Athlétisme (championnats d’Europe): où en est Kevin Mayer physiquement, avant son décathlon de la "dernière chance"?

"Je m’entraîne chez moi comme un moine. Quand je me présenterai nu devant le public, je serai fort comme le roseau." Kevin Mayer s’était improvisé poète lors du relais de la flamme à Montpellier, sa ville d’adoption, au mois de mai. Les interrogations sur son physique sont nombreuses après de multiples pépins et blessures plus graves. A Munich lors des Europe 2022, seulement quelques semaines après son titre mondial de Eugene, la cuisse de Mayer l’a empêché de courir le 100m. Aux Mondiaux de Budapest en 2023, c’est un tendon d’Achille douloureux qui le fait abandonner à la longueur. Le recordman du monde savait donc qu’il fallait réaliser un décathlon pour se qualifier à Paris 2024, mais gêné par une hanche, il renonce à sa tentative de minima en Australie en décembre dernier. Pour finir, en stage pendant un mois à San Diego en Californie en mars, son décathlon qualificatif s’arrête dès la hauteur à cause d’un grand adducteur...
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De longues semaines de doutes concernant le grand adducteur
Aujourd’hui, Kevin Mayer se veut rassurant sur son état de santé. "Je ne sais pas trop ce que j’ai dans les jambes, mais ce qui est sûr, c’est que je me sens bien à l’entraînement. Avec mon expérience et mon corps du moment, les minima ne sont pas un problème." Les feux sont donc au vert et les impressions visuelles laissées par le Français sur le stade d’échauffement romain sont bons. Les retours du clan Mayer sont positifs. Mais le Montpelliérain s’est déjà montré bluffeur et avait caché des blessures. Il joue a priori carte sur table cette fois. "Après San Diego, on a mis beaucoup de temps à comprendre d’où venaient les tensions de mon grand adducteur. Mais il est très bien remis, une fois qu’on a compris comment gérer la tension, c’est parti vite." Une période d’incertitude au printemps lors de laquelle Kevin Mayer a pensé collaborer de nouveau avec Jérôme Simian, son ancien coach et spécialiste de la préparation physique. Sans aller plus loin.
Le 110m haies, "c’est délicat, une sorte de sciatique"
Il reste tout de même quelques interrogations concernant le corps de Mayer. Qu’elles soient réelles ou mentales. "Là, je vais bien. Mais mercredi dernier, j’avais une tension au quadriceps. Et le lendemain, je n’ai plus rien. Donc j’apprends à ne plus trop écouter." C’est pourtant la spécialité du Français, l’homme qui poussé la machine le plus loin dans l’histoire en 2018 avec ses 9.126 points à Talence. Son nerf sciatique le titille encore un peu. "Ma gêne sur les franchissements de haies, c’est délicat. C’est nerveux, une sorte de sciatique. Ce n’est pas plus grave que ça mais je sens ma hanche." Mayer a tout prévu et grâce à son talent, il a même travaillé le passage des haies avec son mauvais pied d’appui. "Comme ça, au cas où, je pourrai courir le 110m haies malgré tout, mais normalement ça ira."
"Je n’abandonne pas les Jeux olympiques comme ça"
Si le corps va, les minima seront dans la poche. Romain Barras, ancien champion d’Europe du décathlon et directeur de la haute performance à la Fédération française d’athlétisme, est rassuré par son champion. "Il n’est pas là pour rigoler. Il ne manque pas de moteur. Peut-être manque-t-il de réglages, mais il se règle vite. L’essentiel, c’est sa qualification." Soit en marquant 8.460 points donc, et Mayer peut même se contenter de 8.000 ou 8.100 points en s’appuyant sur le ranking mondial. S’il n’a jamais été champion d’Europe, le double vice-champion olympique ne vise que ces minima. "J’ai envie d’exploser la piste, mais toutes les cinq secondes, je me répète, tu es là pour la qualification, c’est tout." Le Français veut en finir avec cette attente interminable, enfin. Mais il a prévu la suite malgré tout. "Si je fais 0 à la hauteur, je chercherai un autre décathlon. Je n’abandonne pas les Jeux olympiques comme ça."