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"Je ne voulais pas finir sur un Tour de France dans l’anonymat": après 14 ans de carrière, Romain Bardet fait ses adieux à la route sur le Dauphiné

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Le Critérium du Dauphiné signe la fin de la carrière du français Romain Bardet qui souhaite désormais se consacrer au Gravel. Invité de l’Intégrale Sport samedi 7 juin, veille du départ, sur RMC, le coureur de 34 ans est revenu sur son choix et les meilleurs moments de sa carrière.

Romain, comment vous sentez-vous avant le départ de ce Critérium du Dauphiné, votre dernière grande course en professionnel? Un peu stressé?

Non, le stress... Ça fait longtemps. Excité oui, forcément, parce que je ne sais pas si je réalise vraiment que c'est la fin, parce qu'il y a quand même encore une belle semaine qui s'annonce. Le Dauphiné, c'était un vrai choix de finir sur cette course-là, que je n'ai plus couru depuis 2020. Et je l'aborde dans des conditions différentes. J'ai toujours joué le classement général et là je sors d'un Tour d'Italie assez fatiguant. Cet enchaînement, il n'est pas du tout commun dans le monde du vélo. Ma volonté, c'était de faire sur cette saison 2025 un dernier grand tour, le Tour d'Italie. Et puis, pour le Critérium du Dauphiné, c'est une course locale pour moi mais aussi une course sur laquelle j'ai eu de grandes satisfactions et qui me plaît beaucoup. J'ai voulu prolonger un petit peu pour finir auprès des miens sur des routes qui me sont chères. 

Mardi, la troisième étape de ce Dauphiné s’élancera de Brioude, votre ville natale avec sûrement beaucoup d’hommages. Pourquoi n’avez-vous pas choisi d'arrêter après le Tour de France, comme l'avait fait par exemple Thibaut Pinot?

Thibaut avait fini la saison. Moi, j'ai pris la décision après le Tour de France de l'an dernier, où j'ai pu revêtir pour la première fois le maillot jaune. Je crois que sur le Tour, j'ai beaucoup donné, j'ai eu énormément de satisfactions. Par rapport à mon potentiel, j'ai exploré l'ensemble de mes capacités et c'était difficile pour moi d'envisager de réaliser quelque chose que je n'avais pas fait jusqu'à présent. Ce n'est pas un manque d'ambition, c'est simplement être honnête avec son parcours, avec son équipe et ses capacités actuelles. C'est une grande aventure qui peut être très belle mais qui a aussi des longs moments de souffrance et je ne voulais surtout pas courir le Tour de France de trop, finir celui-là dans l'anonymat, n'étant plus capable de jouer le classement général. J'ai mis sept ans avant de regagner une étape, ma quatrième sur le Tour de France donc ce sont des longues périodes de disette que je ne voulais pas forcément revivre.  

Tous les favoris du Tour de France sont présents sur ce Dauphiné: Pogacar, Vingegaard, Evenepoel et même Van Der Poel. C'est un peu la grande répétition avant le Tour. Est-ce que le scénario du Dauphiné peut déjà nous donner des indications sur le finish du Tour de France 2025? 

Ce sera un bon test, un bon étalage de la forme de chacun. Pour Pogacar, on ne se fait pas trop de soucis. C'est plus par rapport à des coureurs comme Remco ou Jonas Vingegaard, qui n'a pas couru depuis Paris-Nice, il va être scruté. On a tous vu le niveau stratosphérique de Pogacar sur la première partie de saison, qui a fait un peu ce qu'il voulait. Forcément, Vingegaard va chercher des gages pour voir s'il peut être vraiment au même niveau que Pogacar sur le Tour de France. C'est pareil pour Remco, qui avait été assez en retrait l'an dernier sur le Dauphiné, puis, il a fini le Tour de France très fort, presque à challenger Vingegaard sur les dernières étapes de montagne. Donc, ça va être intéressant. Même si je m'attends vraiment à ce que Pogacar domine la course. Voir un Vingegaard aussi à un bon niveau, mais certainement un ton en dessous. Ça va nous mettre en appétit pour le Tour de France.

C'est votre dernière course mais vous vous déplacez rarement pour faire de la figuration. Vous avez déjà remporté une étape du Dauphiné. Allez-vous jouer pour le classement général ou la victoire d’étape? 

La victoire finale certainement pas. Je me suis beaucoup battu pour les top 10. J'ai eu la chance de finir sur le podium du Dauphiné. Mais là vu la start list, c’est totalement différent. Je sors du Giro très fatigué. Honnêtement, si demain il n'y avait pas le départ de la course je ne serais pas monté sur mon vélo, parce que j'ai encore du mal à récupérer de ce Giro. J'espère pouvoir jouer sur une étape et retrouver l'adrénaline d'être avec ces grands noms pour une dernière fois. Mais je sais que ça va être très difficile pour moi pendant huit jours.

Terminez-vous votre carrière avec quelques regrets?

J'aurais aimé gagner sur le Giro, c'est pour ça que j'ai essayé de prolonger une saison de plus. C'était le but de ce Giro-là. Mais pour la quatrième année de suite, j'ai fait une deuxième place sur le giro. Après, c'est des lignes de palmarès. Mais forcément l'appétit vient en mangeant. On veut toujours faire plus. Mais ça fait dix ans maintenant que j'ai eu ma première grande victoire sur un vélo, sur le Critérium du Dauphiné, dans un style de course qui me plaisait, en me portant à l'attaque, en prenant des risques en descente et en résistant face à des coureurs qui m'étaient certainement supérieurs dans les dernières montées. Je crois que c'est un petit peu à l'image de ma carrière, d'avoir essayé de toujours donner le maximum, même s’il y avait très souvent des coureurs supérieurs à moi.

Maria Azé, à Moulins