RMC Sport

Guillaume Martin: "Sur le Tour, on est un peu dissocié de soi-même, on joue un personnage"

placeholder video
Attendu du 25 au 29 janvier pour sa rentrée sur le Challenge de Majorque en Espagne, Guillaume Martin (29 ans) s’apprête à vivre une saison au calendrier plus léger que les précédentes. Une manière pour le leader de l’équipe Cofidis de mieux se préparer pour son objectif majeur de la saison, le Tour de France. RMC Sport a rencontré le Normand en fin de semaine dans le cadre cosy et détendu de la Brasserie du Shack, en face de l'Opéra Garnier à Paris. 

Guillaume, vous avez choisi cette année de courir un peu moins que d’habitude, quelles sont les raisons de ce choix ? 

Un petit peu moins oui, puisque je ne ferai qu’un seul grand Tour, ce qui va me faire déjà 20 jours de course en moins par rapport aux trois dernières saisons. Ce n’est pas négligeable étant donné que je fais partie de ceux qui courent le plus. 80 jours par saison, ça finit par peser sur l’organisme. Donc j’avais la volonté d’en faire un peu moins même si ce n’est pas du tout dans ma nature de me réfréner. Ça doit notamment me permettre de mieux cibler l’objectif du Tour de France. J’ai quand même un début de saison dense par moments, mais avec des phases de récupération un peu plus longues que par le passé et des objectifs plus ciblés. 

Vous avez parfois pu manquer de fraîcheur à trop courir les années précédentes ? 

Clairement, oui. Je suis un coureur assez régulier, je fais des saisons pleines de fin janvier à mi-octobre. Je trouve ça assez noble, c’est une marque de respect aussi pour ceux qui organisent des courses, mais c’est sûr que cette régularité peut parfois être un handicap pour aller chercher des pics de formes vraiment élevés. Et donc des grosses performances sur des objectifs ciblés. 

Pourtant vous allez vite reprendre la compétition en 2023… 

Oui, assez tôt c’est vrai. Je tiens toujours à ma course avant le mois de février. Là ce sera du 25 au 29 janvier sur le Challenge de Majorque. J’enchaînerai ensuite avec un stage en altitude en Sierra Nevada puis les courses en Drôme-Ardèche fin février comme tous les ans. Ensuite ce sera le premier gros objectif de la saison, avec la course à étapes Tirreno-Adriatico en Italie.

Tirreno-Adriatico plutôt que Paris-Nice... La Course au soleil est moins incontournable qu’avant ? 

Non ça reste une grande course, la preuve avec les noms qui seront encore au départ cette année (Vingegaard, Van Aert, Gaudu, Démare...). Il y aura toujours les meilleurs mondiaux. Me concernant, ça fait trois ans que je la fais, et j’avais envie de voir autre chose. Je n’ai jamais fait Tirreno et les années passent. A un moment il est bon de se renouveler un peu pour se prémunir d’une certaine routine et d’une certaine lassitude. Mais je reviendrai sur Paris-Nice avec plaisir. C’est une course toujours spectaculaire, exigeante physiquement et nerveusement. Au niveau météo, c’est aussi moins exigeant sur Tirreno, il y a aussi moins de risques de bordures.  

Ce serait quoi pour vous une année 2023 réussie ? 

Je pense que depuis le début de ma carrière j’ai eu de beaux résultats, mais il me manque un coup d’éclat et une victoire au niveau World Tour (la plus haute division du cyclisme professionnel, ndlr). Je pense en avoir les moyens, donc il est temps de concrétiser. Le parcours du Tour cette année semble bien me convenir. Ça ressemble un peu au Tour 2020 avec directement de la montagne au départ. A Nice, ça m’avait bien convenu. Après, ce n’est pas parce qu’il y a des bosses très tôt que ça ne va pas être dangereux et piégeux. Au Pays basque je m’attends à des étapes assez stressantes, avec des petites bosses sur des petites routes où il faudra être placé, où on aura en permanence ce risque de cassures et de chutes. On sera quand même content quand on aura passé les trois premières étapes. 

Cela veut dire qu'il y a de la pression à disputer le Tour de France ?

En vrai, pas plus que sur une autre course. Voire moins, mais c’est personnel, c'est dans la manière d'aborder l’évènement. J'aurai peut-être même plus de pression au départ du Challenge de Majorque qu’au départ du Tour de France. Le Tour ça arrive en milieu de saison, et y’a une telle effervescence médiatique qu’on est un peu dissocié de soi-même, on se regarde avec de la distance. Sur le Tour je n’ai pas l’impression d’être en jeu, c’est un personnage que je joue et ce personnage comme ce n’est pas moi, je ne ressens pas de pression. C’est assez étrange.

Propos recueillis par Arnaud Souque