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"Le meilleur camp de toute ma vie": dans les coulisses de la préparation inédite de Ciryl Gane à Dubaï avant son combat contre Tom Aspinall

Ciryl Gane lors de sa préparation au TRIPL3 MMA de Dubaï, en septembre 2025

Ciryl Gane lors de sa préparation au TRIPL3 MMA de Dubaï, en septembre 2025 - RMC Sport

Star du MMA français, Ciryl Gane va tenter de décrocher la ceinture des poids lourds de l'UFC le 25 octobre prochain à Abu Dhabi, contre le champion anglais Tom Aspinall lors de l'UFC 321. Habituellement installé à Paris, "Bon Gamin" a choisi pour la première fois de faire une préparation d'un mois et demi à Dubaï, loin de ses proches et des sollicitations en tous genres, mais auprès d'autres athlètes de très haut niveau. RMC Sport a pu le suivre sur une partie de son camp.

Des tapis d'un noir immaculé au sol. Sur les murs, des sacs de frappe parfaitement alignés sous un plafond découpé de néons. Et cette cage, jamais loin, comme un rappel du défi qui l'attend. C'est dans ce décor moderne et sobre, dans cette salle qui invite à l'effort, que Ciryl Gane a reçu il y a quelques semaines les équipes de RMC Sport. Depuis la mi-septembre, le combattant français de 35 ans a fait du TRIPL3 MMA de Dubaï sa deuxième maison.

Alors qu'il combattra le champion anglais Tom Aspinall le 25 octobre à Abu Dhabi (sur RMC Sport 1) pour la ceinture des poids lourds de l'UFC, possible dernier grand défi de sa carrière, "Bon Gamin" a fait pour sa préparation un choix fort: celui de l'éloignement. Pour la toute première fois depuis ses débuts dans la plus prestigieuse organisation de MMA au monde, Gane a décidé de quitter son confort parisien, ou plutôt de mettre de côté ses habitudes de travail, pour un camp inédit d'un mois et demi aux Émirats arabes unis. Avec un mot d'ordre: "Ne pas avoir de regrets".

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"Cette fois il n'y aura pas de 'si', ce n'est pas possible. J’ai fait trop de sacrifices"

"Si on veut accomplir des choses, il faut faire des choix", présente Ciryl Gane avec détermination. "Si on veut être en paix avec soi-même, il faut que ce mot d'ordre arrive en premier. Il ne faut pas qu'on se dise: 'J'aurais peut-être pu faire plus', 'Et si j'avais...' Non. Cette fois il n'y aura pas de 'si', ce n'est pas possible. J’ai fait trop de sacrifices."

Pour le combattant tricolore, à qui l'on a souvent (et injustement?) reproché un manque d'investissement, le terme n'est pas galvaudé. Certes, Dubaï, sa marina et ses luxueux hôtels, ce n'est pas Cayenne ni la Sibérie de Rocky IV. Le TRIPL3 MMA propose même des infrastructures d'une qualité rare. Mais pour Gane, Dubaï est une ville où ses proches, ses filles, ceux qui garantissent son équilibre au quotidien, ne vivent pas.

"Il y avait la volonté de s'isoler, de rentrer dans une bulle, d'être dans un lieu où on va être moins sollicités", assume Fernand Lopez, son manager et coach de toujours à la MMA Factory, qui l'accompagne encore dans cette aventure - avec un kiné et un vidéaste. "On a de la famille à Paris, on a des amis à Paris, on a des activités à Paris. Ici, on est isolés. Le jeu en vaut la chandelle. Et puis c'est bien pour l'acclimatation: il y a un taux d’humidité qui est impressionnant, et il fait terriblement chaud. Il fera certainement moins chaud le 25 octobre au moment du combat, mais en tout cas, on est déjà acclimatés, on est dans cette ambiance. On s'entraîne à l'heure du combat, on vit à l'heure du combat et on le fait deux mois à l'avance. C'est intéressant."

Reug Reug, Hamdy Abdelwahab ou Pouya Rahmani parmi ses partenaires d'entraînement

Intéressant, et dense. Depuis le début de sa préparation sur les rives du Golfe persique, Ciryl Gane a généralement eu droit à deux séances d'entraînement quotidiennes (11h et 22h), six jours sur sept, avec entretemps une plage de repos pour encaisser la charge de travail. Un planning éprouvant, qui a laissé place à très peu de distractions, même si on a vu le combattant au bord des parquets de NBA pour des matchs de pré-saison à Abu Dhabi ou taper quelques balles de golf... quand il n'était pas trop fatigué. On l'a bien compris: l'ancien champion intérimaire n'est pas venu pour s'amuser.

Au TRIPL3, il a pu croiser le fer avec d'autres athlètes de très haut niveau, pour la plupart des poids lourds, une denrée si rare dans les salles françaises. C'est l'autre intérêt de cette préparation doubaïote, si ce n'est le premier.

