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"Au début, ils n'y croyaient pas": pourquoi les frères Lebrun sont si forts en double

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Ils sont, certes, n°1 mondiaux, mais les Lebrun n’estiment pas être LA meilleure paire au monde. Pourtant, Félix et Alexis s’illustrent dans cette discipline et visent une première médaille mondiale à Doha au Qatar. Leur alchimie, leur communication, leur lien fraternel aident forcément. Pourtant, quand on est deux droitiers, le double n’est pas chose facile.

Tout aurait pu se passer différemment. Il y a quatre ans, en 2021, lors des championnats de France, Félix et Alexis Lebrun s’inclinent en finale. "Ils m’avaient dit: 'tu sais Nath, ça ne peut pas marcher ensemble'. Je leur ai dit: 'écoutez les gars, on va quand même essayer, on va s’entraîner et puis on verra'", se rappelle Nathanaël Molin, leur entraîneur.

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Les deux frères se souviennent également de ce moment. "Je suis un peu têtu en plus. On perd contre une paire moins forte que nous. J’ai dit :'non mais on a déjà essayé, ce n’est pas grave. On aura d’autres partenaires. C’était sympa, mais tant pis'", sourit Félix. "On s'est dit: 'non, c'est bon, on ne joue pas ensemble. On n'a pas envie de jouer ensemble, on n'y arrive pas'", ajoute le grand frère.

"Puis Nathanaël nous dit que l’on travaillera un peu et on verra. Je lui répète que non, ça ne sert à rien. Finalement ça s’est bien goupillé. Tant mieux que l’on ait travaillé", analyse Félix. Et oui, Nathanaël a bien senti la chose. Ces deux-là étaient prêts à briller et surtout il "ne leur a pas laissé le choix" de jouer ensemble ou non.

"Au début, ils n’y croyaient pas vraiment et finalement bon… ce n’est pas si mal quoi", rigole Nathanaël.

Et c’est vrai, leur coach a tout bien vu. Maintenant, Félix et Alexis sont numéros un mondiaux et vont jouer un quart de finale aux championnats du monde. En cas de victoire, ils iraient chercher leur première médaille mondiale.

Le service-remise, leur force

Mais ces résultats résultent d'un long travail acharné. Déjà parce que Félix et Alexis sont tous les deux droitiers. Un paramètre rare en double, où les paires sont souvent composées d’un gaucher et d’un droitier. "Je ne dirais pas que c’est une force ou une faiblesse, mais plutôt un paramètre qui ouvre des perspectives et qui en ferme un plus grand nombre d’autres. Il y a une stratégie à mettre en place en lien avec ça", explique Nathanaël.

"Ce n’est pas un atout. Si l'un de nous était gaucher, ça serait même mieux je pense", estime Félix.

"Mais on a réussi à travailler pour que ce ne soit pas un désavantage. Une paire de droitiers, c’est beaucoup moins naturel, il y a plus de déplacements. Le plus gros avantage d’être droitier, c’est qu’on peut venir en revers partout en remise. Ce qui est un peu moins le cas avec un gaucher où il faut tourner. Par contre quand l’échange se lance c’est beaucoup plus dur pour nous. C’est pour ça qu’on doit dominer encore plus le service-remise qu’à la normale", analyse le 6e mondial.

Tous les deux ont fait du "service-remise" une de leur force. "Je pense qu’on est très très solide", avoue Nathanaël Molin. On le voit pendant les rencontres, sur les deux premiers coups de raquettes, les Français prennent rapidement l’avantage. 

"On s’amuse ensemble"

Tous les deux sont forts, déjà, individuellement. Félix est 6e mondial et Alexis 8e. Alors quand on les met ensemble, leur niveau est très haut. Mais leur autre atout? C’est d’être frères. "Alexis est l’un des meilleurs joueurs du monde donc ça aide. Et puis la communication, on se connait par cœur donc c’est quand même agréable de pouvoir se dire tout ce qu’on a envie de se dire. Puis l’entente, l’alchimie, l’envie de profiter. On joue au ping quand même pour profiter, on s’amuse ensemble donc pour tout le monde quand tu t’amuses, tu joues mieux. Tout ça fait que c’est un petit avantage", estime Félix.

D’ailleurs, lors de leur huitième de finale des championnats du monde face à la paire suédoise Kallberg-Moregaard, Alexis était "très très très très tendu" en début de rencontre. "Le premier set, je le perds un petit peu tout seul, et je me sens pas mal par rapport à Félix. Mais c'est mon frère, je sais qu'il m'en veut, mais c'est comme ça. Ça m'atteint moins que si c'est quelqu'un que je vais un peu moins connaître. Je sais que Féfé, il va trouver les bons mots pour me remettre dedans et ça, ça peut aider", explique Alexis.

La communication a fonctionné, les deux frères ont fini par s’imposer 3-1 et sont en quarts de finale des mondiaux au Qatar. "Quand deux personnes se connaissent parfaitement, depuis longtemps, c’est une force. C’est la complémentarité aussi, de pouvoir en parler aussi beaucoup, tout le temps", ajoute leur entraîneur.

"Les Chinois sont au-dessus"

Même s’ils sont numéros un mondiaux, les Lebrun veulent rester réalistes. "Ce n’est pas pour faire le modeste mais non, nous ne sommes pas la meilleure paire du monde. Il y a quand même des paires qui sont meilleures que nous aujourd’hui. On prouve que l’on fait partie des meilleures du monde, mais LA meilleure je ne pense pas", insiste Félix.

Même s’ils ont déjà battu la plupart des grandes paires, les Lebrun butent encore face aux Chinois. "Les Chinois sont au-dessus de nous en termes de niveau. Je pense cependant qu’on est dans les deux ou trois meilleures paires. Les Chinois ne sont pas injouables du tout, on peut les battre je pense. Ils sont intrinsèquement un peu au-dessus", avoue Nathanaël Molin. En cas de qualification en demi-finale des mondiaux, les Lebrun pourraient retrouver les têtes de série numéro trois Lin Shindong et Lin Gaoyuan.

Léna Marjak