XV de France: "Fabien m'a dit qu'il comptait sur moi pour le futur", Danty revient sur son absence pour la tournée d’automne

Le groupe rochelais a-t-il totalement basculé ce lundi vers le match d’ouverture de la Champions Cup, programmé vendredi à Bath, et soldé l’inattendue défaite contre Vannes (14-23) ?
On est encore en train de digérer, cette défaite nous fait beaucoup de mal. Je pense que ça nous pendait au nez et ça aurait pu être contre n'importe quelle équipe. On a pourtant bien préparé le match mais, visiblement, Vannes a aussi réussi à faire une très belle semaine d'entraînement et à venir valider son début de saison chez nous. Il n'y a pas grand-chose à dire, juste à les féliciter. Maintenant, on va devoir se réveiller parce qu'on a un gros déplacement ce week-end en Champions Cup. C'est une compétition qu'on aime jouer. Et si on est à ce niveau de performance-là, on risque de ne pas la jouer très longtemps. Il va falloir un déclic très rapidement.
D’autant que le menu est très costaud. Après les deux premiers du championnat anglais (Bath, Bristol), il y aura le Leinster en janvier…
On a vu le classement de la Premiership ce matin, un championnat qui est en train de retrouver son niveau, plus le même depuis deux ou trois saisons, notamment avec les difficultés financières. Et c'est vrai qu'on n'est pas dans les meilleures dispositions pour aller à Bath, une très belle équipe avec énormément d'internationaux anglais. Mais il faut se poser la question de savoir si gagner là-bas ne serait pas un déclic aussi pour nous ? Pour réellement lancer notre saison.
On la pensait lancée il y a quelques semaines, non ?
Je comprends que de l'extérieur, on ne nous reconnaisse pas, notamment sur l'engagement et l'agressivité qu'on a mise pendant énormément de saisons. Et que là, on n'arrive plus à mettre, qu'on ne met plus. On est même capables d'être pris sur nos points forts. Cette défaite contre Vannes est une grosse gifle, qu'il faut digérer rapidement. Toute la frustration de ce match, il vaut l'évacuer ce week-end contre Bath. Qu'on fasse enfin un match référence qui nous remette dans le droit chemin.
Une explication sur ce manque d’agressivité ?
C’est peut-être une question d’état d'esprit. On ferait bien de regarder notre troisième ligne, notamment Oscar (Jegou) et Matthias (Haddad-Victor) qui, depuis quatre semaines, nous tiennent la baraque et qui répondent présent à chaque match. Oscar n’est pas le plus costaud mais dans l'engagement, il est monstrueux ! Matthias, c'est pareil. On ferait mieux de se mettre dans la roue de ces mecs-là, ça nous débloquera déjà deux ou trois choses.
"J'étais en ville pour prendre le café, je ne me suis pas fait insulter mais je comprends […] le discours de 'ROG' (Ronan O’Gara). Il a besoin aussi de trouver ce truc qui nous fasse redevenir l'équipe qu'on a été."
Avez-vous entendu les mots de Ronan O’Gara, samedi dernier, une heure après le match ?
Sur le fait de sortir pour se faire insulter en ville ? (rires). Oui, on l'a entendu.
Et ?
J'étais en ville pour prendre le café, je ne me suis pas fait insulter mais je comprends ce qu'il veut dire. C'est qu'on a énormément de soutien, on a des supporters qui nous suivent partout en Europe, même en Afrique du Sud la saison dernière. Il y a une frustration. On est forcément très déçus pour nous, pour le club et pour nos supporters. Je comprends le discours de "ROG". Il a besoin aussi de trouver ce truc qui nous fasse redevenir l'équipe qu'on a été. Et même une équipe je l’espère encore meilleure. Je pense qu'on a les capacités pour. Mais il nous faut un déclic très rapidement.
Votre manager parlait de malaise à vite évacuer. Il y a un malaise ?
On était très mal à l'aise de cette piètre prestation. D'avoir rendu une copie aussi peu bonne à nos supporters, à nous aussi. Parce que la semaine, on s'entraîne très bien ! Et quand on arrive au coup de sifflet, on est très vite en difficulté. Donc, forcément, c'est dur. C'est frustrant parce que je pense que tout le monde travaille dur, tout le monde connaît son rôle. On est mis dans les bonnes dispositions pour être performants. Et on passe à côté…
Votre dernier souvenir européen reste cette lourde défaite (40-13) à Dublin, face au Leinster, en quart de finale de la précédente édition…
Ça a été difficile. On aimerait bien la reconquérir, cette Champions Cup. Avant de parler de la reconquérir, il faut déjà qu'on travaille pour se qualifier pour les phases finales. On sait que ça va très vite. Et ce qui va le plus vite, c'est la finale. Même en étant outsiders, on a réussi à la gagner deux fois. Notamment la deuxième fois à Dublin. Mais il faut qu'on reconstruise ce qui s'est effondré.
Vous parliez de la troisième ligne, plus haut. Vous n’êtes pas un peu flanker, désormais ?
J'étais (rires), j’étais.
Votre repositionnement à Castres, il y a dix jours, n’était qu’un "one shot" ?
