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Tennis de table: "Je recommencerai ça tous les jours", Alexis Lebrun raconte son incroyable année

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A l’issue d’une saison 2024 marquée par de nombreux titres, podiums… Alexis Lebrun, 21 ans, est revenu en longueur sur cette année complètement folle qu’il a vécu. Un entretien réalisé aux WTT Finals au Japon, à la veille de sa finale en double homme avec son petit frère Félix. Tous les deux sont allés conclure de la meilleure des manière leur saison en atteignant la place de n°1 mondiaux. Un exploit.

Alexis, si vous deviez décrire cette saison qui s’achève, que diriez-vous ?

Pas mal (rires)… C’est une saison exceptionnelle. Il y a eu des hauts et des bas, des très bas même. Je pense que j'ai vécu année de folie. C’est une année marquante dans ma carrière et ma vie.

Quels ont été ces moments marquants ?

Il y a eu plusieurs périodes. Déjà une période compliquée, où je ne joue pas très bien. Simon Gauzy passe devant moi pour la qualification aux Jeux olympiques. Malgré cette période de moins bien, j'ai réussi à faire une finale au top 16 européen, un titre de champion de France en simple et en double. C'a été assez exceptionnel en termes d'émotions de se sentir dans un moment plus dur et faire de telles performances sur des grandes compétitions. J'ai été content de ça. Puis, il y a eu, les championnats du monde par équipe où on a vécu un truc de fou. Et après l'enchaînement des quatre tournois qui me permet de me qualifier aux Jeux où j'arrive à gagner un titre à Zagreb et on gagne en double avec Simon.

Il y a ensuite le début de l'aventure olympique avec le double et la qualification en simple. Puis après, toute l'aventure olympique évidemment. On en a beaucoup parlé, pas besoin de revenir dessus, c'était juste fantastique. Et par la suite, la reprise avec l'objectif des championnats d'Europe. C'était plus que réussi. C'a été une année fantastique. Sur les grands tournois, où j'avais envie de performer, je ne me suis presque jamais raté. À part la Coupe du monde ou j'ai joué assez mal, le reste j'ai réussi à tirer quelque chose. C'est tout ça que je retiendrai.

Trouvez-vous que cette saison vous a fait grandir ?

Oui, je pense que le fait d'avoir traversé un moment un peu plus difficile et d'avoir réussi à accomplir mes objectifs principaux, ça m'a permis de beaucoup progresser et de bien évoluer, que ce soit en tant que joueur, mais aussi dans la vie. Je suis encore en train de grandir, je suis encore jeune mais je pense que ça m'a fait beaucoup changer et ça m'a beaucoup appris.

Jamais vous n'auriez imaginé vivre ça aussi vite ?

Clairement non. Un an avant, j'avais des objectifs assez élevés, mais à ce point-là je ne pense pas. Ce qui me tient à cœur ce sont les grandes compétitions mais pas forcément le classement mondial. Plutôt décrocher des médailles, des titres. Et cette année, c'est ce que j'ai fait avec la médaille au Top 16 européen, le par équipe aux championnats du monde, le championnat de France, les JO, les championnats d'Europe. C'était une année fantastique, je suis super fier et je recommencerai ça tous les jours s'il fallait.

Pendant cette période où vous alliez moins bien, Félix lui performait, grimpait au classement, on parlait également beaucoup de lui. Comment avez-vous géré cette période ?

Moi j'étais content, ça me donnait plus de temps aussi. J'avais moins de choses un peu plus difficiles à faire. On parlait beaucoup de Félix mais c'était normal. Parce que c'est un mec incroyable et il jouait un niveau de fou, qu'il joue toujours d'ailleurs. Moi ça m'allait très bien. J'étais content de jouer en équipe avec lui, grâce à lui on a pu avoir cette belle médaille aux JO, et celle aux championnats du monde. C’est une fierté de l'avoir à mes côtés. J’ai continué de m'entraîner pour essayer de me rapprocher au maximum de ce qu'il était capable de faire. Et c'est ce que j'ai réussi à faire aux championnats d'Europe. J'ai super bien vécu tout ça et c'était très cool.

Cette semaine aux championnats d'Europe, est-ce la semaine où vous avez joué à votre meilleur niveau ?

Oui, le meilleur niveau de ma vie. Je n’avais jamais eu ce niveau-là. Tout s'est mis en place à la perfection. Je me sentais vraiment super rapide et super juste à la table. Je pense que c'est une bonne base pour continuer de construire là-dessus. Et essayer de jouer de plus en plus souvent à ce niveau-là.

À ce moment-là, vous disiez que ça y est tu vous arriviez à garder un niveau de concentration constant, c'est ancré maintenant ?

Pour dire ancré, il faudrait que je continue un peu plus longtemps. Là ça fait que quatre ou cinq mois que je tiens cette concentration. Mais que ce soit dans les bons moments comme aux Europe ou dans des moments plus durs comme sur certains matchs de Pro A ou j'arrive fatigué ou sur des compétitions, j'arrive toujours à avoir un bon niveau de concentration et assurer un niveau de jeu très correct. C'est la grande nouveauté sur la fin de saison, c'est que j'arrive à stabiliser un niveau, qui me permet de passer des premiers tours. Comme aux Europe, j'ai un match très dur d'entrée, je m'en sors. Et grâce à ça, ça me permet de me lancer derrière et de jouer mon meilleur niveau de jeu.

