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Raymond Poulidor, chouchou des Français, est mort

Raymond Poulidor est décédé ce mercredi à l'âge de 83 ans. Huit fois sur le podium du Tour de France mais jamais vainqueur, le cycliste s'était forgé une popularité exceptionnelle auprès du public français. Le cyclisme bleu-blanc-rouge pleure aujourd'hui son "Poupou" adoré.

Jour de deuil pour la grande famille du cyclisme français. Une figure familière et très aimée, un personnage attachant mais aussi un grand champion, a tiré sa révérence ce mercredi à Saint-Léonard-de-Noblat. Raymond Poulidor, grimpeur d'exception entré dans le grand livre du Tour de France et du sport tricolore, est décédé. Il avait 83 ans.

Anquetilistes et Poulidoristes

Natif de la Creuse, venu au monde le 15 avril 1936, celui qui héritera très vite du surnom de "Poupou" est encore enfant quand le virus du vélo le touche. C'est à la fin des années 1950 que le jeune homme, revenu de son service militaire, se lance pleinement dans ce monde qui va faire de lui à la fois une star, un gagnant, un perdant et un chouchou.

Car qui dit Raymond Poulidor dit immanquablement Tour de France et Jacques Anquetil. Durant des années, les deux hommes vont s'affronter sur la Grande Boucle. Le pays suit leurs exploits et leur rivalité dans les monts de France. Chaque été dans les années 1960, l'Hexagone est comme coupé en deux, entre Anquetilistes et Poulidoristes. Le Limousin, lui, est le champion populaire, celui en lequel la France profonde se reconnaît. Cet amour, aussi fort qu’inattendu, ne se tarira jamais, même des décennies plus tard.

"L'Eternel second" craque en 1964

Sportivement, la différence est pourtant claire. Jacques Anquetil est le premier homme à s'adjuger les trois Grands Tours, avec une nette préférence pour la Grande Boucle, remportée cinq fois. "Poupou", lui, n'accroche qu'une Vuelta à son palmarès (ainsi que les Classiques Milan-San Remo 1961 et la Flèche wallonne 1963) et hérite du surnom moins flatteur d'"Eternel second". Au total, il se hissera à huit reprises sur le podium du Tour de France, dont trois fois à la seconde place. Pas une fois, il n’aura revêtu le maillot jaune.

De leurs multiples duels, on retiendra surtout ce fameux Tour de France 1964 où la bagarre entre les grimpeurs Anquetil et Poulidor n'a jamais été aussi âpre et disputée. Une édition presque dramatique, entre l'erreur de Poulidor qui oublie un tour de circuit à Monaco et offre la victoire finale à Anquetil pour 55 secondes, et cette étape mythique au puy de Dôme qui a failli tout faire basculer et à laquelle le futur vainqueur n’a survécu qu’au prix d’une fin de course acharnée.

Un monument du cyclisme

Sur le circuit pro jusqu'à plus de 40 ans – ce qui lui laissa le temps de bousculer aussi le "Cannibale" Eddy Merckx – Raymond Poulidor est ensuite resté dans l'univers du vélo, fabriquant des modèles chez Manufrance et suivant les grandes courses en tant que consultant. Fait chevalier de la Légion d'honneur en 1973, promu au grade d'officier en 2013, le coureur fait partie de ces hommes qui ont laissé une grande trace dans le cyclisme et plus généralement dans le sport français. Aujourd'hui, son petit-fils Mathieu van der Poel perpétue la tradition familiale.

Dans "Petites Histoires méconnues du Tour de France" (écrit par Patrick Fillion et Laurent Réveilhac), on apprenait ces mots prononcés, lors du Tour de France 1987, par Jacques Anquetil à son rival mais aussi ami Raymond Poulidor: "Il te faudra encore te contenter de la deuxième place. Je vais partir le premier." Quelques mois après, "Maître Jacques" était effectivement emporté par un cancer, à seulement 53 ans. Finalement, "Poupou" vient de le rejoindre à son tour. Leur grande histoire, elle, demeure.

Nicolas BAMBA