Pour l'instant, je pense que ça va être mis en stand-by mais c’est une chose dont j'avais parlé avec Seb Boboul (responsable de l’attaque) et "Talo" (Rémi Talès, entraîneur des ¾) dans un match où un troisième ligne s’était blessé. J’étais sorti du terrain et je leur avais dit "lancez-moi, je suis chaud". Ils n’étaient pas trop d’accord (rires). Finalement, ils avaient fait rentrer un deuxième ligne. C'est le lundi avant Castres où "ROG", au petit-déj, m'a dit "ça t'intéresserait de jouer troisième ligne ce week-end ?"
"J’ai pris du plaisir (à jouer en troisième ligne) […] J'ai pas mal de potes qui m'ont dit 'enfin, tu joues à ton vrai poste !' J'ai compris le message (rires)."
Racontez-nous…
Je lui ai dit "laisse-moi la matinée, je te donne la réponse". En fait, dix minutes après, je lui avais dit "c'est OK pour moi". L’adaptation a dû être très rapide : le lundi matin pour le samedi après-midi, avec deux entraînements. Je ne connaissais pas toutes les touches, je ne vais pas vous mentir. Franchement, respect aux avants. Parce que c'est un boulot immense. Pour avoir fait un retour d'expérience aux trois-quarts, ce que je leur disais, c'est que les gros parfois se plaignaient un peu d'avoir des annonces tardives. C'est vrai que pour avoir été en plein milieu de tout ça, c'est compliqué. Si la communication n'est pas très précise, claire et rapide, c'est compliqué de se caler sur un mouvement ou sur une annonce.
Et vos sensations, alors ?
Malgré tout, j'ai pris du plaisir. Je n'ai pas fait le meilleur match de ma carrière, mais plutôt bien pour une première. J'aurais préféré être à ce niveau-là mais à mon poste (rires). Ça aurait été mieux. C'est une belle expérience. On verra à terme si l'opportunité se présente de nouveau, si le besoin de se faire sentir, ou pour une potentielle reconversion dans le futur. Je ne suis pas fermé à la discussion.
Votre coéquipier Levani Botia, l’ancien centre devenu terreur en troisième ligne, a sous-entendu il y a quelques jours que vous deviendrez comme lui…
Je pense qu'il y a des probabilités. Ça dépendra aussi de la vision du staff, de comment j'évolue avec les années, si mon niveau évolue. Pour l'instant, il ne vaut mieux pas jouer 3e ligne vu la concurrence, ça peut être très vite compliqué (rires). Le staff n'a pas besoin de moi.
Mais ce n'est pas incongru d’y penser…
Du tout. Je pense que mon profil correspond, j’en suis conscient. J'ai pas mal de potes qui m'ont dit "enfin, tu joues à ton vrai poste !" J'ai compris le message (rires).
Qui cela ?
Des amis avec qui j'ai joué quand j'étais à Paris, mais quand j'avais 15 ans. Parce qu'initialement, j'ai joué troisième ligne centre jusqu'au lycée. Je suis passé au centre parce que j'étais estimé trop petit quant aux prérequis de la Fédération Française de Rugby à cette époque-là. Il fallait faire 1m90, 100 kg. Au final, il y a très peu de mecs de ma génération quand j'étais au pôle qui jouaient à ce poste-là et qui sont passés professionnels. J'aurais bien aimé parce que je m'éclatais en numéro 8 quand j'étais gamin. J'ai fait toutes les équipes de France à la base parce que je jouais 3e ligne centre et par la suite centre. Mais ça se perd très vite. En dix ans, tu as tout perdu, il n'y a plus aucun repère (rires). Ça revient, mais pas en trois jours.
Vous seriez davantage un Botia ou un Bastareaud ?
J'aimerais bien un mélange des deux, C'est bien, non ? (rires).
"La tournée ? Fabien m'a très vite annoncé que je ne serais pas rappelé. C’était très dur à entendre."
Un mot sur vous, votre statut international et votre unique aller-retour à Marcoussis juste avant le premier des trois matchs de la tournée d’automne du XV de France ?
J'ai eu Fabien Galthié (la veille du match de Top 14 La Rochelle-Paris, début novembre, ndlr). Je m'attendais à une bonne nouvelle, qu’il m'annonce que j'étais rappelé pour la semaine de la préparation du Japon. En échangeant avec lui, il m'a très vite annoncé que je ne serais pas rappelé. Ce n'est pas forcément le coup de fil auquel je m'attendais. C'était très dur à entendre. Surtout la veille du match. C'était un peu délicat pour moi, je préparais un match contre Paris, je voulais être très performant pour pouvoir repostuler en équipe de France. Au final, avant même ce match-là, je savais que ce n'était pas le cas. Pendant le match, beaucoup de frustration donc beaucoup d'engagement (sourire). Parfois, l'engagement peut venir de la frustration. J'espère que ce sera le cas ce week-end. Fabien m'a dit qu'il comptait sur moi pour le futur mais qu'il voulait voir d'autres profils. Pour l'instant, il n'y a pas de porte fermée depuis son dernier appel. Après, son appel prochain, je ne sais pas ce qu'il en sera. Je continue à m'entraîner dur pour être performant avec mon club. J'espère retrouver l'équipe de France. J'ai toujours réussi à élever mon niveau de jeu lorsque j'étais en équipe de France, c'est quelque chose qui me surmotive. Je pense qu'en club, je suis souvent à 100%, mais dès que j'ai le maillot bleu, je suis à 200%. Même si je ne suis pas le meilleur centre du monde, que je ne suis pas parfait, j’amène toujours le meilleur de moi-même.