Pourquoi l'Asvel est contrainte de se mettre à la diète financière

Les indicateurs ne sont clairement pas au vert. L’Asvel traverse actuellement une période de difficultés financières, notamment en raison du désistement de son partenaire Skweek. Le contrat signé en 2023 avec Fedcom Media, maison-mère de la plateforme et sponsor maillot, devait rapporter 7 millions d'euros par saison sur trois ans. Mais 1,7 million d'euros ont été versés pour la saison 2023-2024 et, pour la saison 2024-2025, aucun paiement n'a encore été effectué.
Cette défaillance a entraîné un déficit de 8,1 millions d'euros pour l'année 2023-2024 et des retards dans le versement des salaires de joueurs. Conscient de la situation, les dirigeants rhodaniens ont déjà réduit la voilure de près de 23% cette saison. Le budget présenté pour la section masculine est passé de 21 millions à 16 millions d’euros et la masse salariale a aussi subi une cure d’amincissement de 7,2 millions à 5,5 millions d’euros.
"L'Asvel vit au-dessus de ses moyens"
En mars 2025, Patrick Hianasy, le président de la DNCCG, le gendarme financier du basket professionnel français, avait exprimé son inquiétude dans les colonnes du Progrès sur le modèle économique de l’ASVEL. "Il reste 1,2 million à récupérer pour 2023-2024 et rien n’a été payé en 2024-2025. Tony Parker a signé un engagement pour compenser à la fin des mois. Aujourd’hui, je vous affirme que l’Asvel vit au-dessus de ses moyens."
Invité de BFM Lyon, Gaëtan Muller, président délégué de l’Asvel, s’est voulu rassurant en confirmant qu’il n’y avait plus de retard de paiement des salaires. "Effectivement, la situation n'est pas évidente puisque quand on a un partenaire principal qui s'engage sur trois ans et que malheureusement il ne paie pas ce qu'il nous doit, ça met forcément le club dans une certaine difficulté." Selon le Progrès, l’Asvel a bien entamé des démarches judiciaires en mettant en demeure Skweek, son partenaire, de régler les sommes dues: 1,5 million d'euros versés au lieu de la moitié.
Skweek–Monaco–Asvel, le mélange des genres
Skweek est une plateforme détenteur des droits de diffusion de l’Euroleague jusqu’en 2026. C’était également le détenteur des droits du championnat de France la saison dernière avant qu’un conflit avec le groupe L'Équipe (partage des droits et production des matchs) pour des problèmes de paiement ne mette fin à la diffusion de la Betclic Elite au bout d’un an. Aujourd’hui, c’est DAZN qui diffuse le basket français. Skweek est la propriété de Fedcom Media, détenu par Aleksej Fedorycsev, homme d'affaires russo-hongrois. Fedcom est une marque bien connue sur le Rocher puisqu’il a été sponsor maillot pendant très longtemps de l’AS Monaco. L’oligarque, sous le coup de plusieurs sanctions internationales à cause du conflit ukrainien, a investi dans le basket puisqu’il est le propriétaire de l’AS Monaco Basket depuis 2022. Propriétaire de club et d’un média basket, donc, mais c’est en réalité une triple casquette puisque Fedorycsev, via Skweek, est aussi devenu partenaire de l’Asvel en 2023 (la marque est affichée sur le maillot) via un contrat de 7 millions d’euros par an sur trois ans. Ce contrat avait subi une première révision à 2,9 millions la saison après déjà des déboires financiers de Skweek.
De plus, Fedorycsev aurait très peu goûté la fronde lyonnaise au moment de la mise en vente de la LDLC Arena par John Textor et Eagle Football Group. Parker et Fedorycsev avaient formé un ticket pour racheter la salle dont le prix était fixé à 160 millions d’euros. Le tissu économique et politique lyonnais s’était mobilisé pour faire barrage à l’arrivée d’un investisseur russo-hongrois dont les difficultés économiques étaient connues de tous. C’est finalement Jean-Michel Aulas, via la holding familiale, qui a racheté l’enceinte début juin 2024, ce qui a provoqué l’agacement et la colère du propriétaire de l’AS Monaco Basket et de Skweek.
Seulement, dans le même temps, le propriétaire de l’AS Monaco Basket dépense sans compter pour son équipe avec notamment la prolongation récente de Mike James, dont le salaire annuel est estimé à 3 millions de dollars. Cette prolongation fait d’ailleurs l’objet d’une enquête de la Fédération française de basketball puisqu’aucun agent reconnu par la FFBB n’a été mandaté sur cette opération.
La NBA Europe sceptique?
Tony Parker l’avait affirmé à plusieurs reprises. L’arrivée de la NBA en Europe est une bonne chose et il souhaite que l’Asvel prenne le train en marche. "TP" avait déclaré publiquement qu’il souhaitait même une fusion entre l’Euroleague et la NBA. Sauf que l’Asvel dispose d’un statut particulier auprès de l’Euroleague avec ce statut de licence A et d’actionnaire. Elle est liée aux autres et ne peut pas sortir de l’Euroleague facilement même si l’Asvel, comme le Real Madrid, n’aurait pas encore ratifié le nouveau deal marketing signé avec l’agence IMG jusqu’en 2036.
Il y a un an, l’Asvel et tous les clubs actionnaires de l’Euroleague (Real, Olympiakos, Bayern Munich…) s’étaient engagés à rester jusqu’en 2040 au sein de la ligue semi-privée. Mais c’était avant l’offensive lancée officiellement par la NBA et la Fiba. Si Tony Parker a un rôle d’intermédiaire entre les deux mondes américains et européens, sa surface financière et les problèmes économiques de son club interrogent, y compris la NBA. Si Paris est clairement dans le viseur de la grande Ligue, le souhait d’une présence lyonnaise n’est pas aussi prioritaire.