NBA: pourquoi la place de N°1 de la draft peut être un fardeau pour Risacher

Son destin a basculé sous les projecteurs du Barclays Center de New York. C’est ici, dans l’antre habituel des Brooklyn Nets, que l’histoire entre Zaccharie Risacher et la NBA a officiellement débuté. Le premier chapitre s'est ouvert dans le faste d'une cérémonie prestigieuse. Il appartient désormais au jeune Français d’en écrire la suite, cette fois sur les parquets.
"Je sais que la draft NBA n'est pas la fin, c'est juste le début", clamait le jeune ailier auprès d’ESPN au moment de son inscription à la draft, fin avril. Environ deux mois plus tard, après avoir été sélectionné en première position par les Atlanta Hawks, le constat n’a jamais été aussi vrai.
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Eviter d'intégrer la liste des "busts"
Zaccharie Risacher est désormais un joueur NBA. Ça, personne ne lui enlèvera. Pas plus que l’étiquette de N°1 de la draft, qui restera à jamais collée sur son front. Pour le meilleur… et pour le pire.
Le pire, c’est bien entendu la pression inhérente à un tel statut. Quand on est N°1 de draft, l’échec n’est pas envisageable. Sous peine d’être la risée du monde du basket. L’histoire de la NBA regorge d’exemples de ces gros gâchis, communément appelés des Busts. Les plus célèbres? Anthony Bennett (2013), Kwame Brown (2001), Michael Olowokandi (1998) ou LaRue Martin (1972).
N°1 de draft, ils ont tous les quatre eu des carrières anonymes. Malgré des statistiques très faibles, Kwame Brown et Michael Olowokandi ont de même réussi à durer - un peu - dans le temps (607 matchs à 6,6 points de moyenne pour Brown ; 500 matchs à 8,3 points pour Olowokandi). Mais pour Anthony Bennett et LaRue Martin, l’aventure NBA s’est arrêtée au bout de quatre saisons. LaRue Martin, drafté par Portland, n’a inscrit que 5,3 points de moyenne entre 1972 et 1976. Après une dernière pige à Brooklyn en 2016-2017 (23 matchs à 5 points et 3 rebonds de moyenne), Anthony Bennett est de son côté passé par le championnat de Porto Rico, de Taïwan ou encore de Corée du sud. Loin, bien loin des parquets de ligue nord-américaine.
Une carrière "honorable" ne suffira pas à s'éviter les critiques
D’autres exemples, moins extrêmes, montrent à quel point ce statut de N°1 de draft est difficile. Certains, comme Andrea Bargnani, choisi en première position par les Toronto Raptors en 2006 (14,3 points de moyenne en 550 matchs disputés entre 2006 et 2017), ont eu des carrières tout à fait honorables. Mais cela ne suffit pas à s’éviter les commentaires les plus acides: dans l'esprit de beaucoup, être N°1 de draft doit être synonyme d’excellence, sous peine d’être pointé du doigt.
Depuis 1996, 18 des 27 premiers choix de draft ont soit été All Star, soit figuré dans une All-NBA Team. Les neuf autres? Michael Olowokandi, Kwame Brown, Andre Bargnani, Greg Oden, Anthony Bennett, Markelle Fultz, DeAndre Ayton, Cade Cunningham, Paolo Banchero et Victor Wembanyama. Pour les trois derniers cités, ce n’est peut-être (sûrement?) qu’une question de temps. Pour les autres, les critiques sont déjà nombreuses.
Forcer sa nature pour prendre la lumière
Pour ne pas être moqué, Zaccharie Risacher va donc devoir briller. Et ce n’est pas la qualité première du garçon. Même s’il a effectué un gros travail pour apprendre à s’imposer et prendre ses responsabilités cette saison, comme nous l’a confié Frédéric Fauthoux, son coach à Bourg-en-Bresse, le nouveau joueur d’Atlanta n’est pas le joueur le plus flashy. Excellent shooteur et solide défenseur, il se présente comme un parfait role player, le profil que tous les coachs veulent avoir dans leur effectif. Mais pourra-t-il se comporter en leader offensif? Sera-t-il en capacité de prendre le leadership sur certaines séquences? Aux côtés de Trae Young, shooteur compulsif et scoreur de haut niveau (25,7 points de moyenne la saison dernière), la mission s’annonce périlleuse.
Même s’il parvient à s’inscrire sur la durée en NBA, les observateurs ne lui pardonneraient pas des statistiques trop faiblardes, surtout en termes de scoring. Et malgré des cartons offensifs cette saison (28 points en playoffs de Betclic Elite, quatre matchs à plus de 20 points en Eurocoupe), ce n’est pour l’instant pas sa plus grande force. "Dès que ça se resserre, il a tendance à donner la balle un peu trop vite à mon goût", juge Emmanuel Le Nevé, du média Envergure, spécialiste de la draft et du scouting. "On l’a vu de plus en plus en fin de saison, mais globalement ce n'est pas quelqu’un qui arrive à attaquer le panier de façon régulière."
"On n’attend pas d’un top 3 de draft qu’il tourne à 10 points de moyenne", tranche le spécialiste du scouting.
L'inévitable comparaison avec Wembanyama
Risacher est donc contraint de prendre la lumière. D’autant plus s’il veut ne pas trop souffrir de la comparaison avec Victor Wembanyama. Être le successeur du phénomène des San Antonio Spurs peut être un cadeau empoisonné. L’ancien joueur de Boulogne-Levallois, qui a par ailleurs croisé la route de Risacher à Lyon-Villeurbanne lors de la saison 2021-2022, est un talent générationnel. Pour ses grands débuts en NBA. "l’alien" Wembanyama a tout simplement réalisé l'une des meilleures saisons rookie de l’histoire. Deuxième au classement du meilleur défenseur de l’année, derrière Rudy Gobert, il a compilé 21,4 points, 10,6 rebonds et 3,6 contres de moyenne.
N’importe quel N°1 de draft 2024 aurait eu du mal à tenir la comparaison avec Wembanyama, tant les performances de l’intérieur français sont monumentales. Mais le parallèle entre lui et Risacher sera d’autant plus facile à faire que les deux partagent la même nationalité.
"Wembanyama m’a beaucoup inspiré ces deux dernières années, comme il a pu le faire pour beaucoup de jeunes joueurs français", a préféré souligner Risacher en conférence de presse après sa draft. Wembanyama est effectivement un formidable exemple à suivre. Mais tout l’enjeu sera désormais de réussir à sortir de son ombre imposante.