Roland-Garros: Cecchinato, c’est aussi fou que Pernfors ou Kuerten

Marco Cecchinato - AFP
Mais d’où sort-il ? Marco Cecchinato, 72e mondial, n’avait jamais remporté un match en Grand Chelem avec ces Internationaux de France à Roland-Garros. Dans l’histoire du tournoi, seuls deux joueurs avaient atteint le dernier carré en étant vierge de succès dans un tournoi majeur : le Suédois Mikael Pernfors (1986) et le Néerlandais Martin Verkerk (2003). On peut ajouter le parcours incroyable de Gustavo Kuerten, totalement inconnu avant son parcours stratosphérique en 1997. Même pour les confrères transalpins, Cecchinato est un bonbon acidulé tombé du ciel. "C’est impensable : Djokovic restait sur 34 victoires consécutives face à nos joueurs", détaille Ubaldo Scanagatta, journaliste pour Ubitennis.
L’intéressé n’oubliera pas de sitôt cet immense tie-break du 4e set, bouclé 13 points à 11. "Les larmes sont venues sur ma chaise car je réalisais que je venais de battre un des meilleurs joueurs du monde."
La tache Mohammedia
Croisé dans les allées du stade, Nicola Pietrangeli, vainqueur ici-même en 1959 et 1969, était ébahi par la performance de son compatriote : "C’est formidable, quarante ans qu’on attendait un nouveau demi-finaliste. Si je devais le décrire ? Il est de Palerme.. Un Sicilien…De la mafia…"
Une phrase lâchée sans connotation négative mais qui renvoie indirectement aux soucis connus par Marco Cecchinato. Le 8 octobre 2015, dans l’obscure Challenger de Mohammedia (Maroc), il balance volontairement son quart de finale face à un Polonais, Kamil Majchrzak.
La justice italienne découvre la manœuvre et le suspend en juillet 2016 pour 18 mois. Six mois plus tard, une instance du CONI – le Comité olympique italien – estime que la punition est survenue trop tard. Un vice de forme qui sauve sa carrière. Aujourd’hui, le sujet ternit son sourire. "Je ne veux plus parler de cela." Ubaldo Scanagatta s’en charge, amusé : "Il a fait une bêtise mais ils avaient de meilleurs avocats que la Fédération italienne. Mais ça, ce n’est pas une grande surprise !"
Avec un prize money d’au moins 560.000 euros, Marco Cecchinato n’a plus de raison de truquer des matchs. "J’ai consenti beaucoup de sacrifices" expliquait-il. Comme le fait de quitter son île pour aller dans une académie dans le bas-Tyrol, où le suisse-allemand est de rigueur.
Assuré d’être top 30
Mais la récompense est venue tardivement. Lorsqu’il remporte fin avril le tournoi de Budapest – en tant que lucky loser ! – il n’est que 92e mondial. Après sa folle aventure parisienne, il est assuré de rentrer dans le Top 30. Il sera tête de série à Wimbledon. "C’est une chance pour mon adversaire", rigole-t-il. Il faut dire que le Sicilien a une histoire particulière avec le gazon. L’an passé, il s’était présenté au All England Club au lendemain d’un titre remporté dans un Challenger sur… terre battue, à Milan. Opposé à Kei Nishikori, il avait pris une raclée monumentale (6-2, 6-2, 6-0). "Cette fois, je me suis inscrit à deux tournois préparatoires", sourit-il.
Mais avant, il y a cette demi-finale face à Dominic Thiem. Deux jours de repos ne seront pas de trop pour digérer émotionnellement ce succès retentissant. "Thiem, je l’ai battu en finale d’un Future, à Modène." C’était en 2013. L’Autrichien s’en souvient-t-il. ? Peut-être pas. Mais il doit savoir que des garçons euphoriques ne s’arrêtent jamais en demi-finales. Les "inconnus" Pernfors, Kuerten et Verkerk étaient encore là le dimanche de la finale…