"On avait repéré pas mal de sparring partners qui pouvaient vraiment nous aider", raconte Ciryl Gane. "Il y avait ici un rassemblement de gars qui nous intéressaient. Du coup on a décidé de se déplacer plutôt que de les faire venir eux."

Ces derniers temps, Gane a ainsi pu tourner une à deux fois par semaine avec "Reug Reug", lutteur sénégalais champion des lourds du ONE FC en Asie, ainsi que son coach Ramzi Yahia (co-fondateur de la salle). Il a sparré avec Haisam Rida, spécialiste du jiu-jitsu brésilien, et a également côtoyé sur les tatamis Hamdy Abdelwahab, pur produit de la lutte gréco-romaine aujourd'hui combattant à l'UFC, Pouya Rahmani, champion du monde de grappling en 2025 et désormais au PFL, ou encore Errol Zimmerman, grand nom du kickboxing.

De quoi travailler notamment le sol et la préhension, domaines dans lesquels Tom Aspinall peut théoriquement poser à Ciryl Gane le plus de problèmes, et où le niveau du Français sera éternellement questionné. "Je n'ai jamais eu peur d'aller au sol avec qui que ce soit. Je produis des choses à l’entraînement qui sont rassurantes. C'est la raison pour laquelle je parle comme ça", lance toutefois "Bon Gamin". "Quand je dis rassurantes, c'est parce que je tourne avec beaucoup de personnes et que je vois ce que ça donne..."

"C'est effrayant la discipline qu'on a"

Ce n'est de toute manière qu'un axe de travail du camp, parmi d'autres. À Dubaï, Ciryl Gane a aussi continué d'affûter un physique monstrueux, et soigné sa préparation mentale. "On est allés chercher cette envie de finish, on a voulu faire renaître cette violence qu'on a connue à l'époque du TKO, à l'époque de ses débuts à l'UFC", résume Fernand Lopez, qui a vu son poulain forcément affecté, et peut-être paralysé, par certaines critiques ayant suivi ses défaites contre Francis Ngannou (janvier 2022) et Jon Jones (mars 2023) lors de ses deux premières chances pour la ceinture.

Le coach a connu son lot de préparations avec Gane. Mais il souligne aujourd'hui le visage et la motivation montrés par "Bon Gamin", qui n'a plus combattu depuis sa victoire contre Alexander Volkov en décembre 2024, et qui a passé les premiers mois de 2025 à réparer un pied fracturé. "Pour préparer ce combat, il fallait le Cyril qu'on a maintenant. Le gars qui est mature, extrêmement discipliné. C'est effrayant la discipline qu'on a. Et c'est agréable de bosser avec quelqu'un qui est demandeur et volontaire", se réjouit-il.

Ciryl Gane lors de sa préparation au TRIPL3 MMA de Dubaï, en septembre 2025
Ciryl Gane lors de sa préparation au TRIPL3 MMA de Dubaï, en septembre 2025 © RMC Sport

"Je pense que c'est le meilleur camp que j'ai pu faire de toute ma vie", veut même croire le prétendant numéro 1 au titre. "Par rapport aux sacrifices et par rapport aux choses mises en place autour de moi par mes équipes techniques. Des gens que vous ne voyez pas, mais qui bossent pour moi, pour que j'aie la tête libre. Ça fait partie des choses dont un athlète a besoin pour performer, moi encore plus." Toujours souriant, mais moins blagueur et particulièrement concentré sur l'échéance à venir, Ciryl Gane dit avoir trouvé une "énergie différente". "Avec toutes les choses mises en place, tous les sacrifices, que ce soit sur le plan cognitif, en termes de dépenses énergétiques... C'est un cheminement logique. Tout ça, c'est pour arriver à une date, pour arriver à ce combat de cinq fois cinq minutes", note-t-il.

Un choc pour lequel Tom Aspinall se prépare lui-même avec application du côté de Manchester, et que Gane attend avec impatience. "Plus les semaines passent, plus ça me hype parce qu'on rentre profondément dans la stratégie", dit-il. "J'ai hâte de voir ce combat-là. J'espère juste une chose: c'est que tous les deux on va arriver à 100%, bien dans nos baskets, pour pouvoir donner le meilleur spectacle. Parce que la finalité, c'est ça. À la fin, si on arrive à donner une belle guerre, tout le monde s'en souviendra."

"La vérité, on l'aura au cœur du combat", glisse de son côté Fernand Lopez, en vieux sage.

"Pour le moment on peut faire tout ce qu'on veut, raconter comment c'est beau, c'est bien. (...) Mais c'est quand arrivera le 25 octobre, quand les deux seront dans la cage, qu'on connaîtra la vérité." Et que la France saura si elle a, enfin, son premier champion à l'UFC.

C.C. avec P.H.C. et R.P.