UFC: "Je n’y crois pas", pourquoi le coach de Gane n’a pas visé le genou blessé de Ngannou

Fallait-il viser le genou blessé de Francis Ngannou pour profiter de son souci physique? A l’issue de la victoire du Camerounais sur Ciryl Gane le week-end dernier en Californie, plusieurs observateurs ont soulevé cette question en évoquant la stratégie du coin français. La conséquence de rumeurs sur cette blessure, qui va nécessiter une opération et plusieurs mois d’absence pour le champion des lourds, qui avaient tourné sur le web avant le choc. Mais pour Fernand Lopez, coach de Gane et ancien entraîneur de Ngannou, il était difficile de les croire.
Celui qui avait annoncé avant le combat connaître "les antécédents médicaux" (et donc les points faibles) de l’homme passé sous ses ordres avant une séparation nimbée de rancune les voyait plutôt comme un piège. Invité de l’émission The MMA Hour du site MMAFighting, le patron du MMA Factory a raconté sa réaction quand le frère de Gane, David, lui a envoyé une capture écran annonçant la blessure de Ngannou: "Je n’y crois pas". Pour Lopez, ces rumeurs étaient un "appât" lancé par le camp adverse pour pousser le combattant français à changer ses plans. Et les protections aux genoux portées par le champion en titre en montant dans l’octogone n’ont pas changé sa vision. Bien au contraire.
"J’ai dit à Ciryl: 'Ne pars pas sur les low kicks (coups de pied bas, ndlr). Je ne crois pas que Francis soit blessé. Il va te contrer et te mettre KO. Ne mets pas de coups de pied vers le bas, reste sur les coups de pied qu’on utilise.'" Lopez explique aussi combien les coups de pied façon taekwondo de Gane ont permis à ce dernier de garder la distance et de maîtriser son adversaire sans gros risque dans les deux premiers rounds. Jusqu’à cette troisième reprise ou un high kick va provoquer le tournant du combat en permettant au Camerounais d’attraper la jambe du Français pour l’écraser dans une amenée au sol (takedown) ultra spectaculaire.
Derrière, Ngannou se reposera sur sa lutte, choix dicté par le scénario du début de combat comme par sa condition physique, pour retourner la situation et aller chercher une victoire sur décision unanime. Pas une surprise pour Lopez, qui avait annoncé avant le combat "bien connaître" son ancien élève mais qui n’aura pas su contrer cette stratégie. "Je savais qu’ils partiraient sur la lutte. Je l’avais répété dans plusieurs interviews : je ne voyais pas comment il pourrait nous inquiéter en boxe sur les deux premiers rounds. Et c’est ce qui est arrivé. Francis est puissant et a fait du bon boulot en lutte. Mais je n’étais pas surpris par ça. Je ne dis pas que ce qu’il a fait n’était pas bon. Mais ce n’était pas surprenant."
Ce qui ne l’empêche pas de promettre un futur proche rempli de sol à son athlète, à qui il a donné dix jours de repos avant de repartir au charbon avec un programme qui passe par des compatriotes de Khabib Nurmagomedov. "J’ai déjà appelé deux gros lutteurs du Daghestan. Ciryl va manger du grappling comme jamais ces prochains mois!" L’occasion de continuer à travailler, entre autres, cette clé de talon que Gane a tenté au cinquième round mais mal placée techniquement (et qui lui a bouffé son reste d’énergie alors qu’elle avait peu de chance d’aboutir dans cette position) alors qu’elle lui avait permis de remporter son deuxième combat à l’UFC, en octobre 2019 contre Don’Tale Mayes.
"Je ne regrette pas qu’il l’ait fait, répond Lopez face aux critiques. S’il ne l’avait pas fait et qu’on avait perdu sur décision, je m’en voudrais de ne pas l’avoir essayé car il est très bon dans cette prise. Ça fait partie du spectacle. Vous voulez que Ciryl fasse le show, il l’a fait. Dans les deux camps, qui n’a pas eu peur de cette clé? Mais cela a mal tourné. On va repartir à l’entraînement et continuer à apprendre." En laissant derrière lui la rivalité médiatique avec Ngannou. "Je suis soulagé que ce soit fini. Quand j’ai traversé l’octogone et que je lui ai serré la main, c’était ma façon de dire: 'OK mec, j’en ai fini avec ça'. Je suis fatigué de ce sujet."
Mais avant de passer à autre chose, Lopez a offert une dernière analyse de cette guéguerre verbale avec son ancien athlète: "De toute façon, peu importe ce que tu dis sur ce sujet, ça passe mal. Tu parais amer, on dirait une ex qui parle de son ancien mari. Si je regrette quelque chose, c’est de ne pas avoir réussi en tant que coach dans cette histoire. Je ne suis pas désolé que les quatre premières années avec Francis se soient bien passées mais de ne pas avoir réussi à maintenir cette relation en le gardant dans un bon état d’esprit. C’est toujours douloureux pour moi, ça me donne le sentiment d’avoir raté quelque chose. Tout a commencé parce que j’ai répondu à des journalistes en approuvant ce que Dana White avait dit sur son ego. Je le regrette. Si je n’avais pas admis cela, je pense que tout serait resté comme avant."
Lopez a expliqué avoir eu à l’issue du combat une longue conversation dans les coulisses du Honda Center avec Marquel Martin, le manager de Ngannou, et avoir partagé une étreinte avec son coach actuel Eric Nicksick. Il a également approuvé le conseil donné par Kamaru Usman, champion des welters de l’UFC et proche du Camerounais qu’il a encore aidé à préparer ce combat: "Fernand, nous sommes des frères, arrêtons tout ça". Le patron du MMA Factory semble d'accord.