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"Un moment très, très important de ma carrière": Christian Mbilli, la dernière marche avant le Graal?

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Toujours invaincu en carrière, Christian Mbilli affronte dans la nuit du vendredi 27 au samedi 28 juin (à partir de 2h sur RMC Sport 1) le Polonais Maciej Sulecki pour le championnat du monde intérimaire WBC des super-moyens. S'il s'impose, le boxeur français se rapprochera un peu plus encore d'un choc tant désiré contre Canelo Alvarez pour le titre. Et pourrait toucher, à plus court terme, le jackpot saoudien.

Parce qu'il connait le monde impitoyable de la boxe mieux que quiconque, il ne veut pas encore s'enflammer. Pourtant, on a l'impression, le concernant, que les planètes sont en train de s'aligner. Que son moment est enfin venu. Neuf ans après les JO de Rio 2016, où il avait représenté avec fierté et brio la bannière bleu-blanc-rouge, huit ans après ses débuts professionnels à Montréal, Christian Mbilli est à un tournant de sa carrière.

Le boxeur français de 30 ans, toujours invaincu en 28 sorties (23 victoires par KO, 5 à la décision), sera dans la nuit de vendredi à samedi (à partir de 2h sur RMC Sport 1) à l'affiche d'une très belle réunion au centre Vidéotron de Québec (Canada), où figurent aussi quatre autres tricolores (Elhem Mekhaled, Sandy Messaoud, Adagio MacDonald, Moreno Fendero).

Mbilli y affrontera en clôture de la carte l'expérimenté Polonais Maciej Sulecki (36 ans, 33V, 3D) pour le championnat du monde intérimaire WBC des super-moyens (-76,2kg). Une victoire ferait de lui - théoriquement - le challenger officiel du roi de la division, le Mexicain Saul "Canelo" Alvarez, détenteur des titres WBC, WBA, IBF, WBO et The Ring. L'homme que tout le monde veut affronter. Celui qui échappe, depuis des années maintenant, au natif de Yaoundé.

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Canelo ou les millions saoudiens au bout des poings?

"Je suis à un moment très, très important de ma carrière", explique Christian Mbilli à RMC Sport. "J’ai eu 30 ans cette année. Honnêtement, je ne me vois pas boxer jusqu’à 40 ans, je me laisse encore trois ou quatre ans, maximum. L’objectif premier, c’est toujours d’être champion du monde. Ensuite c’est de faire de l’argent, parce qu’on est là pour gagner notre vie. Et actuellement on n’a pas le choix, il faut passer par Canelo qui a toutes les ceintures. C’est évidemment lui qu’on vise aujourd’hui."

Problème: le tout-puissant Alvarez, désormais soutenu par l'Arabie saoudite, dicte un peu sa loi dans la catégorie des super-moyens. Il fait fi des classements, choisit ses adversaires avec soin, l'essentiel étant souvent - on peut le comprendre - de ne pas perdre tout en gagnant beaucoup.

Alors que le manager de Canelo avait un temps évoqué le nom de Mbilli pour mai ("On était à ça de le rencontrer", confie le Français), c'est finalement le bien moins effrayant William Scull qui s'est retrouvé sur le ring contre le Mexicain à Riyad, pour une bouillie de combat, et une 63e victoire d'Alvarez en carrière. Un piètre spectacle qui a peut-être, indirectement, fait les affaires de Christian Mbilli.

Ces derniers jours, le promoteur saoudien Turki Alalshikh, grand argentier de la boxe mondiale, a ainsi fait une mise au point retentissante. "À partir de maintenant, je ne veux plus voir de combats à la Tom et Jerry où un combattant court autour du ring et l'autre le poursuit. Nous ne pouvons plus soutenir ce genre de combats avec Riyadh Season et The Ring. Nous voulons soutenir des combattants qui laissent tout sur le ring et se battent avec cœur et fierté", a-t-il écrit le 11 juin, promettant du très lourd le 13 septembre pour le choc entre Canelo Alvarez et Terence Crawford à Las Vegas. "Le monde entier regardera sur Netflix le combat du siècle entre Canelo et Crawford. Et pour cela, je veux remplir la carte de jeunes combattants affamés qui méritent la chance de se produire sous les feux de la rampe." Alalshikh a ensuite cité huit noms. Celui de Christian Mbilli était le premier.

En clair: s'il n'a pas tout de suite sa chance contre Canelo, notre Français pourrait tout de même toucher dans les prochains mois le jackpot, et goûter aux millions de dollars saoudiens. Dans les deux cas, il changerait de dimension. Mais avant ça, il y a donc Maciej Sulecki, ce week-end à Québec, dans le fief de son promoteur Camille Estephan.

Un adversaire qu'il ne sous-estime pas, après une année mouvementée

"Sulecki, c’est une bonne opposition, même si ce n’était pas le genre d’adversaire qu’on voulait", reconnait Christian Mbilli. "On aurait préféré un adversaire connu ou un top 3 voire top 5. Il est numéro 7 à la WBC, les circonstances ont fait qu’ils ont dû aller chercher plus ou moins loin celui qui pouvait accepter le combat. Mais je ne le sous-estime pas. Il a battu Ali Akhmedov chez lui avant moi, ce qui lui a permis d’avoir la ceinture WBC Silver et de demander ce combat. C’est un vieux de la vieille qui a combattu plusieurs Américains champions du monde, il a de l’expérience. Il est dur au mal, il attaque beaucoup, il a quand même une capacité physique au-dessus de la moyenne. Je pense que je suis meilleur, mais c’est un adversaire que je prends très au sérieux."

D'autant que Mbilli n'a, lui, plus combattu depuis sa victoire aux points en août 2024 contre l'Ukrainien Sergiy Derevyanchenko. Ces derniers mois, il y a eu une opération du coude gauche, et un choc franco-français tombé à l'eau contre Kevin Lele Sadjo. "On a demandé à ce que notre bourse soit versée sur un compte bancaire sous contrôle d’huissier cinq jours avant le combat, ils n’ont pas pu nous apporter cette garantie, donc on s’est retiré", résume Christian Mbilli, un peu dépité par la tournure des évènements.

Mbilli aurait aussi pu affronter Diego Pacheco, valeur montante de la division, mais là encore les négociations n'ont pas abouti. "Encore les aventures de la boxe", soupire-t-il. "C’est un sport, mais malheureusement il y a beaucoup d’enjeux financiers derrière. Que ce soit moi, Pacheco ou d’autres boxeurs, on est tous très près de rencontrer Canelo et d’être champion du monde. Malheureusement la boxe fait que dès que tu as une défaite, tu dégringoles dans les classements, on ne croit plus en toi. Donc beaucoup de boxeurs se protègent et ne veulent pas prendre de risque."

Mbilli, qui aura donc fait presque quatre mois de préparation au Québec au lieu des sept à huit semaines de camp habituelles, a d'ailleurs bien conscience que si une victoire contre Sulecki pourrait lui ouvrir les portes du grand monde, un revers pourrait aussi le renvoyer des années en arrière. "Une défaite peut tout faire basculer", prévient-il avec sérieux, et appétit. Comme toujours.

Clément Chaillou (avec Romain Poujaud et Pierre-Henri Cachera)