"Être plus offensif": les leçons du Tour 2024, ses ambitions… les confessions du patron de Decathlon-AG2R La Mondiale

Quelle est votre stratégie à l'heure d'attaquer ce Tour de France 2025?
Dominique Serieys: "Ce sera bientôt mon deuxième anniversaire en tant que DG de l'équipe. Le sentiment est positif. Au fil des mois et des semestres, on a tiré un vrai constat sur la façon dont on devait structurer l'équipe. On se rend compte qu'on a bien identifié les fondamentaux, ils sont sectorisés. On se sent vraiment dans une progression avec l'envie, comme a pu le dire Sébastien Joly (directeur sportif), d'être plus offensif, déterminé et aussi mieux préparé."
Avez-vous identifié des étapes clés pour remporter une victoire d'étage sur ce Tour? Quelle a été la préparation concrète de l'équipe? Sur quels points avez-vous insisté?
On a défini une feuille de route avec une vraie stratégie en s'appuyant sur des bilans et des analyses qu'on a pu faire tout au long de l'année dernière. À partir de ce constat, on a mis des choses en place. On a dédié une cellule pour les Grands Tours, et donc une cellule dédiée au Tour de France. On a souhaité, dès le début de l'année, définir et identifier un groupe resserré de coureurs qui allaient participer au Tour de France, avec différents stages en altitude, en Sierra Nevada, aux Arcs, etc. On a mené en plus un travail important sur la nutrition, et sur l'acclimatation aux conditions extrêmes dont la chaleur et le froid. On a énormément travaillé sur la partie innovation et technique avec Van Rysel et nos équipes internes qui sont en collaboration directe avec Swiss Side. On a donné la priorité à la récupération. Un élément clé qu'on a identifié, c'est que les coureurs ne peuvent pas que performer. Ils ont aussi une nécessité de bien récupérer pour retourner en préparation, avec des calendriers appropriés.
Être plus offensif, ça signifie vouloir tourner la page d'un Tour 2024 marqué par des résultats décevants après un début de saison canon ? Vous avez tiré les leçons de ces trois semaines?
Exactement. En 2024, on était partis sur un principe de deux fronts : les sprints et le classement général. Il s'avère qu'aujourd'hui c'est très difficile. Il fallait choisir et se tester pour comprendre. Le niveau est tellement élevé, aussi bien chez les sprinteurs qu'au niveau des classements généraux. Ce n'était pas une déception mais un constat. On a appris de cette année 2024 qui a été exceptionnelle, et de ce début de semestre qui est tout aussi bon avec 16 victoires. On a mieux compris comment on devait stratégiquement se comporter.
Ce départ dans le Nord, c'est aussi un grand moment pour votre sponsor principal Decathlon, dont le siège est installé dans la métropole lilloise...
C'est la région de Decathlon et de Van Rysel, mais je n'oublie pas La Mondiale, qui est basée ici à Lille. Ça triple la "pression" et les objectifs d'aller briller. Il y a une certaine volonté de notre part de faire briller le maillot et l'équipe.
En ce sens, la reconnaissance effectuée par l'équipe de la deuxième étape (entre Lauwin-Planque et Boulogne-sur-Mer) n'est pas anodine…
C'est sûr qu'elle n'est pas anodine. Mais il y aussi les autres étapes de la première semaine. Il faut se servir des bons enseignements. On l'a démontré par le passé comme sur la Vuelta avec les 13 jours en rouge de Ben O'Connor et sa deuxième place finale, ou quand on fait 4e sur le Giro (également avec O'Connor). Nos coureurs ont bien évolué, on l'a vu dans différents contextes. Un travail très important a été aussi mené auprès de Felix (Gall) parce que le très haut niveau n'est pas facile. Il faut bien faire le bilan de tout ce qui s'est passé, regarder où on a pu l'aider et comment il a pu progresser. Il y a une relation exceptionnelle avec Felix et les autres garçons.
L'actualité pour Decathlon-AG2R La Mondiale, c'est aussi la diffusion de la nouvelle saison de la série Netflix consacrée au Tour 2024. Vous en êtes l'un des personnages clés, avec l'image d'un dirigeant froid et dur avec ses équipes… Qu'en pensez-vous?
En toute honnêteté, avec le travail que j'ai, je n'ai pas vu la série, mais de ce que les équipes ont pu me dire, de ce que des gens proches ont pu me raconter, il y une analyse honnête qui est de dire : ça ne me correspond pas. Je ne suis pas comme ça. Ce ne sont pas mes valeurs ni celles de nos partenaires. Nous étions très satisfaits que Netflix soit impliqué sur le Tour mais vous le savez très bien, c'est scénarisé, c'est monté. On peut faire une comparaison avec ce qui s'est passé sur la Formule 1 (avec la série Formula 1 : Pilotes de leur destin), avec les différents griefs entre Verstappen et Hamilton. Je crois qu'on peut les féliciter parce qu'ils ont quasiment fait le même parallèle… Moi aujourd'hui, je sais réellement ce qui s'est passé et les interviews qu'on a pu faire. Après c'est Netflix, il faut l'accepter.
La manière dont vous êtes présenté ne correspond pas à la réalité?
Je ne suis pas comme ça. Des images ont été tournées de façon différente avec une temporalité qui n'est pas la même. (…) Pour donner un exemple, je suis venu sur les étapes de repos et sur quelques étapes l'an dernier, et j'ai toujours apporté une bienveillance, une confirmation de confiance. Le Tour était difficile, très disputé. Jamais je n'ai mis une pression exacerbée. Ce n'est pas vrai. On peut faire dire un peu ce qu'on veut quand on regroupe des questions ou certains de mes sourires. Les équipes sont assez touchées. Ce n'est pas ma personne.