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Rayé de la carte pour les JO d'hiver 2030, Val d'Isère refuse de se résigner

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La décision de retirer Val d'Isère du projet français pour les JO de 2030 a énormément déçu sur place. Le triple champion olympique de Grenoble en 1968 Jean Claude Killy s'est dit "attristé et scandalisé" le week-end dernier et a demandé au CIO de reconsidérer sa décision. À la veille d'un week-end de Coupe du monde avec un géant samedi et un slalom dimanche, les Avalins tentent malgré tout d'y croire encore un peu.

Sous les yeux abrupts, rocailleux et inquiétants du Rocher de Bellevarde, la "Face" est à Val d'Isère ce que la Streif est à Kitzbühel, ou plus communément, ce que le Camp Nou est au football. Une institution, mieux que ça, un mythe auquel il n'est pas vraiment envisageable de ne pas aller se frotter si l'on est sur place.

La tradition est d'ailleurs immuable depuis 1955. Début décembre à Val d'Isère, la Face de Bellevarde accueille le gotha du ski pour le Critérium de la Première Neige. Théâtre du slalom géant et du slalom de ce week-end, elle se pare comme chaque année de ses habits de lumière. Damée, arrosée, lustrée, chouchoutée par les organisateurs pour conserver aux yeux du Landernau du ski son statut glacial de piste de slalom et de géant parmi les plus redoutée du circuit de la Coupe du monde de ski.

"On ne peut pas tout citer tellement le lieu est chargé d’histoire pour le ski"

Pourtant, de slaloms sur la face, il ne sera point question a priori lors des Jeux olympiques d'hiver en 2030. Si la mythique piste avaline faisait partie du projet initial et devait accueillir les slaloms masculins et féminins de ces futurs JO, le Comité international olympique (CIO) a demandé à la candidature française de resserrer les rangs et de limiter le nombre de sites.

Exit Isola 2000 (06), et donc Val d'Isère (73) qui devait accueillir les deux slaloms des JO 2030. "Chaque fois qu'on arrive à regrouper les activités en pôles, on peut mutualiser les moyens, avec trois objectifs : la simplicité opérationnelle, la baisse des coûts, l'expérience des athlètes, qui veulent pouvoir participer à la cérémonie d'ouverture et rencontrer leurs pairs du monde entier", explique ainsi le CIO.

Premier déçu, le plus célèbre de tous les Avalins, pensionnaire du Club des Sports de la station: le champion olympique de slalom Clément Noël, qui n'a pas manqué d'exprimer sa frustration jeudi, interrogé par RMC sur le sujet.

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"Ça ne m'inspire rien de bon et ça me rend un peu triste que tout ait été déplacé à Courchevel. On y a fait de très bons Mondiaux en 2023 mais la station qui a le plus d'historique avec le ski en France c'est Val d'Isère, il y a une piste mythique c'est Bellevarde, il y a ce Critérium de la Premier Neige qui se déroule depuis presque 70 ans sur cette piste, il y a eu les Mondiaux 2009, les JO en 1992, il y a eu Killy, Oreiller, les sœurs Goestchel, on ne peut même pas tout citer tellement le lieu est chargé d'histoire pour le ski. C'était logique de le voir dans les plans. Du coup ça m'a un peu peiné de le voir écarté mais j'espère qu'on va pouvoir inverser la tendance même si moi je n'ai pas d'influence là-dedans."

"90% de chances que ça ne se fasse pas à Val d’Isère"

Car pour espérer faire encore pencher la balance dans l'autre sens, c'est bel et bien au niveau politique que cela va se jouer, et ça, le maire de Val d'Isère Patrick Martin l'a bien compris. "Depuis trois jours on ne parle plus ni du budget de l'année prochaine, ni de l'école, ni de la crèche, mais que des Jeux olympiques", explique-t-il. Et c'est bien lui qui a reçu directement un appel du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes la semaine dernière pour l'informer de la mauvaise nouvelle du retrait contraint et forcé de Val d'Isère de la candidature d'Alpes 2030, avec malgré tout une note d'espoir raconte Patrick Martin.

"Laurent Wauquiez a été très clair avec moi, il m'a dit dans ces termes: 'Patrick il y a 90% de chances que ça ne se fasse pas à Val d'Isère.' Mais nous les montagnards on est résilients et combatifs, et je lui ai alors dit: 'Laurent, c'est 90, ça veut dire qu'il en reste 10 donc je me bats.' Même s'il ne reste que 1% de chance, je continue à me battre."

Faire main basse sur toutes les épreuves techniques pour se légitimer

Et des paroles aux actes il n'y a qu'un pas puisque dans la foulée de ce coup de fil, Patrick Martin a adressé des courriers au président de la République Emmanuel Macron, à la Première ministre Elizabeth Borne, et à la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra pour espérer vite pouvoir les rencontrer pour plaider le cas de Val d'Isère. "J'ai des arguments à faire valoir."

Et parmi ces arguments, le savoir-faire intemporel de Val d'Isère en matière d'organisation de courses de ski. Tous les hivers s'y déroulent deux à quatre courses majeures du calendrier mondial depuis la moitié du 20e siècle. Ce sera d’ailleurs le cas ce week-end. Et c'est tout ce savoir-faire que souhaite mettre en avant la directrice du Club des Sports de la station et ancienne skieuse professionnelle Ingrid Jacquemod, bien décidée elle aussi à renverser la tendance et même à voir encore plus gros.

"L'objectif c'est désormais d'avoir toutes les épreuves techniques, slalom et géant, masculins et féminins. Sur deux semaines olympiques, le bloc des épreuves technique c'est une semaine. Ça paraît cohérent d'avoir les skieurs et skieuses de la technique concentrés sur notre site, et on sait que sortir un gros dispositif d'infrastructures, c'est évidemment beaucoup plus logique de le faire pour quatre courses que pour deux petits slaloms. Donc autant qu'on ait un projet dimensionné et qui ait un peu d'allure."

Pour rappel, la candidature française n’est pas encore figée dans le marbre pour l’organisation des Jeux olympiques de 2030. La phase actuelle est celle de dialogue ciblé entre le CIO et "Alpes 2030". Ce dialogue doit durer jusqu’au printemps.

Arnaud Souque, à Val d’Isère