Cette année, votre vie, à Félix et vous, a changé. Il y a clairement eu un avant et après Jeux olympiques ?

Ça a évolué petit à petit. On a commencé à parler de nous de plus en plus en vue des jeux. On a senti la chose arriver. On s'est aussi très vite entourés pour se protéger de ça. Notre mère a pu arrêter de travailler, elle s'est mise à disposition pour aider à gérer tout le côté média et sponsor. Nathanaël Molin aussi nous a beaucoup aidé. On a eu pas mal de discussions avec pas mal de gens. Ça nous a permis de le vivre assez simplement. Evidemment, après les Jeux ça a encore explosé. On en a bien profité. On s'est aussi laissé kiffer ces moments-là. Ce sont des choses qui n’arrivent pas tous les jours et pas à tout le monde. On a vraiment profité de ce moment, on a fait la fête, on est parti en vacances avec nos copains, la famille, c'était juste fantastique. Et je pense que c'est ça aussi qui nous a aidé à revenir et avoir envie de reperformer notamment aux championnats d'Europe et à Montpellier derrière.

Maintenant, vous vous faites reconnaître dans la rue, on vous demande des photos, des autographes, vous aimez ça ?

Je pense que personne n'aime se faire reconnaître dans la rue. C'est spécial et ça fait bizarre. Maintenant on doit réfléchir un peu plus avant de faire certaines choses. On a quand même la chance de ne pas être trop connu non plus. Donc si on fait attention, qu'on s'habille un peu différemment et si on est seul, on se fait moins reconnaître. Après on a de la chance encore ce sont que des choses positives. On ne se fait pas reconnaître pour nous critiquer. Dès qu'on nous voit c'est pour nous féliciter, nous dire que c'est top ce que l'on fait. Ça reste que du bonheur et c'est assez simple à vivre.

Cette saison a été aussi marquée par ce premier tournoi WTT Montpellier. C'est quand même incroyable que votre ville ait accueilli cette compétition, non ?

C'était juste fantastique. Tout s'est passé à merveille. Félix qui gagne, nous on fait un point de fou qui fait le tour du monde, l'ambiance… moi je n’ai jamais vu ça. Je pense que c'était encore plus fou qu'aux JO. Les gens ont fait trembler la salle. Ça a permis au grand public de découvrir ce qu'il se passe dans les salles de ping quand les Français s'y mettent. Je pense que ça a fait plaisir à tout le monde et ça a donné envie à tout le monde de venir vivre cette expérience. C'est cool parce que maintenant dès qu'on va jouer en France, dans un match de championnat, on sent que les gens ont envie de venir, de mettre de l'ambiance. Et on retrouve des ambiances comme ça de plus en plus. C'est juste du kiff et c'est exceptionnel.

C'est comme une ambiance au foot, avec des kops...

Oui il y a des similitudes. Je pense qu'on arrive à créer une ambiance spéciale au ping en prenant les bons côtés de l'ambiance foot sans avoir les mauvais. C'est ça qui est génial. Ça reste que de la bienveillance. Nous ça nous pousse à fond. Ce n’est pas facile à recréer à chaque fois. On sent que les gens sont motivés pour nous pousser. On essaye de leur renvoyer aussi le fait qu'on adore ça, que l'on est content qu'ils soient là. Et on essaye aussi de les faire kiffer en faisant des beaux matchs. Donc je pense qu'on arrive tous à se faire kiffer mutuellement. Eux des tribunes, nous depuis la table, c'est ça qui est beau.

Vous souvenez-vous d'où vous étiez il y a un an ?

Il y a un an... on devait être à Chengdu en Chine pour la coupe du monde mixte. On était en train de commencer à réfléchir comment ça allait se passer aux JO. À penser au double avec Simon. On se disait que si on a un bon double on aurait peut-être une chance de faire médaille. C'est là où l'aventure olympique a commencé. On a créé cette équipe de France tous ensemble aussi. C'était un beau départ pour une belle aventure.

Mesurez-vous tout le chemin parcouru ?

Oui, on a fait un beau chemin. Que ce soit moi personnellement, ou tous ensemble avec l'équipe de France, c'est assez exceptionnel. Et ça a fait qu’augmenter. Il s'est passé que des trucs de plus en plus fous donc j'espère que ça va durer aussi l'année prochaine.

Et justement, quels seront les objectifs pour la saison prochaine ?

Ça va être une saison excitante. On a pas mal d'objectifs avec le club de l'Alliance Nîmes Montpellier. On a envie d'aller gagner la Ligue des champions, d'aller gagner aussi le championnat de Pro A. Ce sont des choses qui nous tiennent à cœur. On s'éclate à jouer avec cette équipe-là. Et puis individuellement il y a de grosses compétitions qui arrivent. Le top 16 à Montreux, en Suisse, et puis l'enchaînement Coupe du Monde - championnats du monde qui va être sympa à jouer et j'espère qu'on va aller chercher quelques médailles dans tout ça.

Léna Marjak, à Fukuoka