septembre-31 octobre), RMC Sport vous propose une série d’entretiens avec les joueurs cadres du XV de France. Nouvel épisode ce mercredi avec Yoann Huget (28 ans, 40 sélections) qui va connaitre son premier Mondial après avoir raté celui de 2011 pour cause de trois « no show ». L’ailier toulousain aborde l’évènement avec un appétit débordant et la conviction que le « groupe peut soulever des montagnes ».

Yoann, que représente le maillot de l’équipe de France pour vous ?

Ça représente une nation mais aussi beaucoup d’efforts pour l’obtenir et de pression sur les épaules. On a aussi beaucoup de plaisir à le porter pour défendre nos couleurs. L’équipe de France, c’est familial. On se retrouve entre amis et en famille pour regarder des matches de l’équipe de France.

Quel est votre premier souvenir de Coupe du monde ?

C’est en 1995. Je m’étais cassé le cheville et comme j’étais plâtré, j’étais devant la télé à regarder France-Afrique du Sud (15-19, ndlr) en demi-finales de la Coupe du monde. Il pleuvait des trombes d’eau et c’était paradoxal parce qu’il faisait 30°C en France. On se disait que les Français ne peuvent pas jouer, le terrain était gorgé d’eau. Ils arrivent à sortir une belle bataille et ils pouvaient remporter cette demi-finale qui leur échappe au dernier moment.

Et votre souvenir le plus fort ?

Le souvenir le plus fort, c’est en 2007 quand les Français, au moment de haka, se présentent en maillots bleu-blanc-rouge face aux All Blacks (victoire 20-18 en quarts de finale). On se dit qu’on est avec eux. On a envie de se mettre chacun derrière un joueur et de dire « on est là ». Ce que je vais dire est un peu patriote mais ils ont vraiment porté les couleurs de la France. Ils ont eu le soutien de tout un pays derrière ce geste. Ce qui m’a marqué c’est que chacun avait pris son joueur et avait relevé le défi de le fixer sans lâcher le regard. C’était un moment très fort qui m’avait donné des frissons. C’est dans ces moments qu’on a envie d’être ensemble et de partager ces moments avec des amis.

Quel joueur vous a le plus marqué ?

A mon poste, Jonah Lomu a porté les couleurs du rugby sur ses épaules et il l’a modernisé. Il a réussi à renverser des matches à lui tout seul, notamment en 1999 où il avait redonné l’avantage face aux Français. Il avait fallu tout le collectif français pour battre ces Néo-Zélandais. Derrière ce joueur se cachait un talent pur. Il a plané sur le rugby à partir de 1995.

Vous avez manqué la Coupe du monde 2011 en raison de trois « no show ». Cela vous affecte-t-il toujours ?

J’ai été dans le groupe puis à l’extérieur. J’ai eu cette expérience de pouvoir vivre la préparation et de travailler avec les mecs avant cette déchirure qui ne se refermera jamais. Voir partir les joueurs en Nouvelle-Zélande et moi rester sur le tarmac... C’est du passé aujourd’hui. Je garde le souvenir d’une mobilisation des joueurs qui avaient front face aux critiques avant d’échouer en finale à un point de la Nouvelle-Zélande. Ce n’était pas évident à subir pour le groupe. Il y avait eu une grosse contre-performance en Australie un mois plus tôt puis la première défaite face à l’Australie. Dans une compétition, tout est remis à zéro et on peut soulever des montagnes.

« Si on ne sort pas de la poule, ce serait vraiment frustrant »

Cet épisode est-il un moteur pour vous ?

Ça été un moteur pour revenir et montrer que si j’étais en équipe de France, c’est que je n’avais rien à envier à personne. C’était grâce à mon travail. Pendant ma suspension, je voulais prouver à ces gens qui ne font pas de sport (ceux de l’AFLD qui lui ont notifié ces trois manquements au contrôle antidopage), qui ne prennent pas en compte certaines circonstances et qui suivent à la lettre ce qui a été écrit. Ils ont enlevé le côté humain. Mon vrai moteur, c’est ma famille et ma femme. C’est ce qui me pousse à me lever pour m’entraîner deux fois plus que les autres.

Quelle est votre relation avec votre sélectionneur Philippe Saint-André ?

Que ce soit avec le Stade Toulousain (Ugo Mola) ou en équipe de France (Philippe Saint-André et Patrice Lagisquet), mes entraîneurs étaient trois quarts ailes quand ils jouaient. Avec le sélectionneur, il y a un échange sur le poste. Ça fait quatre ans qu’on travaille ensemble. Ce sont des rapports d’hommes. On peut échanger, on a confiance l’un en l’autre. J’essaie de répondre à ces attentes à chaque fois qu’il fait appel à moi.

Qu’est-ce qui serait considéré comme un échec selon vous ?

Ne pas sortir des poules. Après quatre mois de préparation, si on ne sort pas de la poule, ce serait vraiment frustrant et ça ne démontrerait pas l’image et l’état d’esprit du groupe. On est travailleur et un peu besogneux. On a besoin de prouver que ce groupe a des vertus et qu’on a enfin grandi.

Pourquoi la France peut-être championne du monde ?

Il faudrait poser la question au staff. Mais la France peut prétendre être championne du monde parce qu’on a des joueurs expérimentés dans notre pack, un capitaine qui va vivre sa troisième Coupe du monde et des joueurs talentueux comme Maestri et Fofana. Une alchimie peut se faire pour nous permettre d’aller chercher une belle victoire en Coupe du monde.

Quelle est l’importance de votre capitaine Thierry Dusautoir ?

Il est charismatique. Quand on a un peu peur, on aime bien se mettre derrière lui. Il représente la sérénité. Il est toujours de marbre quoi qu’il arrive. Il n’a pas d’euphorie mais il n’est pas pessimiste quand ça va mal. Il essaie de rassembler ses troupes pour nous faire avancer et partager son expérience en 2007 et 2011. C’est quelqu’un sur qui on peut s’appuyer.

WT