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Conflit PSG-équipe de France: "On a des partenaires qui sont les clubs", au rugby, une gestion médicale des Bleus maîtrisée

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Après les blessures d'Ousmane Dembélé et Désiré Doué ainsi que la polémique qui s’en est suivie entre la FFF et le Paris Saint Germain, coup de projecteur sur le rugby. Comment s’entendent sélections et clubs? Avec quels processus? Éléments de comparaison.

La crise récente entre la Fédération Française de football et le Paris Saint-Germain, née des blessures d’Ousmane Dembélé et Désiré Doué face à l’Ukraine, a fait naître un débat concernant le protocole qui pouvait exister entre ces deux parties. D’un sport à un autre, l’exemple du rugby peut être mis en avant. Non pas que les joueurs ne puissent se blesser avec leurs sélections dans ce sport dit "traumatique", Antoine Dupont (le genou par deux fois) en est l’exemple, mais le fonctionnement des dernières années entre le staff de Fabien Galthié et les clubs aide à anticiper toute mauvaise surprise.

Car depuis plusieurs saisons, et après des décennies de querelles internes entre les deux parties, le sélectionneur a, selon ses dires, voulu "tout mettre à disposition". Sur le travail physique des internationaux, le suivi et toutes les données sont partagées sur les plates-formes de GPS et donc transparentes, à la faveur de l’équipe de France en premier lieu, qui possède un bilan chaque semaine, puisque les joueurs passent bien plus de temps en club. La cellule performance, menée par Nicolas Jeanjean, est en lien permanent avec ses homologues, que ce soit à Toulouse, Bordeaux ou La Rochelle, ou tout autre fournisseur d’internationaux.

À la sortie du dernier Tournoi des 6 Nations remporté par les Bleus, ce dernier avait félicité les joueurs pour leur travail sur le plan physique et souligné qu’il n’était pas particulièrement inquiet pour la suite et les longues semaines qui séparaient le prochain rassemblement (fin octobre pour les joueurs dit "premium" qui n’ont pas été en Nouvelle-Zélande): "Ça fait partie de la relation entre les joueurs et la préparation physique de la sélection, les préparateurs physiques de clubs. Ces 'va-et-vient', on commence à les maîtriser. Ce que je souhaitais vraiment souligner, c'est qu'on a des adversaires en sélection qui sont les autres équipes nationales, puis on a des partenaires qui sont les clubs."

"On est dans cette relation qu'on a l'habitude de gérer désormais"

Loin des Bleus mais pas loin du cœur… le suivi et l’échange sont permanents. "Quand ils repartent en club, le but est de les accompagner aussi, et d'accompagner les clubs en leur donnant des informations, par exemple sur tout ce qu'ils ont vécu pendant le Tournoi. Pour qu'ils continuent à viser juste, sur l'accompagnement de ces joueurs sur une fin de championnat. Donc on est dans cette relation qu'on a l'habitude de gérer désormais."

On ne dit pas que les blessures ne crispent pas les clubs, employeurs principaux de ces joueurs professionnels, mais pour s’éviter d’autres combats que celui qu’il a à mener sur le terrain à l’international, les entraîneurs tricolores tentent de déminer le terrain, aidés par une convention officielle sur la mise à disposition signée et annexé régulièrement entre la Ligue Nationale de Rugby et la Fédération Française de Rugby.

De plus, les entraîneurs des Bleus, William Servat, Laurent Sempéré, Patrick Arlettaz, en plus de Fabien Galthié, se rendent régulièrement chez les membres du Top 14. Ils peuvent y passer une journée, ou parfois deux à trois jours, comme cela s’est passé à Toulouse le 13 mai dernier (ou à Pau et Toulon avant), à prendre le pouls de ceux qui savent le mieux comment se comportent les meilleurs des éléments français. Avec un volet physique intégré, puisque sur les séjours plus longs, ils se déplacent également avec la cellule "performance" et médicale, qui elle-même assure ses propres visites, comme à Bayonne cette semaine ou à Lyon et Clermont la semaine suivante.

Des programmes envoyés un mois avant aux clubs

Le rugby français désire ardemment remporter le premier titre de champion du monde de son histoire en 2027 en Australie. Le rapport est donc permanent, gagnant-gagnant serait-on tenté de dire, car les deux parties n’ont aucun intérêt à se faire la "guerre". Car hors Coupe du monde, où la préparation se fait sur trois mois, le quinze de France n’a que peu de temps avec ses joueurs: lors de la prochaine tournée de novembre, ils débarqueront le dimanche 26 octobre, à deux semaines de la rencontre face à l’Afrique du Sud. Il n’y aura qu’une véritable semaine de préparation, la deuxième étant plus axée sur le match et non sur de la remise à niveau potentielle. Dans ce sens, un mois avant, la cellule performance envoie aux clubs le programme à venir lors du rassemblement à Marcoussis.

Reste les cas de blessures, avec deux possibilités: si celle-ci intervient avant que le joueur ne rejoigne le rassemblement des Bleus à Marcoussis, les staffs médicaux respectifs échangent, afin de voir si le joueur peut se rendre tout de même à Paris afin d’être "ménagé" pour espérer être aligné. Un forfait est sinon déclaré rapidement sur les cas les plus sérieux. À l’inverse, en cas de pépin physique sous le maillot bleu, ou pendant la préparation d’un match, c’est le même protocole. La blessure d’Antoine Dupont lors de la Coupe du monde 2023 face à la Namibie s’est gérée à Toulouse, sous l’égide du staff médical du Stade Toulousain. L’homme en question, la nature de la lésion et l’enjeu du quart de finale à venir avaient quelque peu tendu tout le monde, il est vrai. Mais dans l’ensemble, on peut estimer que le rugby français a pacifié sa relation équipe nationale-club.

Wilfried Templier